Dans la société actuelle, il y a des jobs de merde, d’une part, et des métiers plus que gratifiants, d’autre part. Ozzy Osbourne, star de The Osbournes et accessoirement ex-chanteur de Black Sabbath, prend un soin bien particulier à employer les deux lors de ses tournées. En effet, le « responsable serviette » en charge d’essuyer les enceintes de retour et les divers câbles électriques aspergés par projections d’eau illustre bien le concept de job de merde tant la solitude désenchantée pouvait se lire sur le visage du malheureux préposé. A l’opposé, Gus G., nouveau guitariste de l’Ozzy Band et remplaçant du mythique Zakk Wylde représente une belle success story, lui qui officiait jusqu’à présent dans des groupes de hard rock indignes de son talent. Mais avant de parler de tout ça, voyons ce que Korn, la première partie de luxe, avait dans le ventre…

L’attitude des américains tranche radicalement avec la timidité et la réserve affichées par 99% des groupes d’ouverture. Korn prend la même attitude que si tout Bercy s’était déplacé pour lui et cette sérénité confiante s’avère payante. Dès 4U, Jonathan Davis, Munky et les autres ont le public en poche. Il faut dire que le chant du frontman est exceptionnel ce soir et reproduit chaque nuance de titres vocalement complexes comme Oildale (Leave Me Alone) ou Blind. Au niveau de la sélection de morceaux, là aussi, en considérant la durée réduite, c’est un sans faute même si le solo de basse/batterie aurait pu être troqué contre Thoughtless ou une chanson du dernier album sans que personne n’y trouve à redire. Néanmoins, au moment où on l’attendait le moins, Korn aura livré sa meilleure prestation parisienne depuis bien longtemps.

Au moment où la voix d’Ozzy Osbourne annonce le début de son set, on se rend compte que Bercy est ce soir loin d’être complet. Scène fortement avancée, gradins supérieurs et arrières réduits en capacité, fosse remplie aux deux-tiers : seules dix mille personnes, maximum, sont venues saluer le retour du mari de Sharon dans notre capitale après une décennie et demie d’absence. Dommage. Car le bonhomme va se donner du mal pour faire oublier ce délaissement.

Avec des titres imparables, tout d’abord. Mr. Crowley, Bark at the Moon, Shot in the Dark, le méconnu Killer Of Giants, Mama I'm Coming Home (malheureusement joué à la guitare électrique), Crazy Train et le meilleur de Black Sabbath. Avec beaucoup d’eau, ensuite. Apparemment à l’aise dans un contexte diluvien, Ozzy aime mouiller sa crinière. Et cet amour semble très communicatif puisqu’il n’hésite pas à faire pleuvoir des seaux d’eau sur les premiers rangs pour mieux les tremper avec sa lance de pompier dès qu’il n’a plus de chant à assurer. Avec des musiciens de référence, enfin. Gus G. en tête. Impérial dans les soli, il s’adapte extrêmement bien aux compositions de son patron et n’aura pas à vivre longtemps avec les comparaisons incessantes à Zakk Wylde.



Seuls les titres de Black Sabbath manquent cruellement de poids, malgré le soutien du claviériste Olivier Wakeman qui endosse sa six-cordes pour ces occasions. Iron Man, War Pigs et Paranoid paraissent interprétées par un groupe de punk et il ne se dégage rien de spécial de ces versions où le toucher si spécial d’Iommi fait irrémédiablement défaut. Et, si musicalement on ne peut pas reprocher grand-chose d’autre à ce concert, l’attitude d’Ozzy entre les morceaux a de quoi énerver par sa répétitivité. Entre ses requêtes de lui demander un rappel, ses « oyé-oyé-oyééé » de supporter de foot, ses « hey ! hey ! » machinaux, ses « I love you all » et son obsession maladive pour que le public se lâche, il tourne comme un disque rayé et, bien qu’il fasse sourire initialement, au bout de deux heures de concert, il ressemble à s’y méprendre à un vieillard gâteux… Sa silhouette voûtée et mal articulée tout comme ses déplacements hasardeux confirment ce léger sentiment de pitié. Mais, et c’est là l’essentiel, dès qu’il se retrouve derrière son micro, une seconde jeunesse semble l’envahir et nous donne l’impression qu’il est éternel. Y aurait-il de l’eau bénite dans ses seaux magiques ?

Setlist Korn :

4 U
Right Now
Here to Stay
Oildale (Leave Me Alone)
Falling Away From Me
Bass & Drum Solo
Freak on a Leash
Blind
Got the Life

Setlist Ozzy Osbourne :

Bark at the Moon
Let Me Hear You Scream
Mr. Crowley
I Don't Know
Fairies Wear Boots
Suicide Solution
War Pigs
Shot in the Dark
Solo guitar / batterie + Rat Salad
Iron Man
Killer of Giants
I Don't Want to Change the World
Crazy Train
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Mama, I'm Coming Home
Paranoid
Flying High Again
Into the Void 
Ozzy Osbourne – Live à Paris Bercy le 20 septembre