Wah, un nouvel article ! Bonjour à toi distordeur de riffs, empereur du funk, apprenti Hendrix ! Eh oui dès la première phrase je te balance un jeu de mots lamentable, je suis comme ça, direct, cash. Mais ne t'inquiète pas je vais aussi probablement t'apprendre encore deux ou trois petites choses aujourd'hui. Nous allons consacrer notre séance vulgarisation d'aujourd'hui à un effet légendaire et iconique dans le monde de la guitare amplifiée : la WAH WAH.

Concept de la pédale Wah Wah


Non, aucun rapport. Ce chien n'est pas une pédale
(sans jeu de mots, c'est une rédac' respectable ici, naméoh!)

Nous allons encore une fois retrouver notre bonne vieille onde sonore, la sinusoïde. Pour rappel, ses deux caractéristiques principales sont son amplitude et sa fréquence (mesurée en Hertz). La fréquence définit une hauteur, car plus la fréquence de l'onde est basse, plus nous sommes dans les graves, et vice versa.

Un son, plus particulièrement un son de guitare puisque c'est ce qui nous intéresse, est souvent composé de l'addition de plusieurs sinusoïdes, et l'égalisation du son consiste à choisir quelles parts de ce signal sont amplifiées ou atténuées.

Alors je te vois venir direct, qu'est-ce qu'il commence à nous parler d'égalisation celui-là, je croyais que c'était un article sur les Wah, c'est quoi cette arnaque, Pablo et Sergio allez mé refroidir ce type et loui montrer qu'on ne se moque pas ainsi dou parrain di la guitarra ?

Baissez les flingues, j'y viens : Une Wah est en réalité un effet tout simple dans le concept qu'on appelle un filtre résonnant . C'est à dire qu'elle joue sur l'égalisation (tadaah!) du son en boostant radicalement une zone de fréquences et en atténuant le reste. Le fait d'actionner la pédale déplace la fréquence centrale de ce filtre du grave (talon) vers les aigus (pointe). On pourrait considérer, en simplifié, qu'une Wah n'est rien d'autre qu'un égaliseur paramétrique réglé drastiquement et dont on déplace la fréquence d'action.

Alors je sais que cela va déplaire à don Vito de la Guitarra, mais afin de bien comprendre ce qui fait les caractéristiques d'une Wah, nous allons devoir faire un aparté sur ce qui constitue les caractéristiques d'une égalisation. Un petit schéma valant mieux qu'un long discours :

Nous avons ici une égalisation consistant à avoir boosté le son à 500 Hz (fréquence) de 18 dB (gain) pour une valeur de Q moyenne. Cette valeur Q désigne tout simplement l'amplitude de la zone grisée, qui sera étroite avec une valeur faible et large avec une valeur élevée. Plus Q est élevé donc, plus il y aura de fréquences voisines de notre fréquence centrale à être également boostées.

Allez pour être sûr que tout le monde suive, une paire d'autres exemples :

Boost de 24 dB à 2000 Hz, Q faible

 Boost de 12 dB à 200 Hz, Q élevé

 J'ai cherché sur le net des images de gros Q à gain élevé, je suis tombé sur des trucs sur le proxénétisme, j'ai pas tout compris... Passons.

 Donc comme je le disais plus haut, le principe de la Wah est de booster une fréquence tout en atténuant les autres, ce qui nous donne un schéma comme celui ci-dessous :

... où donc la valeur de fréquence est définie par la position du plateau de la Wah.

Bien entendu, ce qui est intéressant est de se dire que les trois paramètres qui vont majoritairement donner l'identité de notre Wah sont résumés ici : les fréquences mini et maxi atteintes par le plateau vont définir l'étendue de la Wah, pendant que le gain et le Q joueront sur l'intensité de l'effet. Il est d'ailleurs à noter que plusieurs Wah modernes donnent accès à certains de ces paramètres.

Voilà, en gros, comment ça marche. Pas de questions ? Pas de questions. On enchaîne.

 Wah Wilson avec réglage de Q et d'étendue

   

Un peu d'histoire sur la Wha

Avec la Fuzz, la Wah fait partie des effets les plus anciens à avoir été appliqués à notre cher instrument. Elle trouve en effet son origine dans les mains de Bradley Plunkett de Warwick/Thomas Organ fin 1966. Il est intéressant, au vu de ce que nous avons théorisé au paragraphe précédent, que l'effet fut créé « accidentellement » par cet ingénieur en faisant des tests sur le circuit d'égalisation d'un amplificateur Vox. Le son particulier généré par ces tests a attisé la curiosité de l'équipe d'ingénieurs qui a voulu le tester au travers d'instruments, tout d'abord à vent, puis la guitare. Ils ont ensuite essayé de le contrôler à l'aide de la pédale de volume issue d'un orgue... et l'histoire était en marche !

Anecdote intéressante, Vox n'a pas immédiatement vu l'intérêt de promouvoir le produit auprès des guitaristes. Ainsi, la fameuse originale Vox « Clyde Mc Coy » porte le nom...  d'un trompettiste ! Plus tard, Vox créera le nom maintenant célèbre de « Cry Baby » pour le marché américain, et le revendra à la compagnie Dunlop au début des années 80. Celle-ci deviendra la plus grande vendeuse de Wah au monde et déclinera le design inspiré de la Vox originelle en plusieurs dizaines de modèles au fil des années.

