La musique, c'est quoi?

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Rock N' troll
Voici encore un peu plus d'informations' que j'ai recopié du mag "Science et vie".

La musique nous émeut.
Pourquoi ? Les hypothèses abondent sur de curieux phénomène; quant à les vérifier, c'est une autres affaire.

L'exceptionnel pouvoir de la musique à nous émouvoir, parfois aux larmes, reste un fait étrange. A ce jour ni les psychologues, ni les neurophysiologistes ne parviennent à l'expliquer, quoique tous sachent dèjà que les réponces ne seront pas simples...
Premier constat, premier problème pointé par Robert Zatorre, neurobiologiste à l'université McGill ( Montréal ): << A la difference de la plupart des autres stimuli provoquant des affects, la musique n'est pas a priori vitale.>> De fait, les émotions induisent généralement un comportement adapté aux circonstances : par exemple, la peur à la vue d'un serpent provoque la fuite. Or, il est clair que la musique ne produit rien de tout cela. En 2001, Robert Zatorre et ses collègues se sont tournés vers l'imagerie cérébrale pour essayer d'en savoir plus. Avec un Pet scan "Tomographie par émission de positrons", ils ont <<analysé>> le cerveau de personnes écoutant des pièces de musique tel le concerto pour piano et orchestre n°3 en ré mineur opus 30 de Rachmaninov. Quelles qu'elles soient, ces oeuvres avaient en commun de provoquer, chez les sujets, des frissons reflétant d'intenses émotions. Fait surprenant, les chercheurs ont constaté que la musique stimule des aires cérébrales fondamentales-amygdale, cortex orbitofrontal...- pour la survie et l'adaptation de l'individu à son environnement. Ces structures sont connues pour répondre à des stimuli euphorisants, comme la nouriture, le sexe et les drogues. Quand aux tenants et aboutissants de ce phénomène, les théories sont presque aussi nombreuses que les chercheurs. Lisons par exemple Steve Pinker, psychologue à Harvard: <<Comparée au langage, à la vision, au raisonnement social, etc, la musique pourraitdisparaître de notre espèce sans que le reste de notre vie en soit changé.>> Autrement dit, cet art ne fait qu'exploiter des reseaux fondamentaux, apparus au cours de l'évolution pour d'autres raisons. En somme, la musique n'est qu'un heureux accident de l'évolution, un cheese-cakeprocurant du plaisir, lequel n'est pas vital.
Geoffrey Miller, de l'université du Nouveau Mexique, est d'un avis different. Pour ce psychologue évolutionniste, la musique a eu et a toujours un rôle biologique: << Cet art a évolué et continue à fonctionner comme une parade amoureuse, produite la plupart du temps par de jeunes hommes pour séduire les femmes.>> On notera que, disant cela, Miller se situe dans le droit fil de Darwin, lequel écrivait en 1871: << Nos ancêtres, [...] avant d'acquérir la faculté de déclarer leur amour dans un langage articulé, s'éfforçaient de séduire[leurs partenaire sexuel] avec des rythmes et des notes musicaux>>
Emmanuel Bigand, du CNRS, voit dans la musique une fonction cohésive du groupe.<< Je pense que la musique a été primordiale avant l'apparition du langage surtout pour assurer la cohésion des sociétés humaines, en y régulant les émotions; exprimer ses émotions et connaître celles des autres étant indispensable pour les interactions sociales, à commencer par celle entre la mère et son bébé.>> A en croire Isabelle Peretz, psychologue à l'université de Montréal(Canada), ce rôle unificateur existerait encore: << On le voit dans les rites (mariages, funérailles, etc.) ou dans la religion...Tout prétexte pour une réunion s'accompagne généralement de musique.>> Et lançant un pas plus loin, elle ajoute: << Il y a de bonne raisons de croire que la musique a une fonction biologique.>> Quelles raisons ?
D'abors le fait que cet art, apparu il y a 30 00 ans, est universel, présent, comme le langage, dans toutes les sociétés. Ensuite, la posibilité que les facultés musicales soient innées et non acquises. L'étude publiée en 2003 par Sandra Trehud, de l'université de Toronto, montre que dès l'âge de deux mois, le bébé préfère les sons consonants aux dissonances. Mais surtout la chercheuse évoquele cas de personnes souffrant d'amusie. Il s'agit d'un trouble << se caractérisant par une absence de sens musical - innée ou acquise -, affectant trois a six pour cent de la population, dû à des "lésions" cérébrales en core non localisées, mais qui pourraient correspondre à des régions entièrement dédiées à la musique>>, explique la psycologue. Mais cela ne sauraitconvaincre ceux qui, à l'instar de Séverine Samson, neuropsychologue à l'université de Lille, doutent de l'existence même de telles aires... De fait, à ce jour aucune zone de ce type n'a été identifiée.<< Le probleme, explique Isabelle Peretz, c'est que le traitement de la musique par notre cerveau se fait selon différents mécanismes. Rien que les hauteurs des sons, il en existe plusieurs. Or, souvent on n'étudie qu'un seul de ces processus. Résultat, d'une étude à l'autre, les circuits impliqués s'avèrent differents...Difficile dans ces conditions d'identifier une éventuelle régionspécialement impliquée dans la musique.>> Pour s'en sortir il faudrait un consensus sur les caractéristiques de toutes les composantes du traitement de la musique (hauteur, rythme, etc). De toutes les façons, souligne Séverine Samson, << l'étude de l'émotion musicale est par nature complexe >>. Cherche-t-on à faire des mesures que, selon Stéphanie Khalfa, physiologiste au CHU del a Timone à marseille, les obstacles apparaissent. >> Il est ainsi très délicat de savoir si l'émotion "ressentie" est réellement perçue ou seulement reconnue. On peut ainsi juger qu'une pièce exprime un extrème chagrin, sans pour autant être saisi... S'il n'y a pas de problème de mesure pour des émotions intenses, les choses se corsent pour les affects n'entraînant qu'une petite accélération cardiaque par exemple...>>>
Enfin, un autre champ de difficultés dans l'étude de l'émotion musicale est l'ensemble des petites interrogations qui se cachent derrière les deux grandes questions du pourquoi et du comment. Exemples: pourquoi un changement de tempo provoque-t-il une émotion particulières ? Quelle est l'importance de l'amygdale dans le ressenti de la peur ? Quelle est la variété des émotions suscitées par la musique, sachant que cet art colore autrement les émotions primaires ( colère, joie, tristesse...) ? Avec quelle rapidité ces émotions se produisent- elles chez l'auditeur ?
Antonio Damasio, spécialiste mondialement reconnu des émotions, ajoute : << Très complexe, le pourquoi de la capacité de la musique à induire des émotions dépend aussi du style de musique ( classique, jazz, pop, avec ou sans paroles...) et des traditions musicales (occidentales, japonaises...) Il faut aussi tenir compte des émotions non induites par la musique elle-même mais qui y sont liées, comme la nostalgie suscitée à l'écoute d'une pièces associée, dans notre mémoire, à un événement passé.>> Bref, un vrai casse-tête !!!

