Comme leur nouvelle première place au Billboard 200 est venue le rappeler, Vampire Weekend est un des groupes de rock indépendant préférés du public américain, au même titre que The Shins, Arcade Fire ou Fleet Foxes. Alors que « Contra » ne rééditait qu’en partie l’exploit créatif de l’album éponyme, « Modern Vampires of the City » voit le quartette se pencher sur de nouveaux styles, solidifier son ambiance sonore et, en définitive, prendre son véritable envol artistique. De quoi donner envie de disséquer son contenu.

Ce qui frappe de prime abord sur Modern Vampires of the City de Vampire Weekend, ce sont les guitares, ou plutôt leur absence. Quand on fait le compte, il n’y en a que très peu, mais chacune de leurs interventions gagne ainsi en intensité. Pour palier leur absence, l’album est rempli de claviers, voire de piano, mais l’ensemble demeure bien loin des mises en avant sonores de Contra. Ici, tout est systématiquement réalisé avec grande subtilité et finesse. Comme le clavecin de « Step » ou le piano d’« Obvious Bicycle » dont les notes résonnent longtemps après qu’elles aient été jouées. Ces mélodies, mélangées avec la geek pop, marque de fabrique de Vampire Weekend, donnent lieu à des instants savoureux notamment sur le refrain cartoonesque de « Diane Young ».

Malgré ces instants drôles où le chant d’Ezra Koenig domine les débats, ce troisième opus des New-Yorkais serait plutôt du type sérieux. L’intimité de « Hannah Hunt », la tristesse globale de « Step » ou l’intensité contenue de « Ya Hey » sont autant d’exemples montrant que le souci premier du groupe durant ces sessions n’a pas été de proposer de nouveaux titres festifs. Toutefois, sur « Worship You », le tempo, le retour fracassant de la gratte et les lignes vocales entraîneront les plus déprimés d’entre vous vers le chemin du sourire. Placé en fin d’album, il permet à celui-ci de décoller une dernière fois avant de terminer sur des notes plus noires, reflet exact de la photo de la pochette prise lors d’une journée record en matière de smog à New York City en 1966.

Vampire Weekend

Un grand pas vers l'âge adulte

Il y a dans Modern Vampires of the City une science des sentiments. Vampire Weekend joue avec eux comme il pratique ses instruments, en tâtonnant et en expérimentant jusqu’à trouver ce qui fonctionne le mieux. Ainsi, le disque ressemble à une construction éphémère, répondant aux besoins du moment mais dont la vision élaborée lui assure sa longévité. Car, qu’on apprécie ou non la musique de cette formation, il faut lui reconnaître un sacré caractère et un refus absolu de la redite. Mieux, les défauts les plus fréquemment cités jusqu’ici paraissent avoir été travaillés et se retrouvent à présent presque entièrement gommés.

Les textes, toujours aussi flous et beaux, accompagnent cette maturation spectaculaire. Vampire Weekend nous offre un disque personnel empruntant à la world music l’ouverture d’esprit, au folk la puissance de la simplicité, au r‘n’b les rythmes efficaces, à la beach pop la légèreté frivole des harmonies et plaçant le tout dans un écrin résolument moderne. Avec un sens de l’exubérance intact, le groupe fait un grand pas vers l’âge adulte, un pas qu’on ne voyait pas Vampire Weekend franchir aussi vite.

Line-up
Ezra Koenig (chant, guitare)
Rostam Batmanglij (guitare, claviers)
Chris Baio (basse)
Chris Tomson (batterie)

Discographie
Vampire Weekend (2008)
Contra (2010)
Modern Vampires of the City (2013)

Tracklist de Modern Vampires of the City (en gras les morceaux essentiels)

  1. Obvious Bicycle 4:11
  2. 2Unbelievers 3:22
  3. Step 4:11
  4. Diane Young 2:40
  5. Don't Lie 3:33
  6. Hannah Hunt 3:57
  7. Everlasting Arms 3:03
  8. Finger Back 3:25
  9. Worship You 3:21
  10. Ya Hey 5:12
  11. Hudson 4:14
  12. Young Lion 1:45
Vampire Weekend - Modern Vampires of the City