Annoncées en grande pompe au Winter Namm 2014 pour les 40 ans de la marque, les améliorations apportées à la jeune série 800 ont également impacté le format phare de la marque Taylor, le Grand Auditorium. Avec l'arrivée du luthier Andy Powers dans l'équipe Taylor vers 2012, cette série 800 marque un réel tournant dans l'histoire de la marque et, même si les fondamentaux Taylor sont toujours dominants, il n'en reste pas moins qu'un bon nombre d'évolutions, tant dans la lutherie que dans le système de préampli, font de la 800 une série à part (Il faut noter également les nouvelles cordes spéciales Elixir HD pour les formats GC et GA).

La lutherie
L’objectif d’Andy Powers a été de perfectionner les qualités inhérentes à chaque format de corps pour en améliorer au mieux leur potentiel.
Barrage , colle protéique, épaisseur de finition et esthétique générale, tout a été revu dans ces domaines. Je vais éviter de me répéter et vous invite à en lire les détails dans le test de la 818e.

Le format Grand Auditorium
Considéré souvent à tort comme une OM, le format GA en épouse les courbes mais pas toutes les dimensions. Comme vous pouvez le voir dans le tableau ci-dessous, ce format se positionne entre une OM et une Dreadgnouht de type Martin.
D’ailleurs, le format Dreadnought de chez Taylor a exactement les mêmes dimensions que le GA. La forme et les courbes changent mais pas le volume de caisse.

Les bois, le quatuor gagnant
Le classique quatuor de la guitare folk est ici représenté dans ses bois : épicéa de sitka pour la table, un dos et des éclisses en palissandre indien, un manche en acajou et de l’ébène pour la touche, le chevalet et la plaque de tête et du truss-rod.

La table présente de jolies moirures. Les veines sont assez resserrées à la jointure et un peu plus espacées à l’extérieur.



Côté marqueterie, la série 800 reste sobre mais élégante avec son binding en érable, sa plaque de protection en palissandre, une rosace en abalone bordée de palissandre et d’érable. Les filets larges en palissandre de la rosace se retrouvent également en bord de table. Un filet de dos en érable vient se marier avec l’érable du bord de caisse et du talon.
Encore de l’érable pour le tour de la touche et de la tête.  Une belle cohérence dans les tons et les couleurs. Les repères de touche en nacre sont fins mais assez voyants.

Le constat sur la qualité de fabrication de l’ensemble de l’instrument est sans appel, c’est parfait ! Nous avons là la perfection industrielle à l’état pur, froid peut être pour certains mais de la belle ouvrage.

Le confort
Si on peut accorder une palme d’or à Taylor, c’est bien évidemment celle du confort de leur manche. Ici aucune évolution, nous restons sur le standard Taylor avec un profil en C fin et à 44,5 mm au sillet de tête. Rien à dire, un régal à jouer.
Ce type de manche conviendra un peu mieux aux adeptes du jeu aux doigts qu’au strummers.



Même impression avec le format de la caisse, très confortable. Par rapport aux autres séries, le modèle Grand Auditorium de la série 800 gagne en masse, pour arriver à un poids total de 2,13 Kg.
Les mécaniques Taylor Tuners Nickel au ratio de 18 :1 sont un régal pour l’accordage.

Le son
Le format Grand Auditorium de chez Taylor est devenu un standard de la guitare folk et le modèle 814ce ne déroge pas à la règle. Avec les quatre essences proposées pour la table, dos/éclisses, manche,  touche et chevalet, nous sommes en présence d’un standard folk, digne de ce que l’on peut attendre d’un modèle haut de gamme dans le domaine.

Elle répond au doigt et à l’œil
Dotée d’une très bonne percussion, cette guitare est impressionnante dans son côté « responsive » et son rebond. Elle réagit au doigt et à l’œil avec précision et avec générosité. C’est son gros point fort !

Sa puissance est bonne sans être exceptionnelle. Le sustain est long avec une pointe qui décroit d’abord rapidement puis lentement. La richesse harmonique est assez neutre, ce qui la rend très précise mais peu chaleureuse.

Tout comme le modèle 818e testé précédemment (lien G.com), la 814ce est pourvue de basses très profondes à vide, avec cet effet « boomy » très présent. En accord, les basses ne dominent pas et l’équilibre général de l’instrument et préservé. Les médiums sont percutantes sans être très boisées quant aux aiguës, elles sont brillantes et incisives.

Précise sur tout le manche, elle conviendra à des styles très variés et son punch fera le bonheur des guitaristes qui aiment « rentrer » dans l’instrument. Très sensible, elle conviendra également à un finger picking ou flat picking léger.

Des cordes toutes spéciales pour la Grand Auditorium
En partenariat avec Taylor, Elixir a mis au point un nouveau tirant pour les modèles Grand Concert et Grand Auditorium, HD Light (Médium = .013 .017, nouveau tirant pour le G = .025 et issues du tirant Light = .032 .042 .053). A utiliser pour les initiés car conséquent, ce type de tirant favorise le claquant cristallin des aiguës et  le mordant incisif des hauts mediums. Ce nouveau tirant est parfait pour la 814ce.

