Non, le tapping ne s'est pas perdu dans les années 80 avec la fin du règne du hard-rock. Certes, il n'est plus marginal, mais peut-être poussé à son maximum pour devenir bien plus qu'un effet : un jeu à part entière. Daniel Péroine est l'un de ses plus fervents représentants. Coup de projecteur sur cet artiste au jeu atypique.

 Tu es l'un des pionniers du tapping à huit doigts. Depuis combien de temps joues-tu de la guitare ?
Daniel Péroine : J'ai commencé à « gratouiller » à l'âge de 13 ans. J'ai eu deux ou trois cours et ensuite j'ai essayé de me débrouiller tout seul. Mais par la suite, vers l'âge de 17 ans, j'ai dû reprendre des cours et la passion est née. Et cela fait plus de vingt ans.

Quelles ont été au début tes influences principales ? Ont-elles changé depuis ?

Daniel Péroine : Mes influences du début étaient surtout les groupes heavy des années 80, comme Iron Maiden, Scorpions, Van Halen mais aussi des groupes comme Deep Purple et Led Zeppelin. Quand j'ai commencé à prendre des cours, je me suis mis à écouter du jazz-rock et de la fusion et à m'intéresser à des guitaristes comme Allan Holdsworh. L'album « Metal Fatigue » a été comme une révélation. Ce son lié, légato, était le son que je voulais obtenir. Ensuite, j'ai écouté beaucoup de guitaristes comme Satriani, Vai, Jason Becker, Vinnie Moore, Brett Garsed, T.J Helmerich... Actuellement, j'écoute des groupes prog comme Dream Theater, Opeth, Porcupine Tree, PlanetX , Trey Gunn, Gordian Knot mais aussi des groupes plus extrêmes comme Textures.

J'ai lu quelque part que tu étais diplômé du GIT. Peux-tu nous parler de tes rencontres là-bas? As-tu des anecdotes ?

Daniel Péroine : C'est vrai que j'ai passé une année incroyable où j'ai vu beaucoup de concerts et participé à des master-classes : Robben Ford, Albert Lee, Scott Henderson et Tribal Tech, Paul Gilbert, Brett Garsed, Joe Pass... J'ai eu des cours avec certains profs incroyables comme Ross Bolton, le roi de la guitare funk, Scott Henderson, T.J Helmerich et parfois certains élèves étaient plus surprenants que les profs.

Quand t'es-tu intéressé à la technique du tapping à huit doigts ?

Daniel Péroine : Etant fan d'Allan Holdsworth et de Van Halen, je commençais à travailler le légato et quelques plans tapping. Un jour, j'ai trouvé une méthode de Jennifer Batten. J'ai écouté et ça m'a tout de suite plu. Je retrouvais des similitudes avec le jeu et le son d'Allan Holdsworth. En revanche, les premiers exercices m'ont paru étranges avec des doigts de la main droite partout. Je m'y suis mis doucement et j'ai commencé à apprécier cette technique grâce au son lié et fluide que j'arrivais à obtenir.

En arrivant au GIT maîtrisais-tu déjà cette technique ? As-tu trouvé des mentors pouvant alimenter ta soif de connaissance sur le sujet ?
Daniel Péroine : Cela faisait deux ans que je pratiquais cette technique quand je suis arrivé au GIT. Je suis allé dans cette école pour travailler le tapping et je me suis aussi beaucoup intéressé à la guitare funk, entre autres. Mais il y avait aussi de nombreux cours très intéressants et dans tous les styles. J'ai eu la chance de rencontrer T.J. Helmerich, et là... grosse claque ! Je me souviens, il était à l'école tous les jeudis et tous les jeudis, j'étais en cours avec lui. Ce qui était intéressant avec T.J. c'est qu'il ne donnait pas de plan, mais il m'aidait à travailler ma main droite et ma régularité. Mais surtout, il m'a appris à phraser avec cette technique.

Es-tu à l'aise pour improviser librement avec cette technique ?
Daniel Péroine : Sur un morceaux rock, je serais plutôt à l'aise. Le genre de grille comme « Chapitre XX » me convient. Sur des morceaux plus jazz-rock ou fusion, il me faudra davantage de travail.

