The Allman Brothers, The Grateful Dead, Gov't Mule : voici quelques-uns des noms qui figurent sur le CV de Warren Haynes. Ce guitariste passé maître dans les sonorités sudistes nous revient en 2011 avec un album solo qui le voit s'éloigner de son rock traditionnel pour se pencher sur ses premiers amours : la soul et le blues. Plein d'assurance et d'inspiration, la tête pensante de Gov't Mule frappe fort et signe un disque à la fois rétro et moderne pour le plus grand bonheur de ses fans. Rencontre.

As-tu des souvenirs particuliers, musicaux ou non, liés à Paris ?
Warren Haynes : Le jour de mon quarante-cinquième anniversaire, j'ai joué pour la première fois avec Gov't Mule ici. C'est un bon souvenir. Sinon, je ne suis venu que très peu... Quatre fois en tout, je crois, et jamais en vacances (rires). C'est dommage d'ailleurs car j'aimerais vraiment pouvoir passer deux semaines ici sans être tenu de jouer de la musique. Toutefois, ça reste agréable de pouvoir visiter des villes tout en bossant.

Et tu reviendras d'ailleurs en juillet, à l'Olympia ! Parlons de Man In Motion. Comment as-tu choisi les gens qui jouent avec toi sur cet album solo ?
W. H. : J'ai conçu une liste de gens que je voulais entendre sur cet album. Heureusement, tout le monde était disponible ! Nous sommes tous des amis, à commencer par George Porter Jr. de The Meters à la basse. Il y a aussi Ivan Neville aux claviers et son accolyte Raymond Webber à la batterie. Je savais également que je voulais Ruthie Foster aux choeurs et le saxophoniste Ron Holloway. Le dernier élément à rejoindre ce beau monde fut Ian McLagan de The Faces aux claviers. Mon co-producteur Gordie m'a appelé juste avant le début des sessions à Austin en me disant que Ian habitait dans le coin et que ça pouvait être cool de l'avoir avec nous. Il fallait simplement valider ça avec le claviériste que nous avions déjà dans le groupe ! En fait, je me suis vite aperçu que Ivan connaissait Ian, car je crois qu'ils ont joué un truc pour Keith Richards, c'était plus simple. Pour ma part, Ian était le seul gars que je ne connaissais pas avant d'être en studio. C'était un super type, en tout cas.

Le fait de pouvoir compter sur de nombreux artistes de talent prêts à vous suivre dans de nouveaux projets est un des privilèges d'être un musicien reconnu et respecté comme toi...
W. H. : C'est vrai. Mais tu sais la plupart du temps il s'agit de gens que j'ai déjà côtoyés par le passé dans différents projets musicaux. Mais c'est vrai que c'est cool de pouvoir décrocher son téléphone et de sélectionner les bonnes personnes pour ce que je souhaite faire à un moment donné.

Tu es très actif avec entre autres Gov't Mule et les Allman Brothers. Dans quel état d'esprit arrives-tu lorsque tu commences à t'atteler à un album solo, censé être ton disque le plus personnel ?
W. H. : C'est une question difficile car je suis très reconnaissant de pouvoir faire autant de choses différentes. Gov't Mule aura toujours une place à part à mes yeux car nous sommes partis de rien et nous avons construit un projet très intéressant. Ma priorité va plutôt à Gov't Mule par rapport à mes albums solo. Man In Motion a ainsi été conçu de manière totalement différente à un album de Gov't Mule car je voulais que les gens entendent un autre aspect de mon jeu, de ma personnalité et de mes influences. Est-ce que c'est plus ou moins personnel que Gov't Mule ? Difficile à dire car dans les deux cas je suis le leader et principal compositeur... Ce qui est sûr : Man In Motion retourne plus loin dans mes racines et exploite mon amour de la soul et du blues. J'ai commencé à chanter à sept ans sur des trucs comme James Brown, The Temptations ou Otis Redding. Je ne suis tombé dans le rock que des années plus tard. Et puis les grands guitaristes de blues – tous les mecs qui ont King pour nom de famille (rires) – ont également fait beaucoup pour moi. J'ai voulu mélanger tout ça et vous le présenter sur Man In Motion.



Ce que le grand public entend par « soul » a quelque peu changé avec le temps... Y a-t-il tout de même des artistes de cette scène que tu aimes ?
W. H. : A vrai dire, je suis un peu comme toi : je ne sais plus vraiment ce que ce terme englobe ! En tout cas, j'apprécie énormément Ray LaMontagne qui est un ami en plus d'être un musicien de grand talent. J'aime aussi Sharon Jones And The Dap-Kings bien que je ne sois pas un grand connaisseur. Je ne suis pas très au courant de la nouvelle scène de soul mais je reste très attaché aux grands classiques. Pour ma part, j'ai simplement essayé de rendre hommage à la grande époque avec des compositions inédites et sans verser dans la surenchère de reprises comme c'est parfois le cas...

Il y en a tout de même une sur le disque...
W. H. : Effectivement. Il y a Everyday Is A Holiday en plein milieu du disque. Cela aurait été facile de reprendre tous mes morceaux préférés mais j'étais davantage intéressé par l'écriture de chansons qui portent le flambeau des grands noms de la soul.

Ton jeu de guitare illumine toujours les albums auxquels tu participes. Est-ce que selon toi tes fans vont découvrir sur Man In Motion des aspects de ton jeu qu'ils ne connaissaient pas encore ?

W. H. : Oui. Je ne voulais pas utiliser les mêmes sons que chez les Allman Brothers ou Gov't Mule. Je voulais prendre des sonorités « pré-rock » et très claires. Cela passe donc en grande partie par des guitares hollow-body. Sur le jeu pur et dur, c'était évidemment une bonne opportunité pour jouer différemment. J'ai énormément apprécié cela. Ce n'est pas totalement inédit pour moi mais presque car il n'y a quasiment aucun enregistrement studio où l'on m'entend jouer de la sorte. J'espère que les gens apprécieront les efforts consentis et qu'il y aura plein de monde à l'Olympia !




Warren Haynes – Man In Motion
Stax
www.warrenhaynes.com 
Warren Haynes, la soul au bout des doigts