Rob Zombie, brillant artiste touche-à-tout, avait pris ses distances avec sa carrière de musicien ces dernières années pour se concentrer sur la réalisation de films. Mais, en ce début d’année 2010, il nous donne une suite à son premier album solo, Hellbilly Deluxe. Et en bon cinéaste, il accouche d’un sequel dépassant l’original. Comme un bonheur n’arrive jamais seul, l’homme pressé a pris quelques minutes de son emploi du temps de ministre pour converser avec nous.

Hellbilly Deluxe 2 est sorti depuis quelques semaines. Est-ce que tu prêtes attention aux réactions de la presse et des fans à son égard ?
Rob Zombie : Cela fait pile deux semaines je crois que le disque est sorti. Les réactions ont été très positives. Malheureusement je ne suis pas en tournée donc je ne peux pas juger des réactions des fans directement. Mais nous avions déjà joué pas mal de nouvelles chansons sur la tournée précédente donc j’avais pu tâter le terrain à ce moment-là. Je ne lis pas vraiment les critiques presse, sinon. Parfois, des gens m’envoient tout de même quelques coupures. Hellbilly Deluxe 2 a l’air d’être été apprécié donc je suis satisfait.


Hellbilly Deluxe 2 contient un morceau assez surprenant : « The Man Who Laughs ». Il s’appuie sur un long interlude instrumental fait d’un solo de batterie et sur des orchestrations inédites pour toi. Comment est née cette chanson ?

Rob Zombie : C’est un titre qui a pris des proportions inattendues. Au départ il n'y avait qu'un riff qui devait servir à faire une chanson très courte. Mais j’ai été inspiré par le livre et / ou le film The Man Who Laughs (ndlr : L’Homme Qui Rit, roman de Victor Hugo). Et lorsqu’un truc m’inspire, ce n’est pas à moitié ! J’ai donc voulu en faire un truc un peu plus épique et la chanson ne fit que s’allonger. Nous avions mis en boîte la version courte de la chanson et j’ai dit à Tommy Clufetos que je voulais absolument mettre un solo de batterie en plein milieu du titre. J’étais très inspiré par Iron Butterfly qui utilisait aussi des soli de batterie. Les gens se moquent souvent de ça mais c’est pourtant génial. Tommy pensait que je blaguais mais il a quand même fait un solo de cinq minutes. Il pensait sans doute que j’allais le couper pour en garder trente secondes mais j’ai tout utilisé. Ensuite j’ai amené le tout à un autre niveau encore en m’associant à Tyler Bates qui avait bossé avec moi sur la bande originale de mes films. Il a composé le passage de cordes du morceau. Tu vois, le morceau n’a pas arrêté de devenir de plus en plus ambitieux jusqu’au résultat que l’on peut maintenant entendre sur Hellbilly Deluxe 2.


Lorsque tu bosses sur un film est-ce que le moment où tu dois te pencher sur la bande originale représente quelque chose de spécial à tes yeux puisque ça combine tes deux arts de prédilection ?
Rob Zombie : J’adore pouvoir prévoir à l’avance la musique que je vais utiliser. Quelques-uns des meilleurs moments de films sont ceux où je savais d’avance quelle musique j’allais employer. Cela m’aide à capter l’émotion nécessaire au moment du tournage. Pour The Devil’s Rejects, je savais que j’allais utiliser The Allman Brothers., pour Halloween 2 je savais qu’il y aurait The Moody Blues, etc. Ce sont des purs classiques qui ont une identité sonore très forte et qui définissent très bien les scènes où ils sont employés. Mais c’est également agréable de trouver des chansons au moment du montage car elles aident à faire vivre le film.

Tu te verrais refaire la musique d’un de tes films comme ce fut le cas pour The House of 1000 Corpses ?

