Les albums de Blind Guardian sont rares et généralement peu décevants tant le style des Allemands est personnel et attrayant. At The Edge Of Time arrive néanmoins en pleine saison estivale mais n’a pourtant rien d’un disque de plage. Fantasy, orchestrations et lignes de chant en superposition restent les caractéristiques principales d’un album touffu qui marquera le retour du groupe sur les planches. Hansi Kürsch, chanteur et ex-bassiste du quartette, nous accueille.

J'imagine que les gens ont des avis différents sur At The Edge Of Time mais qu'au fond tout le monde s'accorde à dire qu'il s'écarte de A Twist In The Myth, un album très direct. At The Edge Of Time semble renouer avec vos principales forces et votre style caractéristique...
Hansi Kürsch
: Clairement, l'album précédent était très direct. Il était aussi très rugueux mais je pense que At The Edge Of Time l'est encore plus à l'exception de Sacred Worlds et Wheel Of Time qui sont des morceaux orchestraux et épiques. Wheel Of Time et ses éléments orientaux vont sûrement surprendre les gens ! D’ailleurs, il y a beaucoup d’influences de différents folklores sur ce disque. Parallèlement, d’autres titres comme Tanelorn 2, Ride into Obsession ou A Voice In The Dark, sont encore plus rugueux que sur ceux qui figurent sur A Twist In The Myth. Néanmoins, je suis à 100% d’accord avec toi sur le côté direct des choses : At The Edge Of Time l’est nettement moins. Il est même rempli de surprises. Parfois les albums sont très conceptuels et suivent un fil logique. Celui-ci, non. Il est surprenant et chaque morceau s’enchaîne avec des rebondissements. Le tracklisting ne suit pas une logique prédéfinie avec un morceau-hit puis un morceau rapide puis quelques titres de second plan suivis d’une lente montée en qualité jusqu’au dernier titre… Je pense également qu’on retrouve un peu de chacun de nos albums sur ce disque, à l’exception des deux premiers. Je ne suis pas sûr que ceux qui aiment Battalions of Fear et Follow The Blind vont trouver quelque chose à leur goût ici…

Un truc surprenant, également, est le titre du disque : At The Edge Of Time qui fait référence aux paroles de And The Story Ends. Pourquoi ce drôle de choix ?
H. K.
: Pour être honnête, je ne m’en souvenais pas… Je pensais que cela pouvait être un titre pris par Michael Moorcock mais je n’avais pas en tête que nous l’avions utilisé dans une chanson. Une fois que j’ai vérifié qu’aucune des aventures d’Elric n’avait ce nom, je pensais que la voix était libre (rires). Je trouve que le titre résume bien le contenu de la musique sur l’ensemble du disque. Je voulais au départ que le disque s’appelle Of Sacred Words And Songs Divine. Mais ce putain de groupe ne voulait pas me soutenir (rires) ! Ensuite, nous avons eu mille idées différentes. Aucune ne convenait jusqu’à ce que je trouve At The Edge Of Time. Frederik Ehmke m’a alerté comme quoi ça lui disait quelque chose dans la chanson And The Story Ends. Mais je l’ai chantée dans ma tête et je n’arrivais pas à m’en souvenir. Donc je me suis dit qu’il s’était trompé (rires). Enfin, de toute façon c’est une formule trouvée par Blind Guardian ! C’est bizarre car j’aime beaucoup ce titre. Nous ne le jouons pas souvent en live mais c’est toujours agréable.

Le power metal est nettement moins populaire aujourd’hui qu’il y a dix ans. Est-ce qu’à votre niveau, parfois, c’est dur pour vous de faire partie d’une scène peu dynamique ?
H. K.
: Sur les vingt dernières années, je pense que nous sommes à peu près le seul groupe de power metal qui a pu avoir du succès. Nightfall In Middle Earth a été notre plus gros succès à ce jour mais les albums suivants ne sont pas des échecs. Les tournées que nous avons faites en soutien de ces disques ont été bien plus grandes et couronnées de succès que celle pour Nightfall In Middle Earth. La musique est une vague et il faut la suivre… Il faut avoir la longévité et le courage nécessaire pour survivre. Au niveau mondial le power fait partie des sous genres qui marchent encore plutôt pas mal. En Allemagne, il est fréquent que les groupes de ce style gravissent en haut des charts. Le soutien de l’underground fera toujours vendre quelques disques. Malgré le fait que le marché du disque soit au plus mal, je pense vraiment que At The Edge Of Time sera notre disque qui se vendra le mieux. J’y crois vraiment car les gens ont besoin d’une musique plus réfléchie que la moyenne. Je trouve que les gens sont de plus en plus ouverts d’esprit à mesure qu’ils réalisent que beaucoup de groupes ne font que de se répéter inlassablement… J’espère qu’ils verront que ce n’est pas le cas chez nous même s’il est possible d’entendre l’héritage de nos albums passés.

Pendant un long moment tu jouais de la basse pour Blind Guardian. Pourquoi as-tu arrêté pour te concentrer uniquement sur le chant ?
H. K.
: Avec Imaginations From The Other Side, j’avais de plus en plus de mal à jouer les lignes de basse, assez basiques, et chanter de lignes vocales de plus en plus complexes. J’avais du mal à me maintenir au niveau des autres musiciens du groupe. Sur Nightfall In Middle Earth, les choses se sont encore complexifiées donc il fallait impérativement un meilleur bassiste. Je voulais une basse à la Steve Harris pour le disque et je refusais de jouer. Les autres gars pensaient que je bluffais mais je n’ai pas touché à l’instrument (rires) ! Nous avons trouvé Oliver Holzwarth qui joue cent fois mieux que moi. Toujours est-il que je me suis aperçu que je préfère chanter que de jouer d’un instrument. J’utilise la guitare acoustique pour composer. Je n’avais jamais employé une basse pour écrire la moindre composition…

Aujourd’hui est-ce que tu en joues ?
H. K.
: Non. Je pense que je pourrai m’y remettre assez vite mais je ne rattraperai jamais le retard qui me sépare des autres musiciens. Ça serait donc une perte de temps. Heureusement, je joue suffisamment bien de la guitare acoustique pour qu’elle me soit utile au moment d’écrire.

Au départ tu devais sûrement être meilleur à la basse qu’au chant, non ?
H. K.
: Oui. Je ne me considérais pas comme un chanteur au départ. En 1984, André m’a proposé de faire des screams dans son groupe car il pensait que ça rentrait dans mes cordes. J’étais guitariste à l’époque mais il y avait besoin uniquement d’un bassiste dans le groupe… Voilà comment tout a commencé.

Sur scène, on te sentait parfois mal à l’aise sans ta basse en mains (rires) ?
H. K.
: C’est vrai, en plus ! J’ai eu besoin de douze ans pour enfin m’habituer. Je ne savais pas quoi faire avec mes mains. Il faut bouger différemment sur scène et je suis loin d’être un danseur (rires). Je suis plus un narrateur et ça convenait bien à ma posture avec la basse ! En plus, personne ne se plaignait de mon bidon (rires) ! Mais tout change car le groupe tient le forme et moi-même je vais mieux aussi. Je crois que nous sommes à un niveau assez élevé en ce moment et j’ai hâte d’être en tournée !





Blind Guardian - At The Edge Of Time
Nuclear Blast
www.blind-guardian.com
Un nouvel opus pour Blind Guardian