Ce cinquième album solo de Roger Waters est dans les tuyaux depuis un sacré moment. Il faut remonter à 2005 pour trouver trace d'un autre disque, Ça Ira, et au siècle dernier (1992) pour avoir droit à autre chose qu'à un opéra extrêmement narratif. Depuis trois ans, l'Anglais fait monter la sauce en ayant interprété sur scène deux extraits de Is This the Life We Really Want? (Déjà Vu et Broken Bones). L'artiste, qui détient le record historique de recettes pour sa tournée The Wall, semble, à 73 ans, plus en forme que jamais. Et, avec l'inspiration de l'actualité mondiale, il a entre les mains tout ce qu'il faut pour faire parler de lui non pas pour une célébration du passé mais bien pour de la nouvelle musique !

En s'associant au producteur Nigel Godrich (Radiohead, Beck, REM...), Waters souhaite donner à son disque une touche moderne et onirique. Carton plein, en effet, sur ce point. Is This the Life We Really Want? regorge de détails à explorer au casque. Chaque piste, même la plus minimaliste, possède un charme sonore renvoyant forcément aux meilleurs opus de Pink Floyd. Le morceau-éponyme est le meilleur exemple de cela. Le chant de Waters, discret à la limite du parlé, se combine merveilleusement bien aux arrangements de cordes pour un effet dramatique réussi.

Malgré la rareté de Waters en studio, on nage en eaux territoriales. Aussi bien Waters que Godrich s'emploient à jouer leur propre rôle du mieux qu'ils peuvent. Is This the Life We Really Want? fait penser à un tableau de commande où le client n'est pas spécialement intéressé par la portée artistique de la toile proposée mais uniquement préoccupé par la présence d'un maximum de signes distinctifs du peintre. Ainsi, les cris de rage, les effets sonores et les paroles poétiques sont légion. Quant à Godrich, il orchestre tout cela dans le carcan précis de ce qui est attendu de lui, ni plus ni moins.

Dès l'intro When We Were Young, en forme de fausse émission interceptée par hasard, le disque se place sur les rails d'un train nommé facilité. Si vous doutez, Smell The Roses devrait vous convaincre que Waters n'a toujours pas digéré The Wall. Mais, sans David Gilmour, le tout reste assez fade et ce ne sont pas les nombreux "fuck" et "shit" qui y changeront grand-chose. De plus, la belle production, aussi détaillée et fascinante soit-elle, ne pallie pas à l'absence des génies qui ont côtoyé l'Anglais dans les années 70.

Is This the Life We Really Want? propose tout de même de très belles choses. Les claviers sont régulièrement somptueux de dépouillement comme sur Wait For Her ou Part Of Me Died. Dans ces instants-là, la voix caressante de Waters prend tout son sens. Elle évoquerait presque les vieilles chansons de Nick Cave période No More Shall We Part. La fragilité de sa tessiture renvoie, elle, aux dernières prod' de Johnny Cash. Autre réminiscence-surprise : David Bowie sur The Most Beautiful Girl. Mais l'attrait de ce nouvel album est avant tout thématique. On sent le musicien très préoccupé par toutes les idées qu'il véhicule (sur Trump qu'il qualifie de « nincompoop », sur les réfugiés, sur les attentats, etc.) Cela ne suffira pas à le faire rentrer dans l'histoire mais ça Roger Waters s'en fiche : lui y a déjà gagné sa place depuis longtemps.

Discographie :

  - The Pros and Cons of Hitch Hiking (1984)
  - Radio K.A.O.S. (1987)
  - Amused to Death (1992)
  - Ça Ira (2005)
  - Is This the Life We Really Want? (2017)

Tracklist de Is This the Life We Really Want? :

  1. When We Were Young 1:38
  2. Déjà Vu 4:27
  3. The Last Refugee 4:12
  4. Picture That 6:47
  5. Broken Bones 4:57
  6. Is This the Life We Really Want? 5:55
  7. Bird in a Gale 5:31
  8. The Most Beautiful Girl 6:09
  9. Smell the Roses 5:15
  10. Wait for Her 4:56
  11. Oceans Apart 1:07
  12. A Part of Me Died 3:12
  (en gras les morceaux essentiels)

 

Roger Waters - Is This the Life We Really Want ?
Columbia
www.rogerwaters.com

 

Roger Waters - Is This the Life We Really Want ?

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