Lors d’un très relatif temps mort avec Slipknot, Joey Jordison profite de l’année 2013 pour remplacer définitivement les Murderdolls dans son agenda. Ainsi est né Scar The Martyr, un combo dont les pérégrinations artistiques révèlent encore des facettes du talent du batteur de Des Moines. A peine avons-nous découvert six morceaux du premier album des américains que nous nous retrouvons en face du maître des fûts… Interview.

 Quand as-tu décidé qu’il te fallait un nouveau projet musical ?
Joey Jordison : Je suis rentré en studio pour faire des démos de quelques idées que j’avais en tête. Je n’avais pas réalisé tout de suite la puissance des trucs que je venais de trouver. Je bossais les guitares et les basses et rapidement j’avais des chansons abouties. Je les ai malaxées pour les faire partir dans plein de directions différentes. J’avais du temps libre donc je m’y suis mis à fond. Au bout d’un moment j’ai coincé car j’avais besoin d’un chanteur.

C’est là que deux amis à toi t’ont recommandé Henry Derek ?

J. J. : Tout à fait, tu es bien renseigné ! J’ai écouté ce qu’il faisait et je lui ai envoyé cinq morceaux. Je ne pensais pas avoir de retour avant deux semaines et pourtant il me les a travaillés en seulement deux ou trois jours. J’ai été bluffé par sa capacité à bosser vite et bien. En plus, pour ne rien gâcher, c’était parfait. Il avait vraiment capté le truc. C’est rare que ça se passe aussi bien. J’avais bossé avec deux personnes avant qui étaient bonnes aussi mais le style ne collait pas aussi bien. J’ai tout de suite booké le studio, mis le matos en place et nous étions partis sur ce premier album.

Il y avait donc toi et Henry et c’est seulement après que tout le reste du groupe est arrivé dans l’aventure ?
J. J. : Voilà. Je faisais la batterie puis les parties de guitare rythmique puis la basse. Ensuite Henry a joué de la guitare et de la basse sur trois morceaux. Mais les cerises sur le gâteau, comme j’aime à les appeler, proviennent de Kris Norris (Darkest Hour), Jed Simon (Strapping Young Lad) et Chris Vrenna (Nine Inch Nails, Marilyn Manson, Tweaker). Le line-up est incroyable et toutes ces légendes ont joué le jeu au sein de Scar The Martyr. J’adore ! Le disque est bien meilleur que ce à quoi je m’attendais même si je ne doutais pas du tout de la qualité de ces zicos. Je les connais tous bien sauf Kris Norris qui m’était étranger jusqu’alors.

Scar The Martyr aurait pu être un projet à deux ou est-ce que le reste du line-up était indispensable ?

J. J. : La structure de l’album a été conçue à deux mais c’est un vrai album de groupe. Toutes les nuances et les « soundscapes » viennent directement des musiciens concernés. Les soli sont dingues et les textures sonores de Chris m’ont scotché.

Scar The Martyr montre un nouvel aspect de tes influences au niveau de ton jeu de guitare et de batterie. Ses influences se sont-elles accumulées au fil des années ou est-ce simplement un nouvel amour de ta part ?
J. J. : Je voulais faire un truc différent mais je ne savais pas quoi jusqu’à ce que naisse Scar The Martyr. J’avais des embryons d’idées qui traînaient un peu partout. Mais c’est vraiment la rencontre avec Henry qui a donné un aspect réel à toutes ces idées et cette volonté d’explorer de nouveaux sons.

Ton approche de la guitare et de la batterie diffère-t-elle au sein de Scar The Martyr par rapport à tes autres projets ?
J. J. : C’est principalement la guitare qui change car elle est bien plus « sérieuse ». Je voulais vraiment qu’on sente une symbiose rythmique entre la guitare et la batterie. Du coup, rien qu’à cause de cela, certains riffs sonnent de manière unique. J’aime bien l’idée que tous les instruments rebondissent les uns sur les autres dans ce groupe. C’est parfois dur à faire lorsque je suis tout seul au départ mais je crois que j’ai la faculté de ne faire qu’un avec mon kit de batterie et là tout se passe très bien (rires). J’aime bien enregistrer tout seul. Sur All Hope Is Gone j’avais fait ça aussi.

Le résultat est assez différent… Je trouve que la batterie a un ton plus « tranquille » presque un calme serein très rock ‘n’ roll dans le fond…

J. J. : 100% d’accord. C’est un style nouveau pour moi. Il n’y a pas autant de chaos dans ces parties. Il y a tout de même pas mal de parties de doubles pédales mais malheureusement elles ne figurent pas dans les morceaux que tu as pu entendre pour l’instant. Scar The Martyr a un côté post punk mais aussi un côté très brut et agressif que vous allez découvrir dans les semaines à venir. Scar The Martyr compile en tout cas tous les « tricks » que vous êtes en droit d’attendre de ma part, avec en plus des trucs plus directs. Je ressens nettement mieux la batterie sur ce disque que sur ceux de Slipknot.

C'est sans doute un peu plus basique...
J. J. : Certainement. C'est très brut. Si on mélangeait Phil Rudd et Pete Sandoval, je pense qu'on obtiendrait un résultat assez proche de ce que je propose sur cet album. Phil est un de mes batteurs préférés car il est impossible à prendre en défaut. C'est le gars le plus régulier du monde. Pete est une de mes idoles pour la folie qu'il dans sa musique. Mais je pense que je rajoute aussi des trucs à moi. Ces deux mecs sont des influences fortes mais il y a encore des trucs en plus dans la musique de Scar The Martyr. Avec Slipknot, je suis très «bordélique» car c'est la marque de fabrique de Slipknot. Avec Scar The Martyr, je dois m'appliquer à respecter un groove et à faire aller de l'avant les compositions. Je suis sans doute davantage le moteur de ce qui se passe.

Il y a pas mal de soundscapes sur Scar The Martyr et ce sentiment est aussi renforcé par le fait que les chansons soient un peu plus longues que ce à quoi tu nous as habitués jusqu'à présent. Cela donne lieu des ambiances très dark...
J. J. : C'est amusant que tu mentionnes cela car souvent on pourrait croire que les chansons ne durent que trois minutes trente... alors que non (rires) ! Il y a le « cœur » de chaque titre et au milieu il y a toujours un break ou une surprise qui fait que l'on part sur complètement autre chose. On entend cela aussi un peu dans Slipknot car j'ai toujours aimé cette idée où tout est déstructuré. Je ne sais pas d'où cela vient. J'aime aussi les titres courts et directs comme My Retribution ou Cruel Ocean. Je n'écris des titres courts que lorsque j'arrive à tout dire dans ce format. Parfois, les chansons demandent plus. Je me rappelle des albums comme ...And Justice For All où les morceaux duraient genre neuf minutes ! Il y aussi Last Night On Earth que tu n'as sûrement pas entendu encore et qui est très longue et très bizarre, comme des morceaux psychés de rock progressif. Il y a une sacrée variété !



Scar The Martyr – Scar The Martyr
Roadrunner
www.scarthemartyr.com
Joey Jordison et Scar The Martyr