Sais-tu jouer en tapping polyphonique ? Plus clairement, tes deux mains sont-elles indépendantes ?

Daniel Péroine : J'ai travaillé, pendant un certain temps, le stick, un instrument bizarre à dix cordes qui se joue uniquement en tapping. Mais n'ayant plus assez de temps pour travailler, j'ai du revendre mes instruments (ce qui m'a permis de financer mon album). Je pense que j'ai perdu le peu d'indépendance que j'avais. Pour l'instant, je ne suis plus attiré par ce type de jeu, je préfère développer ma technique actuelle.

Au niveau réglages, j'imagine que l'action de tes guitares doit être assez basse ? Quel type de cordes utilises-tu ?
Daniel Péroine : L'action de ma guitare est très basse, ce qui est plus facile pour la main droite. Il y a encore six mois, j'utilisais du 8-38, très facile pour le legato mais aucune pêche pour la rythmique. Je suis revenu à 9-42. Je pense essayer prochainement du 9-46, toujours avec une action basse, et j'aimerais plus tard passer en 10-46, pour obtenir un son plus clair.

Le choix des guitares Steinberger est-il lié à cette technique ?

Daniel Péroine : Au départ, c'est pour le son. Allan Holdsworth et T.J. Helmerich jouant dessus, j'ai voulu obtenir cette même sonorité. L'avantage du manche carbone, c'est que ça ne bouge pas. C'est pour ça que je peux avoir une action basse sans avoir à la faire régler toutes les semaines.

Quel ampli utilises-tu ?
Daniel Péroine : Un Mesa Boogie, Mark IV.

Es-tu endorsé ?
Daniel Péroine : Non, pas actuellement.

Quels conseils donnerais-tu aux jeunes qui souhaiteraient aborder cette technique ?
Daniel Péroine : De commencer doucement, d'essayer d'être musical, de travailler au clic, d'introduire petit à petit la technique dans son jeu. Cette technique est avant tout une question de son. Je leurs dirais : si vous aimez les sons liés, fluides et légatos, travaillez pour vous faire plaisir et non pour épater la galerie, sinon travaillez une autre technique. Mais avant tout pensez « musique ».

Tu donnes désormais des cours au MAI. Comment s'est passé ton intronisation ? As-tu été contacté ou bien est-ce toi qui a fait la démarche ?
Daniel Péroine : En fait, je suis Nancéien de très longue date. Quand j'ai commencé à prendre des cours c'était au CMCN (Centre Musical et Créatif de Nancy). Ils ont ouvert un cursus pro, j'y suis rentré comme élève avec un certain Manu Livertout, une belle rencontre. On a bien bossé ensemble, ce qui nous a fait progresser. Ensuite, je suis rentré au GIT. A mon retour de Los Angeles, je suis rentré comme prof au CMCN. Et quand le MAI a ouvert ses portes, je les ai suivis.

Des artistes tels que Thomas Bressel, se réclamant pourtant de ton influence, font plus parler d'eux sur le net que toi. Comment expliques-tu cette anomalie ? Tu es très pris par les activités musicales ? Tu es plus un homme de terrain ou bien est-ce juste une histoire de génération ?

Daniel Péroine : Jusqu'à présent, je n'avais pas encore fait d'album. Je m'étais peu intéressé à la promo que l'on pouvait faire sur le net. Mais je tiens à remercier Thomas Bressel. Il a très souvent fait référence à moi quand il parlait de tapping, ce qui m'a déjà fait beaucoup de pub. Et il est vrai que je travaille beaucoup donc ce n'est pas toujours facile de travailler sur Internet, cela prend vite du temps.

Quels sont tes projets à venir ?
Daniel Péroine : Dans un premier temps, continuer ma promo. Trouver des concerts et des master-classes, penser à un deuxième album, à une vidéo pédagogique...


Daniel Péroine – Rénovatio
MySpace: http://www.myspace.com/danielperoine
Daniel Péroine, le tapping français