Les goûts et les couleurs, ça se discute ! Topic peinture

Rappel du dernier message de la page précédente :
Adam Bopel
Lao a écrit :
Je suis ignare (comme ça c'est dit) mais il y a 3 peintres qui me "parlent"
Jérôme Bosch, Max Ernst et un peu Dali. Bref, dans l'imaginaire en général.


Jérôme Bosch a été mon premier véritable choc ... Et je ne m'en suis toujours pas remis.
Il m'a ouvert les portes d'un univers où raison et folie se côtoient.
Et puis ce foisonnement jusqu'à l'excès ... Je lui dois aussi la découverte d'autres peintres flamands contemporains ou tardifs, découverts dans les remarquables musées Groeninge (à Bruges) et le Rijksmuseum d'Amsterdam, où l'on peut voir des toiles de Frans Hals ; j'aime beaucoup celle-ci (qui n'est as exposée à Amsterdam) :



J'admire ce tableau car, sous la caricature il me semble qu'il y a une forme de cruauté, de violence qui me fascine, et que je retrouve chez d'autres peintres -et qui flattent mon côté masochiste

EDIT : nous sommes tous des ignares
Lao
  • Lao
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    Lao
    le 22 Apr 20, 11:09
Oui, il y a quelque chose qui force l'intérêt dans la manière dont les Flamands (et environnants) ont repris l'esthétique espagnole pour exprimer un certain réalisme.
"Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change. " Henri Laborit.
Saddakoh
Je ne suis pas du tout connaisseur, mais dans ce genre j'aime bien les tableaux de Vermeer.

Surtout les couleurs d'ailleurs.
jules_albert
l'objet de l'art, chapitre 3 de sans valeur marchande :


https://debord-encore.blogspot(...).html



Cet art sans objet a constitué le complément indispensable de la science sans sujet, alors qu'autrefois l'un et l'autre résultaient de la totalité de l'expérience humaine et du travail social de leur époque. La science et l'art en étaient respectivement la théorie et la pratique. Et la récente séparation entre un art et une science amputés de la moitié d'eux-mêmes est assurément apparue au moment de la Renaissance marchande, avant laquelle cette science d'expert-comptable et cet art de rebut n'existaient pas.


Tel musée ou telle exposition d'art nous donne à voir maintenant la couverture de selle d'un guerrier khirghise, le peigne sculpté d'une jeune fille étrusque, une enluminure arrachée à un livre d'heures ou la reproduction d'une scène de chasse néolithique. Et ces objets nous sont présentés comme des objets d'art, au même titre qu'un tableau de David ou un mobile de Calder : des uns aux autres, une simple évolution historique, sans solution de continuité. Peut-être observera-t-on qu'autrefois de telles œuvres n'étaient jamais signées, mais on en conclura étourdiment qu'il s'agissait d'une question de mode culturelle ou d'une humilité admirable des anciens « artistes ».


Dans de très nombreuses civilisations pourtant, et pendant des millénaires, l'art n'existait pas au sens où il n'y avait pas de création non artistique. Le moindre ustensile de cuisine ou de toilette était traité avec les égards dus à ces actes fondamentalement religieux que constituaient le repas ou le bain. Car il n'y avait pas d'activité profane. Manger, se vêtir, chasser, étaient des actes sacrificiels en des temps où chacun s'éprouvaient dans sa totalité comme l'habitacle de la source vivante et de son unicité. La couverture de selle, le peigne et la peinture rupestre étaient des ouvrages utiles, destinés à participer à des actes ou à des événements particuliers, et dont la forme coïncidait avec ce que leur emploi signifiait dans l'ensemble de l'activité humaine. Leur forme était donc, comme aujourd'hui, adaptée à leur usage. Seulement, « l'usage » que l'homme faisait de lui-même était alors tout différent. L'art était ainsi l'activité pratique humaine édifiée sur un ensemble de connaissances expérimentales - c'est-à-dire réellement éprouvées par qui s'en donnait les moyens - qui fondaient la véritable science d'alors.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
Lao
  • Lao
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  • #49
  • Publié par
    Lao
    le 22 Apr 20, 12:15
Effectivement, il n'y pas de discontinuité entre l'artisanat et l'art qui sont tous les deux soutenus par la créativité. Même dans l'ingénierie (de conception en particulier) on peut retrouver la créativité comme qualité première. C'est dans le travail répétitif et aliéné qu'elle disparaît.
"Tant qu’on n’aura pas diffusé très largement à travers les hommes de cette planète la façon dont fonctionne leur cerveau, la façon dont ils l’utilisent et tant que l’on n’aura pas dit que jusqu’ici que cela a toujours été pour dominer l’autre, il y a peu de chance qu’il y ait quoi que ce soit qui change. " Henri Laborit.
Raphc
  • #50
  • Publié par
    Raphc
    le 22 Apr 20, 12:17
Blow Up a écrit :

