Metal néo-classique et Belgique ne sont pas des termes qu’on peut retrouver fréquemment ensemble. Dushan Petrossi œuvre depuis des années à travers Iron Mask pour faire en sorte que son metal mélodique soit reconnu. Alors que Fifth Son Of Winterdoom vient de sortir, on peut dire qu’il a réussi sa mission ! Entretien avec le guitariste le plus rapide du plat pays.

Malgré un titre d'album qui pourrait faire penser à de l'heroic fantasy, Fifth Son Of Winterdoom est en fait un titre aux implications très personnelles et douloureuses. Peux-tu nous expliquer ?
Dushan Petrossi : Oui en effet, le titre a été choisi en fonction de quelque chose de très douloureux pour moi. En gros, le précédent album parlait du décès de ma mère, et celui-ci du décès de mon père. Ils sont tous les deux morts en hiver à quelques années d’intervalle, et je suis le cinquième enfant de cette famille, de cette malédiction hivernale en quelque sorte. Tout ça est tourné métaphoriquement dans le titre.

Cet album est à nouveau très varié mais nettement moins sombre que le précédent. Je trouve toujours que l'ouvreur donne le ton et ici il est plutôt joyeux. C'est la ligne directrice que tu voulais dicter sur Fifth Son Of Winterdoom ?
D. P. : Plutôt naturellement. Quand je compose un disque, les chansons sortent au fur et à mesure. C’est vrai que l’album d’avant était peut-être plus dark… Je ne sais pas, c’est une façon de faire, de procéder. L’un est peut-être plus vers la lumière et l’autre l’obscurité, mais les deux sortent d’un même œuf. Mais je ne me limite pas à une certaine couleur, Back Into Mystery est un titre très accrocheur avec une mélodie de guitare plus « majeure » donc ceci donne peut-être un feeling plus joyeux mais il y a aussi des morceaux très sombres.

Quels souvenirs garderas-tu des sessions d'enregistrement de Fifth Son Of Winterdoom ?
D. P. : Un très agréable moment passé dans le sud de l’Italie ou nous avons enregistré les drums au Sude studio, avec l’ingénieur du son de Michael Wagener, Angelo Buculolieri, très bon studio à l’acoustique impeccable, et de retour à Bruxelles, j’ai terminé mes solos et orchestrations dans mon studio. Puis, j’ai terminé les paroles et enregistré les parties vocales pour Mark avant de les lui envoyer pour qu’il enregistre les siennes. Ensuite nous avons mixé avec Angelo. C’est ma façon de travailler depuis des années, et je pense que pour moi c’est la meilleure des méthodes car on ne perd pas de temps en studio à part pour la batterie et le mix/mastering.

Depuis tes débuts les comparaisons avec Malmsteen pleuvent. Il faut dire que certains choix de ta part justifient aussi cette comparaison. Pour autant, ta musique ne se limite pas à émuler celle d'Yngwie. Est-ce que tu souffres parfois de ce qu'on peut écrire ou dire sur ton jeu ?
D. P. : Au début, je pouvais le comprendre car les albums étaient très néo-classiques, quoi que j’ai toujours avoué qu’il a été une grande influence pour moi, mais ça ne se limite pas qu’à ça effectivement. Il suffit d’écouter l’album, on ne fait pas juste du Malmsteen. Il y a peut-être un seul morceau néo-classique, parce que j’aime jouer ce genre qui m’a appris beaucoup de choses quand j’étais jeune. Mais il n’y a pas que Malmsteen, il y a Gary Moore, Satriani, Steve Lynch pour le tapping, beaucoup de gens… Dès qu’on joue plus mélodique et symphonique on est catalogué Malmsteen, c’est ça le problème. Les gens qui disent ça n’ont pas écouté tout ce qu’on fait.