Rob Zombie : C’était une expérience assez difficile mais je songe à le refaire pour mon prochain film. Ce serait avec le reste du groupe, en revanche, et non pas tout seul comme ce fut le cas pour mon premier film. Il faudrait aussi que le film soit approprié au genre de musique que je joue…

Un mot sur ton groupe, justement. John 5 y réalise vraiment un boulot excellent. C’est un véritable atout sur lequel tu peux compter…
Rob Zombie : Oui. J’adore l’avoir dans le groupe. Il m’a inspiré à nouveau pour faire de la musique. Le secret entre nous est notre entente. C’est vraiment un gars bien. C’est la première fois de toute ma carrière – White Zombie y compris – que j’ai un « bras droit » qui est aussi mon guitariste. C’est un technicien hors pair. Je me sens donc comme dans les grands groupes comme Van Halen ou Led Zeppelin. Quand j’ai rencontré John 5 pour la première fois nous nous sommes immédiatement entendus et notre collaboration est vraiment fructueuse.


Y a-t-il des moments sur Hellbilly Deluxe 2 où tu trouves qu’il est particulièrement bon ?
Rob Zombie : Il y a plein de moments où il est brillant. Mais tu sais parfois les gens sont tellement bons dans ce qu’ils font qu’on ne le remarque même plus… Il ne frime pas quand il joue. C’est la même chose pour Tommy Clufetos. C’est un batteur d’exception mais il ne la ramène pas dans son jeu et son approche de l’instrument. Il se contente de faire ce dont la chanson a besoin. Néanmoins sur « Werewolf Baby » John 5 joue énormément de slide guitare et il est remarquable.


John 5 est également celui qui t’a fait jouer sur le dernier album de Lynyrd Skynyrd et sur la chanson « Floyd » qui est sans doute la meilleure du lot… J’imagine que pour toi ce fut une expérience assez folle, non ?
Rob Zombie : Oui ! Il bossait avec Lynyrd Skynyrd et il m’appelle un jour pour me dire qu’ils m’adorent. Je me suis dit qu’ils me connaissaient car j’avais mis leur chanson « Freebird » dans la bande originale de The Devil’s Rejects… Toujours est-il qu’ils voulaient que je chante sur une de leurs chansons. J’étais en plein tournage d’Halloween 2 et ils m’ont envoyé la démo de « Floyd ». Je ne pensais pas pouvoir y arriver car j’étais trop occupé. J’ai dû attendre qu’ils aient fini le disque de leur côté pour aller enregistrer mon chant dans la maison de Tommy Lee.

Revenons à Hellbilly Deluxe 2. En écoutant les onze pistes, j’ai l’impression que ce disque a été facile à faire. Ai-je raison ou complètement tort ?
Rob Zombie : Non, tu as raison. Educated Horses a été assez simple à faire également. Je crois que tout cela tient au groove que nous avons dans le groupe. Tout se passe très bien et sans prise de tête. Cela se ressent forcément sur le résultat final. C’est vrai que le processus global de Hellbilly Deluxe 2 a été rapide. Souvent nous écrivions une chanson le matin et nous l’enregistrions l’après midi. Nous voulions faire un album très varié. Il y a pas mal de démos que nous n’avons pas exploitées. C’est une première pour moi. D’habitude j’utilise tout.

Depuis 2005, tu es très occupé (euphémisme). Tu ne ressens jamais le besoin de faire une pause et de prendre un peu de bon temps ?
Rob Zombie : Parfois… C’est vrai que c’est chaud des fois. Je passe de tournées en plateaux de films sans vraiment pouvoir respirer. Mais dès que je me retrouve à rester oisif, je deviens fou au bout d’une semaine ! Le mieux est donc de ne pas s’arrêter. J’ai l’impression que si on arrête de travailler, les gens oublient complètement qui on est (rires).

Est-ce que tu perçois une grosse différence entre le rôle de producteur de disques et le métier de réalisateur de films ?

Rob Zombie : Cela se ressemble dans la mesure où les deux partent de rien et doivent avoir une vision assez claire des choses pour arriver à accoucher d’une œuvre artistique. Les métiers sont très différents mais il faut dans les deux cas cette « vision ». Les deux ne peuvent jamais répondre « je ne sais pas » à qui que ce soit car tout le monde attend à ce qu’ils guident les autres, que ce soit des guitaristes ou des acteurs.


Rob Zombie – Hellbilly Deluxe 2
Roadrunner
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