Depuis un moment c'est peut être un signe de changement d'époque, j'ai l'impression que les peintres les plus intéressants ne sont plus en Occident, mais plutôt en Asie.

Yan Pei-Ming



On a eu son expo de portraits ici, un peu chiant a mon gout. Le reste a l'air mieux.

Lui m'avait impressioné, Cai Guo-Qiang:

jules_albert
Lao a écrit :
Effectivement, il n'y pas de discontinuité entre l'artisanat et l'art qui sont tous les deux soutenus par la créativité. Même dans l'ingénierie (de conception en particulier) on peut retrouver la créativité comme qualité première. C'est dans le travail répétitif et aliéné qu'elle disparaît.

sur l'ingénierie et la science, le chapitre 2 est éclairant.
Sans valeur marchande : https://debord-encore.blogspot(...).html

La peste citoyenne. La classe moyenne et ses angoisses : http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
cliclac
Lao a écrit :
Effectivement, il n'y pas de discontinuité entre l'artisanat et l'art qui sont tous les deux soutenus par la créativité. Même dans l'ingénierie (de conception en particulier) on peut retrouver la créativité comme qualité première. C'est dans le travail répétitif et aliéné qu'elle disparaît.

Pour avoir eu un travail considéré comme artistique je ne suis a moitié d'accord et je me suis souvent posé la question.
Quand j'avais une commande je cherchais a être créatif, j'étais payer pour, mais il fallait que ça plaise au client avant tout.
Une démarche purement artistique ne doit pas chercher a séduire, juste a exprimer ce que l'on ressent, on se fout a poil sinon on triche.
Evidemment la frontière est floue, il y a un moment ou ça se mélange ce serait trop simple.
Mais le statut d'artiste est trop galvaudé, j'avais des confrères qui faisaient le même boulot que moi mais qui disaient n'avoir en tête que la création pure, de l'art donc, moi je disais que l'on était payé pour faire du beau de l'artisanat en somme.
Zorzi
  • #53
  • Publié par
    Zorzi
    le 22 Apr 20, 17:26
On peut exercer un métier artistique sans faire de l'art. Le patron ou le client vous le rappelleront très vite. Soulages justement disait après s'être émerveillé sur le travail d'un ami tonnelier qu'il savait ce qu'il fabriquait dès le départ alors que lui ne le savait pas du tout. C'était même pour lui la différence entre l'artisan et l'artiste.
Biosmog
Pour continuer cette philosophie de comptoir, j'entendais quelqu'un qui disait que la différence entre la recherche scientifique et le développement d’ingénierie, c'est l'erreur. L'erreur fait partie intrinsèquement de la recherche. Sans assomption de l'erreur, il n'y a pas de découvertes, pas de sciences. Je pense que la différence entre artisanat et art est du même ordre. Après, c'est une question de démarche, donc finalement il n'y a pas de frontière stricte, mais plutôt un équilibre différent. On a chaque fois un être humain, avec une visée, des compétences, des techniques et des méthodes assez similaires, mais dans des proportions différentes.
Vous battez pas, je vous aime tous
cliclac
Pas seulement des proportions, assez d'accord avec Zorzi ce qui fait la différence c'est le but, soit tu dois remplir un contrat en quelques sortes soit tu n'as pas de contraintes.
J'ai toujours pensé avoir un métier dit artistique mais ne pas être un artiste, ça ne me posait pas de problème, je me suis bien éclaté avec.
Dans les agences de pub, beaucoup de créatifs sont des artistes frustrés, c'est pas les meilleurs dans leur boulot en général, si on a vraiment quelque chose a exprimé on peut avoir les deux facettes dans sa créativité.
cluster
Très intéressant ce topic.

