Narrow Stairs ayant atteint la première place des charts américains, il n’était guère surprenant de voir arriver un EP de chutes de studio du disque. The Open Door présente donc quatre titres et une démo pour prolonger l’expérience toute en nostalgie de Death Cab For Cutie en attendant un nouvel album. Ben Gibbard, le chanteur-guitariste et accessoirement petit ami de la belle Zooey Deschanel, a pris quelques minutes pour répondre à nos questions en attendant une nouvelle venue du gang dans nos contrées.

On ne vous avait pas vus à Paris pendant un long moment et vous êtes venus l’année dernière deux fois coup sur coup. Est-ce que vous sentez un soutien plus important de la part du public français dorénavant ?
Ben Gibbard : Tu sais il nous est parfois difficile de tout faire. Il nous faudrait être à plusieurs endroits en même temps ! Nous avons eu une petite fenêtre de temps pour revenir donner quelques concerts en Europe et nous en avons profité car ce ne sera pas forcément possible à l’avenir. Nous avons joué à Paris en juillet dernier dans une toute petite salle (ndlr : l’Alhambra) et c’était donc avec plaisir que nous sommes revenus mais cette fois-ci au Bataclan, d’autant plus que ce premier concert était de loin le meilleur que nous ayons donné dans votre capitale.

Il paraît que ton amour de la musique vient de ton père qui possédait une guitare qui te fascinait. C’est vrai ?

Ben Gibbard : Exact ! Il avait une Gibson avec des cordes en nylon et un bouquin de partitions des Beatles qu’il utilisait pour passer le temps. Après avoir pris quelques cours de piano, j’ai commencé à apprendre par moi-même à jouer de la guitare. Les vieilles chansons des Beatles ont été mon professeur en quelque sorte ! Je crois que n’importe qui peut apprendre à jouer d’un instrument mais heureusement j’avais une affinité naturelle avec la musique. Je crois que j’ai hérité des gènes de mon père. Ma mère et ma sœur, elles, ne sont pas très douées musicalement et les cours qu’elles ont suivis ont toujours été plus durs pour elles. Bien entendu, cette facilité ne veut rien dire quant à la qualité de ce que je peux faire mais au moins, intuitivement, j’avais des facilités à manier la guitare.

Tu es le compositeur principal du groupe. As-tu, de ce fait, une démarche d’écriture « standard » ?

Ben Gibbard : Pas spécialement. J’aime que chaque graine pousse à sa manière. Si je composais toutes les chansons avec une guitare acoustique, je pense qu’elles sonneraient à peu près pareil. Même chose avec le piano. Parfois je pars d’un rythme à la batterie et puis j’enregistre de la guitare ou du chant par-dessus ça et c’est parti. La guitare, la basse et le piano sont certes les instruments que j’utilise le plus mais pas uniquement et surtout j’essaie de maintenir un vrai équilibre entre les trois.

En tant que compositeur, y a-t-il une chanson de Death Cab For Cutie dont tu sois particulièrement fier ?

Ben Gibbard : Un de mes titres préférés reste encore « Company Calls Epilogue » qui figure sur notre deuxième album, We Have the Facts and We're Voting Yes. J’avais une vision très claire de la manière dont il fallait faire sonner cette chanson. Je voyais tous les différents éléments se combiner comme s’ils faisaient partie d’un film ! Cette image est un cliché mais c’est tellement vrai. Je voyais littéralement les choses en 16/9e et quand je me suis assis pour écrire, tout est venu très facilement. Je pense avoir écrit de meilleurs titres que celui-là mais il comporte tout de même un bon nombre d’éléments dont je suis fier. De plus, il figure sur le deuxième album alors que c’est un style de morceaux que je n’ai commencé à maîtriser que plus tard.

En termes de styles de compositions et même de style tout court, votre album Plans se démarque. Les paroles et l’ambiance générale sont plus nostalgiques qu’avant et il y a une atmosphère acoustique un peu effrayante qui parcourt l’ensemble du disque. Tu es d’accord avec ça ?
Ben Gibbard : Oui, j’aime ton interprétation. Beaucoup des chansons ont été écrites au piano ou aux claviers en réalité. Je venais d’acheter un piano pour la première fois de ma vie et j’en avais un peu marre de jouer de la guitare donc j’ai beaucoup écrit de cette manière. Mais j’ai aussi beaucoup joué avec une Harmony Stella. C’est une acoustique pas forcément agréable mais son aspect amateur presque pédagogique me plaisait. Je ne pouvais pas jouer avec mon style habituel dessus mais j’ai pu faire pas mal de strumming. Tu as donc vu juste ! En plus, pour les paroles, pour je ne sais quelle raison, je voulais éviter de faire des textes écrits du point de vue d’une personne de mon âge de l’époque. Je voulais écrire des paroles avec quelqu’un qui « juge » ce que je faisais alors que j’avais vingt-sept ou vingt-huit ans…

Il y a beaucoup d’éléments autobiographiques dans ce que tu écris ? Tu as l’impression de t’exposer au public ?

Ben Gibbard : Un peu… J’aime prendre des histoires qui m’arrivent à moi ou à mes proches et tordre la vérité. Je ne suis pas spécialement original là-dessus car je pense que tout le monde fait la même chose en tant que parolier. Sans mettre une bonne dose de mes propres expériences, il est assez dur d’être crédible… Mais il n’y que quelques titres qui soient une retranscription exacte de ma vie.

Peux-tu me parler de “Someday You Will Be Loved”, extrait de Plans ? J’ai toujours trouvé ce titre très émouvant dans un genre très inhabituel pour le groupe et vous ne semblez pas l’aimer car il n’est jamais joué en concert…

Ben Gibbard : Ce titre est justement une tentative de composer un morceau hyper traditionnel avec des paroles complètement fictives. C’est une valse en quelque sorte, une chanson à la Pogues sans grande surprise mais avec un fort feeling. Tu as raison, nous ne la jouons quasiment jamais. Je crois que nous avons essayé une ou deux fois. Mais à titre personnel je l’aime bien et je la joue quand je me retrouve seul assez souvent. D’ailleurs, elle sonne mieux comme cela que sur le disque à mon sens. Les arrangements sur le disque n’ont sans doute pas concrétisé les espoirs que je portais sur ce titre.

Vous sortez ces jours-ci The Open Door EP avec des chutes de Narrow Stairs, mais sais-tu où le groupe se dirige pour le prochain opus ?

Ben Gibbard : Je commence à peine à y penser. J’ai besoin de prendre un peu de recul car lorsque nous sommes en tournée, j’ai du mal à me focaliser sur la composition. Je suis arrivé à un stade de ma vie où j’ai besoin d’autre chose que la musique pour constituer mes journées (rires). Avant je pensais à la musique, jouais de la musique et écoutais de la musique tout le temps mais plus maintenant ! J’ai notamment besoin de courir pour évacuer l’énergie négative que j’accumule durant toutes ces phases d’écriture qui, qu’on le veuille ou non, ne sont pas des activités très saines.


Death Cab For Cutie – The Open Door EP
Atlantic
www.deathcabforcutie.com 
Death Cab For Cutie de retour en France