Aussi surprenant que cela puisse paraître, The Dillinger Escape Plan, groupe américain et l’un des pères fondateurs du mathcore, vient d’arriver sur un label français. Il nous livre Option Paralysis, disque certes assez traditionnel pour le style mais non dénué d’envie, de maîtrise technique et d’originalité dans sa forme. Nous avons fait le point avec Ben Weinman, le leader et gratteux du gang, en commençant par prendre des nouvelles de sa santé, suite à sa blessure au bras.

Je crois que pour Option Paralysis c’est la première fois que The Dillinger Escape Plan écrit un album d’une seule traite. C’est vrai ?
Ben Weinman : Tout à fait. D’habitude nous écrivions par-ci par-là sur la route. Nous n’avons pas été épargnés par les pépins pour Ire Works avec la perte de notre batteur mais également ma blessure à l’épaule. J’ai donc écrit dans un état d’esprit différent et en me servant souvent du piano ou des claviers ce qui n’était pas très fréquent jusque là. Nous étions dans un état d’esprit plus positif pour Option Paralysis. Le line-up est stable et le fait de l’écrire en une seule traite a amené une grande cohérence à l’ensemble du projet. Nous étions très confiants et nous nous sommes beaucoup améliorés en tant que compositeurs lors de ces sessions. Je résumerai en disant que tout a été bien plus serein que d’habitude. C’est ce qui nous a permis d’amener toutes ses influences inédites et ses nouveaux sons sans dénaturer l’esprit de The Dillinger Escape Plan.

Tu as retrouvé la gratte pour composer sur Option Paralysis ?
Ben Weinman : Oui et non. Une chanson comme « Widower » a été entièrement écrite au piano. D’ailleurs sur certaines versions de l’album le titre est connu sur le nom « Piano » (rires). Je dois passer par différents instruments pour trouver de nouvelles sonorités sans toutefois m’écarter de ce que nous sommes en tant que groupe.

Après ta blessure, tu as retrouvé toutes tes sensations comme guitariste ?

Ben Weinman : Oui. De toute façon pour moi la guitare est un outil de composition. Je n’ai jamais cherché à être le meilleur guitariste de la planète et je n’ai jamais aimé la musique des shredders. Mon seul souci était de faire partie d’un bon groupe. Je crois qu’au final ça constitue mon style car je n’ai jamais cherché à jouer de la guitare de façon traditionnelle. Je ne suis aucune règle. J’envisage seulement un objectif musical dans ma tête et je m’emploie à y arriver. La guitare reste mon outil de prédilection même si j’adore aussi le piano et les claviers. Ma blessure n’a rien changé à cela et j’ai toujours la même approche. Le seul impact de cette blessure aura été sur la diversité des instruments que j’utilise dorénavant pour écrire (rires).

Tu t’imagines faire un disque sans guitare du tout ?
Ben Weinman : Tout à fait. Il y a même des chansons sur Option Paralysis comme « Parasitic Twins » ou « Widower » où les guitares sont relativement effacées. Je pense qu’il est essentiel de pouvoir prendre n’importe quel instrument et en tirer de la bonne musique. Il y a tellement de gens qui se plaignent de ce qu’ils n’ont pas : « si seulement j’avais ce putain d’ampli… », « si seulement j’avais Pro Tools, je pourrai vraiment faire de la musique géniale », etc. J’ai toujours préféré prendre ce que j’avais sous la main et aller bosser. Je n’aurai donc jamais de problème pour faire de la musique : avec ou sans guitare.

Au niveau du packaging, The Dillinger Escape Plan essaie toujours de faire de jolies choses… Qu’aviez-vous en tête pour Option Paralysis ?
Ben Weinman : Le packaging n’a jamais été aussi que pour ce disque. Il y a des choses que nous tentons sur ce disque que je n’ai jamais vues ailleurs. Je me demande même si elles ont déjà été faites ! Nous sommes donc super fiers. Pour la première fois, les illustrations et le packaging sont au même niveau que la musique. Il y aura un box set en édition limitée qui visuellement sera très intéressant et qui fourmille de contenu également. Il y aura des goodies traditionnels comme des autocollants mais aussi des trucs plus surprenants comme une télécommande qui peut éteindre n’importe quelle télévision (rires) ! Je crois que nous sommes, dans notre monde moderne, bien trop « attaqués » par des stimuli visuels : plus personne ne sait du coup ce qui a vraiment de l’importance. Or, nous avons émergé dans un environnement qui ne connaissait ni YouTube ni MySpace et nous tenions à le rappeler à notre manière… Il faut que les gens sortent de chez eux et qu’ils vivent les choses par eux-mêmes et non pas par procuration. YouTube et MySpace sont des outils mais pas des fins en soi. Le CD possède sinon un titre bonus qu’on ne peut entendre que dans un lecteur vinyle (rires). C’est assez fou ! Il faut faire des trucs originaux de nos jours pour se faire remarquer, autrement on meurt.

Généralement The Dillinger Escape Plan invite toujours un ou deux musiciens sur ses albums. Est-ce également le cas sur Option Paralysis ?
Ben Weinman : Oui, Mike Garson est venu jouer sur le disque. Cela fait plus de quarante ans qu’il est un professionnel du piano ! Il a joué avec David Bowie ou Nine Inch Nails et a fait partie de la scène new-yorkaise de jazz d’avant-garde. C’était intéressant d’entendre sa perception de notre musique et de voir ce qu’il proposait pour l’enrichir.

Maintenant que vous faites partie d’un label français, avez-vous prévu de venir faire des concerts encore plus souvent chez nous ?
Ben Weinman : Nous sommes un des seuls groupes américains que je connaisse qui ait déjà fait des tournées françaises et pas seulement une date à Paris. Je me rappelle déjà avoir fait une dizaine de dates rien qu’en France. Ce pays nous a acceptés dès nos débuts. L’Europe a toujours été difficile pour nous car chaque pays vit plus ou moins indépendamment des autres. L’Allemagne en particulier a été dure car nous n’appartenions à aucune scène connue ou déterminée. Le metal, le prog et le punk devaient à chaque fois être joués d’une certaine manière et nous ne rentrions pas dans ces catégories. La France a toujours été ouverte à l’expérimentation et la nôtre en particulier. Nous sommes contents de venir jouer chez vous à chaque fois et nous avons déjà hâte de revenir (rires) !

Pour finir, une question à laquelle tu as dû répondre souvent ces derniers temps : qu’as-tu pensé du film Public Enemies ?

Ben Weinman : (rires) Je l’ai vu dans l’avion en venant pour la promo européenne du disque. Je l’ai trouvé très bon. Bien entendu notre nom The Dillinger Escape Plan s’inspire du voleur John Dillinger qui a pris la fuite brillamment à plusieurs reprises. Mais il ne faut pas voir là dedans une quelconque influence, un message ou quoi que ce soit. C’est cool qu’un film se soit fait car, ainsi, les gens comprennent d’où vient le nom de notre groupe (rires). Personnellement j’adore Johnny Depp. Que le film soit bon ou non, je le trouve toujours au top.

Pas trop déçus de ne pas avoir été présents sur la bande originale du film (rires) ?

Ben Weinman : (rires) C’est vrai que ça aurait dur vu le style et la période à laquelle se déroulent les faits (rires).


The Dillinger Escape Plan – Option Paralysis
Season Of Mist
www.ireworks.net 
The Dillinger Escape Plan, le mathcore arrive en France !