J'adore la peinture depuis une grosse claque à 16 ans devant un tableau de Van Gogh mais je me suis mis à sérieusement pratiquer seulement depuis 7-8 ans, dans des ateliers, donc je découvre peu à peu ce monde. Ca apporte d'autres satisfactions que la musique, c'est complémentaire et je ne pourrai plus vivre sans les deux.
Concernant le vaste débat Art/artisanat perso j'ai une vision assez large, je n'ai pas de réponse et je pense que la prise de tête sur ces délimitations à eu des effets pervers. Pour moi en resserrant à l'extrême les limites de l'art on en est arrivé à certaines dérives : maintenant pour être un "artiste", il ne faut surtout pas étudier longuement les techniques anciennes, surtout pas faire du figuratif, surtout pas que ce soit joli, sinon on fait du "réchauffé", on est un "artisan". Dans les ateliers de peinture où je suis allé on trouve toujours un ou deux étudiants déçus de leur formation en école ou aux Beaux arts où la part laissée aux techniques est en diminution (dessin, valeurs, mediums, perspective, etc.). [Attention, je ne dis pas que c'est le cas de toutes les formations, il reste encore des écoles en France avec une formation très pointue aux techniques]. Non on s'en fout de tout ça. Pour être un artiste, un vrai, un qui n'en jette, il faut un CONCEPT, une idée fulgurante... Comme beaucoup manquent d'idées réellement novatrices la facilité c'est de faire une "performance" ou une "installation" qui interpelle, qui choque la plèbe (de la merde dans un bocal hermétique, un alignement de bols de riz, etc.). Tout ce qui compte c'est le discours, la justification, et que bien-sûr ce discours soit compréhensible uniquement par un petit nombre, surtout pas par le péquin moyen. La France est rentrée à donf là-dedans beaucoup plus que d'autres pays (lire par exemple le bouquin "l'élite artiste"). C'est pour ça que le grand public - dont je fais partie - est souvent plus sensible à ce qui peut encore se faire chez certains peintres asiatiques (j'adore moi aussi Yan Pei Ming, grosse claque l'an dernier à une expo à Dijon), ou anglo-saxons (Hockney, Bacon, Jérémy Mann, Lipkin, , etc.)Je grossis le trait, j'exagère pour simplifier mais c'est dans les grandes lignes l'impression que j'ai. Encore une fois je n'ai pas fait d'études artistiques, je ne suis pas hyper calé et je m'amuse en amateur, donc si quelqu'un pense que cette impression est totalement fausse ses explications m'intéresseront grandement.
"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."
La Rochefoucauld
cliclac
C'est assez ça, j'ai connu un prof des Beaux Arts il a fini par me dire, un jour de déprime peut être, que les élèves ne lui demandent pas d'apprendre une technique mais de les aider a monter leur première expo.
La condition de l'art contemporain en France vient en grande partie de la création des FRAC et des gens qui les dirigent, c'est évoqué en fin d'article d'ailleurs

https://fr.wikipedia.org/wiki/Fonds_régional_d%27art_contemporain
Zorzi
  • #58
  • Publié par
    Zorzi
    le 22 Apr 20, 19:15
Et une litanie d'artistes conceptuels qui depuis des décennies ont capté tout ce marché officiel et étatique, une sacrée bande de gonzos.
cliclac
et les grandes foires comme la FIAC ne présentant que des artistes pour grands collectionneurs ou investisseurs à 38€ le billet d'entré ça fait le tri
cluster
Ah ouais je ne connaissais pas vraiment ces FRAC. Ca a l'air sympa d'après ton lien.

« le poids du budget de fonctionnement est en train de l’emporter très largement sur l’investissement ».

L'ancien ministre de l'Éducation nationale Luc Ferry est extrêmement sévère vis-à-vis des FRAC, institution selon lui, « plébiscitée par les artistes sans art et sans talent » permettant « d'écouler leurs productions indigentes aux frais du contribuable »
"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."
La Rochefoucauld

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