Tu as semble-t-il trouvé une stabilité dans le line-up du groupe et un chanteur dont le style colle tout à fait à la marque Iron Mask. As-tu parfois douté ? Et doutes-tu encore vu les changements qui ont affecté le groupe par le passé... ?
D. P. : Oui car je me doutais bien que l’étiquette Malmsteen serait encore plus grande avec Mark, mais après maintes auditions, je n’ai pas hésité une seconde, il est vraiment le meilleur pour ce style plus mélodique. A chaque fois que je prenais un chanteur, c’était pour faire mieux que ce que j’avais fait avant. Certains titres nécessitaient vraiment un style particulier, cela aurait été impossible de faire Hordes Of The Brave avec le premier chanteur, et les albums d’après n’auraient pas pu être faits sans Mark Boals. Ce n’est pas forcément que je ne voulais pas tourner avec eux, parfois ils n’étaient pas disponibles, par exemple Valhalla est tombé malade et je ne pouvais pas arrêter et ne plus rien faire. Le line-up est le même sur les deux derniers albums, ça s’est stabilisé mais la situation économique actuelle ne nous permettra pas de d avoir Mark sur le prochain album car nous voulons jouer partout et souvent et avec lui à Los Angeles, cela devient difficile de se réunir et je recherche un autre chanteur pour le moment.

Quel matériel as-tu utilisé pour Fifth Son Of Winterdoom ?
D. P. : Essentiellement joué sur Fender et ma nouvelle Ibanez , le tout a été réamplifié via différents amplis comme Mesa , Marshall , Brunetti , Peavey , Blackstar .

En dehors des périodes de tournées, combien de temps par jour joues-tu de la guitare ?
D. P. : Je joue le plus possible dès que je peux. Gérer deux groupes est très difficile niveau temps et il est vrai que je joue beaucoup plus quand je commence à composer un album, je préfère me consacrer aux compositions qu’à la technique pure comme quand j'avais 16 ans. Quand tu arrives à un certain niveau, le but n’est pas de jouer de plus en plus vite mais bien de garder ce niveau en l’améliorant dans la propreté et l’exécution, et dans ce que je sais faire, je n’ai pas envie de me lancer dans du jazz, ou des trucs qui ne me serviront jamais. Quoi que tu peux trouver vraiment de tout dans mes compos mais en gros, dès que je prends ma guitare, je peux jouer de de 2 heures à 7 heures sans arrêt par jour.

A quel moment as-tu compris que tu deviendrais un guitariste professionnel ?
D. P. : A vrai dire tu le deviens tout naturellement, sans t’en rendre compte, avoir des deals avec des labels pour Iron Mask et Magic Kingdom depuis presque 20 ans dans un pays comme la Belgique est très rare. Tu commences en bas et si tu as de la force pour persévérer tu peux aller loin. Cela te force à devenir pro et à sortir des disques et à apprendre ton métier sur le tas avec les erreurs et les mauvais choix que tu peux prendre. Cela nécessite un apprentissage de tous les jours, tout évolue, il faut s'adapter, mais maintenant avec AFM Records je me sens bien épaulé et ils ont confiance en moi et ma musique.

As-tu passé beaucoup de temps à trouver ta voie puis ton propre style à la guitare ?
D. P. : C’est vrai que j’ai toujours aimé le style de jeu néo-classqiue, et cela m’a fort inspiré, Trouver sa voie est dur. De nos jours soit tu décides de sonner totalement « crazy » et original alors tu sonnes différent sois tu décides de jouer plus conventionnel et là on te dit ce n’est pas original. Globalement, j’incorpore des éléments plus variés, comme des blast beats, des riffs trash, des voix death ou black depuis des années, sur certains morceaux, mais c’est sûr que mon jeu serra toujours mélodique. J’aime les mélodies fortes, et si un solo doit être lent ça ne me gêne pas du tout, j’aime jouer vite mais ce n’est pas une obligation sur tous les plans.

Tu cites souvent Gary Moore comme une inspiration. Si certains morceaux montrent effectivement des influences plus hard rock, voire plus folk, peut-on imaginer que tu ailles encore plus loin dans ce style à l'avenir ?
D. P. : Why not! J’aimerais bien faire un album plus blues rock dans un futur proche, mais j’aurai toujours des influences celtiques folk sur certain morceaux, j'adore ce genre d’ambiances et de tonalités et le hard rock pur est un de mes premiers amours.


Iron Mask - Fifth Son Of Winterdoom
AFM Records
www.iron-mask.com

Iron Mask - Fifth Son Of Winterdoom