Il est à noter qu’électroniquement, le design de la Wah n'a subi aucune révolution depuis son fondement et sa structure originale axée autour d'un inducteur dont l'association avec un condensateur et un potentiomètre constituent le fameux filtre résonnant. Certains fabricants ont fait varier le schéma électronique global pour modifier légèrement la couleur de leur modèle, le rendant plus transparent ou au contraire plus granuleux. Il est aussi à noter que, à l'instar de la Fuzz, la Wah fait partie de ces effets pour lesquels des fabricants boutique/haut de gamme iront chercher des composants rares, anciens ou scrupuleusement sélectionnés, pour retrouver les caractéristiques des modèles originaux (inducteurs Fasel, Halo, potentiomètres à course spécifique, etc...)

et pour le nom, on va pas se fouler non plus, hein...

Les (rares) évolutions de la Wah sont plus à chercher du côté fonctionnel. Une des plus marquantes est sans doute celle initiée par Tel-Ray Electronics dans les années 70, qui sous sa marque Morley, commencera à commercialiser des Wah (et d'autres pédales) où le potentiomètre est remplacé par un circuit optique. Celui-ci présente l'énorme avantage de ne pas connaître l'usure et la corrosion, mais présente une réponse différente de celle des circuits de Wah classiques.

Cette même marque créera d'ailleurs en 1992 la première Wah sans switch on-off, se déclenchant uniquement par pression du pied sur le plateau. Le succès du système ne sera pas immédiat, il faudra attendre que Steve Vai l'adopte sur son modèle signature quelque temps plus tard.

Dans la catégorie des évolutions un peu différentes, l'auto-Wah est un concept intéressant, remplaçant l'expression manuelle par un plateau, par un senseur liant l'effet à la dynamique de jeu à la manière du side-chain d'un compresseur (qu'est-ce que c'est que ce truc ??? on en parlera dans un prochain article, si tu es sage.). L'auto-Wah peut s'avérer redoutable sur des phrasés en son clair ou crunch, mais peu opportun sur des fortes saturations ou l'usage rythmique de la Wah.

Enfin, on citera des expérimentations un peu plus exotiques de Zvex ou Electro Harmonix, avec des plateaux sans contact, ou sans socle... certains y trouveront un regain de créativité, d'autres trouveront cela complètement gadget...

L'embarras du chWah

Alors, quand vient le moment du choix, qu'est-ce qui peut nous orienter ? Une boussole ? Nah, c'est plus simple je te rassure.

D'abord, à moins que tu ne sois vraiment sous les ponts et que tu veuilles juste tester ce type d'effet, ou t'en servir une fois l'an sur une chanson de Noël interprétée au karaoké par ton oncle qui veut que tu en profites pour tester ton cadeau, évite les pédales en plastique genre Hellbabe ou la dernière Electro-Harmonix. Une Wah est une pédale bien plus sollicitée physiquement que les autres, piétinée et bougée pendant toute la durée de son utilisation... Une fabrication trop légère implique rapidement du jeu, des cassures... et il faut que le poids de la pédale, si elle n'est pas fixée sur un pedalboard, fasse qu'elle ne fasse pas trois fois le tour de la scène quand tu l'actionnes...

Ensuite, il te faudra faire le choix du type de boitier, de mise en action de la pédale... Encore une fois, vu l'usage particulier de ce genre de bestiole qui doit privilégier l'expressivité, chacun aura un besoin spécifique, débattement du plateau court ou long, déclenchement automatique, ressort de rappel, etc, etc...

Au niveau des options, ceux qui sont encore peu fixés sur la sonorité qu'ils cherchent peuvent lorgner du côté des modèles emplis de réglages comme la Fulltone Clyde, la Crybaby 535Q, la Rocktron Black Cat Moan ou la très bonne Custom Audio MC-404 qui présente l'avantage d'embarquer deux inducteurs différents.

Il existe beaucoup de Wah modernes, particulièrement en modèle signature, incorporant des boosts, distos et autres options... Pour être tout à fait honnête, elles sont souvent anecdotiques au niveau du rendu.

Si certains auront à cœur de suivre la voie des modèles signature ou « vintage reissue » au rapport qualité/prix parfois excellent (Dunlop Zakk Wylde) ou parfois juste risible (Dunlop Buddy Guy), on rappellera que la plupart des artistes ayant généré ces pédales ont construit leur légende sur des modèles on ne peut plus standard de Vox ou de Dunlop, modèles par ailleurs très aisément customisables étant donné la faible complexité d'un circuit de Wah.

Dunlop, ou le grand écart prix/option/utilité, 18 pédales différentes pour un effet !

Tu l'auras compris copain, mon avis en la matière (qui vaut ce qu'il vaut) est que sur la question des Wah, le mieux est l'ennemi du bien mais surtout que c'est un effet à acheter de visu, en le testant soi même. Et en évitant soigneusement les sirènes du marketing, à moins qu'il ne te soit pas dérangeant de payer cent balles de plus pour un boitier décoré, une led et trois résistances de changées.

 Sur ce, à force de parler de plateau et de ouah ouah j'ai envie de me bouffer quelques hot dogs devant la télé. Amuse-toi bien à faire couiner ta guitare ami lecteur, et à la prochaine, SUIS LA WAH DE LA SAGESSE !

Le guide de la pédale Wah Wah