Dave Weiner semble être né sous une bonne étoile : il a du talent, une bouille bien sympathique et suffisamment de culot pour avoir pu devenir rapidement l’accompagnateur de Steve Vai sur la tournée du G3 . Il a récemment sorti son premier album solo «Shove the sun aside», disponible uniquement sur son site officiel. Tranches de vie d’un guitar-hero.

Tu es devenu très tôt le guitariste de Steve Vai. Comment est-ce arrivé ?

Cette rencontre a été le début de ma carrière professionnel. Quand j’ai quitté le GIT (Guitar Institute of Technology), je voulais me faire une place dans une société liée au business de la musique. J’avais 22 ans à l’époque (Dave vient de fêter ses 28 ans, ndr). Malheureusement, c’est un secteur de contacts, où il faut connaître du monde. J’étais prêt à bosser dur et j’ai alors cherché. J’ai répondu à une petite annonce de job et il se trouve qu’elle avait été passée par la manager de Steve (Ruta Sepetys). Elle est étonnante, elle connaît tout du milieu.

Et ensuite ?

Lorsque j’étais au GIT, des amis m’ont aidé à enregistrer une démo. Ca faisait partie de leur formation liée au mixage. Steve l’a su au bout d’un moment et m’a demandé de lui faire écouter. Il a aimé mon jeu. Il allait partir en tournée et m’a proposé de venir avec lui.

Impressionnant ! Ca ressemble à un conte de fée...

En fait, je suis sorti de l’école pour jouer directement dans le groupe de Steve Vai. J’ai eu la chance d’être au bon endroit au bon moment !

Tu as donc joué ce qui te plaisait ?

Oui, et pour ça il faut avoir un but. Les musiciens ne savent pas toujours dans quelle direction aller. Ils hésitent à jouer instrumental, à chanter, jouer en groupe ou en solo. Ils sont influencés parce qu’ils pensent avoir du succès et ce qui passe à MTV. Mieux vaut jouer ce qu’on a en soi. Tu ne seras jamais heureux tant que tu ne prendras pas les décisions qui correspondent à ta personnalité. Mon conseil ? Jouez la musique que vous voulez, qu’elle soit commercialement acceptée ou non. Restez sur ce chemin. C’est difficile, il faut être un peu unique pour réussir. Pour moi, beaucoup de groupes sonnent pareil. Il nous faut quelque chose de nouveau. On a eu le grunge à une époque, il faut un changement comparable.




D’où pourrait venir ce renouveau ?

La maîtrise de l’instrument. Quand le grunge est arrivé, les guitar-heros ont été jetés par les fenêtres. De plus en plus, les gens veulent entendre des titres mieux réalisés, avoir un intérêt et des gens qui jouent bien. Il reste des choses à inventer.

Tu as dû travaillé ton style pour accompagner Steve Vai ?

Sa façon de jouer est vraiment unique. Ses solos sont très difficiles, et jouer ses rythmes représente parfois un vrai défi. Tu dois faire attention à chaque détail, et cela m’a aidé à progresser.

Il te donne une place pour l’improvisation sur scène ?

Les sets sont assez courts donc on manque souvent de temps pour faire de la véritable impro. En général, pour les concerts les plus longs, j’ai la place pour deux solos où je peux faire ce que je veux. Improviser est de toute façon quelque chose d’extraordinaire. Trop de guitaristes s’entraînent sur des gammes et ne travaillent pas le fait de les transposer en musique. Ils comptent sur la vitesse plutôt qu’une jolie mélodie. Le meilleur remède à cela, c’est de prendre son séquenceur, faire tourner une boucle d’accompagnement, et improviser dessus. Je fais ça tous les jours. C’est bien de savoir jouer une gamme majeure, mais il faut savoir la jouer à sa façon pour en faire quelque chose de différent.

Les guitaristes se fâchent parfois sur la façon de voir un accord et choisir les notes. Les uns ne jurent que par les modes, d’autres cherchent à tout prix une tonalité, et ceux qui comptent les points sont perdus. Qu’en penses-tu ?

C’est bien de s’intéresser à la théorie, mais il faut jouer de la musique à la fin. On peut chercher à savoir quelle note ou quelle gamme mettre sur tel accord en fonction du contexte. En fait, il y a des milliers de possibilités. C’est bien d’apprendre comment sonnent les modes, la gamme majeure, mais il faut savoir ensuite se libérer de tout ça et prendre du recul.
 

 

Tu donnes des cours ?

Oui, lorsque j’en ai le temps.

Comment as-tu enregistré ton album ?

J’ai enregistré la batterie dans le studio de Steve Vai, mais j’ai tenu à faire le reste moi-même, dans mon propre studio. Je voulais prendre mon temps et apprendre à faire un disque. Ce n’est vraiment pas facile. Cela m’a pris trois ans à cause des tournées. Mais j’ai dû tout apprendre, ce qui m’a permis de peaufiner à ma façon. J’ai une cabine d’isolation et j’enregistre sur Pro Tools. Mon matériel, en plus d’une guitare Ibanez 7 cordes, au manche un peu plus arrondi que Steve Vai, comporte aussi des amplis Carvin et VHT Ultralead.




C’est pourtant difficile de tout faire tout seul…

Chaque fois que j’avais une question, je pouvais demander à Steve. Un ami m’a aidé à mixer. Il faut à mon avis cinq bonnes années d’expérience sur ce terrain avant de faire quelque chose de très bon. Savoir gérer la dynamique, les panoramiques, c’est toute une histoire !

Tu n’as pas eu de pépins avec ton matériel informatique ?

Non, mais en fait il y a un vrai problème. Cela devient tellement facile d’utiliser le logiciel que tu te dis «Tiens, si j’essayais ça». Puis tu essayes un autre truc. Puis un autre. Tu peux y passer tes journées et détailler chaque option, tourner tous les boutons. Pareil pour essayer différents sons de guitare. Mais j’ai toujours essayé de garder une idée claire sur la façon dont je voulais que ça sonne. Avant de se mettre sur l’ordinateur, il vaut mieux savoir ce que l’on veut !

La réalisation t’intéresse ?

Oui, j’ai vraiment envie de produire d’autres artistes. Je travaille avec le groupe Krimzen et d’autres personnes m’ont contacté. Aux Etats-Unis, pas mal de réalisateurs n’y connaissent rien en musique. Tout le monde peut apporter une critique évidemment en se fiant à son oreille. Mais c’est quand même beaucoup plus pratique de savoir expliquer à un musicien qu’un passage sonnerait mieux en triolet plutôt qu’à la croche.

Te vois-tu comme un shredder ?

Non. L’idée qui guide ma musique consiste à créer des mélodies, des choses qui s’adresse à un public plutôt qu’à des guitaristes. C’est l’idée du show de Steve Vai. La technique est là, mais l’ambiance et les mélodies ont une plus grande importance.

Comment est Steve Vai au quotidien ?

C’est un pro qui se crée une image de personnage un peu intouchable sur les photos. Mais c’est surtout quelqu’un de très chaleureux et généreux. Il signe les autographes, n’envoie personne se faire voir. Musicalement, il est exigeant sans être un obsédé du détail. J’essaye d’absorber toutes ces qualités.

Tu vends ton CD sur ton site…

En fait, je fais tout tout seul. J’ai fait le site web, la pochette du CD, et je deviens mon propre label. Il est maintenant possible d’acheter le CD à l’international. J’aimerais proposer des vidéos, lorsque j’aurai plus de temps.

Le site de Dave Weiner :
http://www.daveweiner.com

Dave Weiner, le six-cordiste de Steve Vai