On connaissait Adrian Smith et Dave Murray ou Glenn Tipton et K.K. Downing mais depuis quelques années c’est bien la paire Christopher et Michael Amott qui dynamise le petit monde du metal à coups de riffs trash, de rythmiques death mélodiques et de solos harmoniques. Nous nous sommes entretenus avec le duo de guitaristes juste avant un concert impeccable d’Arch Enemy au Bataclan de Paris pour en savoir plus sur leurs parcours respectifs.

Comment se fait-il que deux frères comme vous jouent du même instrument ? L’exemple le plus typique est de choisir deux instruments différents…

Christopher Amott : En fait, j’ai joué de la flûte à l’école [rire]. Je suis rapidement passé à autre chose car ce n’était pas mon truc. J’ai d’abord étudié les notes et la technique avant de passer, des années plus tard, à la guitare. Je devais avoir quatorze ans et mon frère jouait au sein de Carcass. C’est lui qui m’a donné envie de me mettre à la gratte. Nous avons huit ans de différence et ce n’était pas évident de jouer ensemble.
Michael Amott : Quand j’ai commencé à m’intéresser à la musique, je voulais écrire des chansons et la guitare me semblait être le meilleur moyen d’y parvenir. J’ai essayé un peu de basse et de batterie mais la guitare me plaisait davantage. Avec une grille d’accords basiques, j’arrivais déjà à composer des trucs simples. J’avais trouvé ma voie. La guitare permet d’entendre le résultat de ses trouvailles directement alors que la basse et la batterie donnent le sentiment de n’entendre « qu’une seule note »…

Est-ce que vous employez parfois d’autres instruments que la guitare pour écrire des chansons d’Arch Enemy ?
M. A. : Non, je ne sais pas jouer des claviers. Par conséquent je n’ai pas vraiment d’autres options que la guitare. Parfois les idées proviennent d’un rythme de batterie mais ça ne va pas plus loin que ça.

Au sein du groupe vous jouez tous les deux autant en rhythm qu’en lead. Comment définiriez-vous le rôle que vous jouez dans Arch Enemy ?
M. A. : Certaines personnes pensent que nous nous répartissons méticuleusement les rôles mais c’est faux. On croit souvent que je joue les trucs les plus mélodiques et Chris les parties rapides. Rien n’est figé. C’est difficile à expliquer car nous jouons ensemble depuis si longtemps que tout est devenu extrêmement naturel. Même au sein d’une chanson il nous est possible de jouer plusieurs rôles et de se les échanger. Nous varions les plaisirs et c’est une bonne chose pour nous. Dans l’écriture c’est la même chose : rien n’est automatique et nous prenons toujours notre temps pour trouver des parties de guitare intéressantes. C’est un bon partenariat entre lui et moi [les deux frères se font alors une accolade amicale et se congratulent en riant].
C. A. : Les rythmiques sont souvent le plus dur à trouver. Les solos sont le plus généralement totalement improvisés. Je joue énormément de trucs – beaucoup de déchets – et au bout du compte Michael trouvera une bonne idée dans tout ce que j’ai fait.
M. A. : Et il fait de même avec moi !

Vous êtes donc sans arrêt à l’écoute du jeu de l’autre. Percevez-vous des changements dans le style de votre frère depuis les débuts ?
C. A. : Michael sonne de plus en plus blues depuis dix ans. C’est une bonne chose.
M. A. : Chris également, je trouve. Il vieillit [rires]. Nous ressemblons à deux Eric Clapton maintenant [rires].
C. A. : Je trouve que je suis devenu bon très rapidement mais que je ne me suis pas beaucoup amélioré au fil des années. Je suis peut-être devenu meilleur sur un créneau spécifique utile au sein d’Arch Enemy mais pas de manière générale.
M. A. : Oui, la première démo que tu avais faite après avoir rejoint ton premier groupe m’avait vraiment étonnée à l’époque. Je me demandais comment tu avais fait pour devenir aussi bon après seulement quelques mois.
C. A. : J’étais obsédé par les montées et les descentes de manche [rires]. Pendant trois ans, je n’ai fait que ça ! N’abandonnez jamais, les enfants !
M. A. : Malgré tout, je l’entends progresser encore aujourd’hui. Je connais son style par cœur et j’entends donc chaque subtilité. Je trouve que son jeu s’enrichit de petites nuances assez impressionnantes.

À part aux remarques de votre frère, est-ce que vous prêtez attention à ce que les autres membres du groupe ou la presse peuvent dire sur votre jeu ?
M. A. : Chris et moi sommes assez directs dans ce que nous nous disons. Nous n’employons pas de filtre ! Nous ne sommes pas frères pour rien. Les gens extérieurs nous disent des choses moins explicites comme « peut-être que vous ne devriez pas faire ceci comme cela » alors nous préférons le ton sec d’un bon vieux « fais pas ça, c’est nul » [rires].

Rise Of The Tyrant, votre dernier album en date, est sorti depuis plus de six mois. Qu’en pensez-vous aujourd’hui avec ce léger recul ?
M. A. : Qu’on aurait pu mieux les jouer ! C’est toujours la même chose après nos tournées : nous maîtrisons nettement mieux les nouvelles chansons. J’aimerais pouvoir aller en studio et enregistrer le disque maintenant. Évidemment le jeu plus innocent des premières prises possède également son charme mais actuellement nous nous sentons très à l’aise avec les nouveaux morceaux. Pour les groupes de l’ancienne génération, leur premier album était souvent constitué de leur répertoire live et sonnait donc parfaitement. Quant à nous, nous avons douze nouveaux titres et pas la moindre idée de ce qui va fonctionner sur scène ou non [rires]. Souvent des chansons insoupçonnées deviennent les plus populaires ! Et le contraire est valable également…

À quels titres fais-tu allusion sur cet album ?
M. A. : Je pensais que « Revoluion Begins » allait cartonner mais ce ne fut pas le cas sur notre première tournée. Je ne savais pas pourquoi mais ce titre ne passait pas très bien sur scène… Nous l’avons beaucoup répété et maintenant il fonctionne. Ce sont des détails de toute manière et je ne pense pas que la majorité des fans se rendent compte de ce travail que nous effectuons pour peaufiner nos chansons. À l’inverse, je ne m’attendais pas à ce que « Blood On Your Hands » marche aussi bien en concert. J’ai sous-estimé notre public car je pensais que ce titre était trop complexe pour être apprécié dans ce contexte.

Le groupe a enregistré bon nombre de reprises mais que des titres metal à la base. Si vous deviez en faire une d’un autre style, laquelle choisiriez-vous ?
C. A. : Il faudrait une mélodie forte pour la « metalliser » ! Mais je ne sais pas trop…
M. A. : Nous avons toujours besoin de titres bonus pour les singles, les éditions spéciales, etc. Du coup, nous préférons enregistrer des reprises, un peu à la va-vite, car nous ne voulons pas qu’une de nos chansons ne soit pas disponible pour tout le monde. Nous adorons tous nos albums et toutes nos chansons, même si certaines sont moins marquantes que d’autres. Je ne sais donc pas trop non plus [rires].

Arch Enemy – Rise Of The Tyrant
Century Media – EMI
www.archenemy.net

Arch Enemy : les deux frères se livrent