Le son Taylor
J’aimerais m’arrêter sur le sujet souvent abordé sur les forums, celui du côté « froid » et « moderne » du son Taylor. Je prendrais pour exemple le post « Taylor 814ce et Martin HD28 ». http://www.guitariste.com/forums/guitare,taylor-814ce-et-martin-hd28,253804.html

Il est intéressant de constater que ce post ait rapidement glissé vers une comparaison frontale entre ces deux instruments, puis des deux marques. Difficile de comparer deux univers sonores complètement différents. On aime l’un ou l’autre mais dire que l’un est mieux que l’autre serait une erreur de jugement.

Une Martin, et surtout une HD28 (modèle qui marqua, en 1976, le retour aux sources des caractéristiques  « prewar »  de la firme américaine en proie à une concurrence avec ses propres instruments vintage),  a un son très typé, chaud et boisé. Taylor n’a jamais souhaité, comme tant de marques, surfer sur la vague « Martin » mais bien au contraire, elle a souhaité apporter aux sonorités folks un renouveau, un univers à part et s’imposer comme un concurrent sérieux et pérenne, tant dans le son que dans le design avec, en plus, la mise en place d’un système de pré-amplification innovant.

Au lieu de « froid » ou « sans âme », je dirais plutôt que les Taylor ont un son plus neutre que les Martin. L’allégorie d’un vin vieilli en fût de chêne (Martin) et l’autre non (Taylor), peut résumer l’idée.
Le terme « froid » peut être perçu comme un défaut qualitatif alors qu’il est un critère d’appréciation. Certains musiciens apprécient un instrument neutre car plus facile pour en maîtriser les nuances sonores.
Le qualificatif  « moderne » correspond, quant à lui, parfaitement aux guitares Taylor.

J’aimerais répondre ensuite à cette phrase issue du même post : « Avoir une guitare au quotidien est bien différent que de lire tel ou tel test dans un magazine spécialisé. »

J’ai en ma possession plusieurs modèles que je joue au quotidien (Martin D-28, Dreadnought Boucher, Jumbo Quéguiner) et qui me servent de référents quand je dois réaliser les nombreux tests que je publie sur Guitariste.com, LaGuitare.com mais aussi dans Guitarist Acoustic.
Je suis comme tous les guitaristes, il y a des guitares que j’aime plus que d’autres mais mon travail n’est pas de vous livrer mes goûts sur tel ou tel instrument, il est de tenter au mieux de juger des qualités de fabrication (lutherie et finition) et des qualités acoustiques (puissance, équilibre, sustain, percussion, richesse harmonique) pour que vous puissiez vous faire un premier avis.

Ecoutez le son de la vidéo que j’ai souhaité sans aucun effet et vous aurez une idée assez objective des performances de l’instrument. 

Son electro


          
Comme je l’ai déjà indiqué dans le test de la 818e, « la version 2 de l’ « Expression System »  développée par  l’ingénieur de chez Taylor, David Hosler, change radicalement la façon de placer les transducteurs piézo-électriques au niveau du chevalet.  Exit donc le capteur piezo placé de façon horizontale sous le sillet du chevalet et place à trois capteurs, toujours piezo mais verticaux, qui récupèrent les vibrations induites par les cordes au chevalet et à la table ».

Le résultat est plus probant sur la 814ce que sur la 818e  mais il sera nécessaire d’appliquer, dans tous les cas, une égalisation si vous souhaitez tirer le meilleur de ce système.
Pour la vidéo, j’avais, dans un premier temps, réalisé une prise de son électro directement de la guitare dans l’enregistreur numérique mais franchement, sans traitement d’égalisation, le résultat ne vaut pas la peine d’être diffusé et ne met objectivement pas en valeur, ni l’instrument, ni le système, qui une fois branché dans une console ou un ampli révèle ses vrais qualités. Je vous soumettrai bientôt une vidéo avec le système branché dans un ampli électro-acoustique, car dans ce cas, l’Expression System s’avère très performant. 

Conclusion
Avec ce nouveau modèle Grand Auditorium qui s’intègre dans la série 800 et qui bénéficie donc de toutes ses évolutions, Taylor confirme sa volonté d’évoluer et de se démarquer dans l’acoustique folk.
Irréprochable dans sa lutherie et sa finition, vous êtes assurés d’avoir entre les mains une guitare haut de gamme.
 
Les amoureux du son traditionnel folk de type Martin, habitués également au manche de moins de 44 mm au sillet de tête au profil plus rond, ne s’y retrouveront sûrement pas. Pour tous les autres guitaristes acoustiques, la 814ce se présente à eux comme une excellente folk au son neutre mais néanmoins puissante, équilibrée avec une forte dynamique et qui conviendra à tous les styles de jeux.

Dans le temps, on peut supposer que le côté neutre du son évoluera vers un timbre plus boisé, mais on ne peut que supposer. Rendez-vous dans 5 ou 10 ans avec une 814ce !

Prix public : 3629 euros

Taylor 814ce