Kheira Bettayeb
Dans chaque église, il y a quelque chose qui cloche.
Rock N' troll
Voici une interview d'un pianiste que j'ai encore recopier de Science & vie a propos des émotions et la musique.

"Pianiste virtuose et fondateur de l'association Double-Croche, Jean-Phillipe Collard organise des concerts dans les villages. C'est là, qu'à sa manière, il expérimente la magie de l'émotion musicale."

Comment vous préparez-vous avant un concert ?
Jean-Philippe Collard : Via de simple exercices de respiration, pour détendre mes muscles contractés par la nervosité - surtout ceux des bras et des épaules très sollicités par mon art. Je commence ces exercices plus ou moins tôt avant le concert, selon le public attendu. Sachant qu'une salle prestigieuse ou un concert ou je suis attendu, par exemple, par la presse, me stressent plus et nécessitent, donc, une plus longue préparation. Si l'interprétation est prévue à vingt heures trente au théâtre des Champs-Elysées, tout commencera en début d'àpres-midi. Pour des concerts moins stressants, ce sera seulement quelques minutes avant l'entrée en scène.

Le trac : un inhibiteur ou un stimulant ?
J.-P.C : Un puissant stimulant, en général. Certes, juste avant un concert, cette peur me met dans un état tel que j'en arrive à espérer un court-circuit dans la salle pour pouvoir reporter l'interprétation ! Mais, une fois sur scène, il se produit une déliverance en moi, et la peur se transforme en une formidable puissance. Je deviensalors celui qui va piloter l'âme de certaines ou de millers d'auditeurs. Ce qui peut carrément me mettre dans un état d'ivresse musicale. Au final, le trac me rend plus sensible à l'émotion sortant de mon piano et me pousse à transmettre plus.

Qu'est-ce qu'au juste l'émotion musicale pour vous ?
J.-P.C : [Après quelques secondes de réflexion.] Un boulversement de tout notre être qui se produit quand la musique entre en nous. Cette émotion est due au pouvoir de la musique à révéler des émotions cachées au fond de nous. Elle est véhiculée par le musicien jusqu'à l'âme de l'auditeur, ou elle rebondit et suscite des réactions. La musique est un art interactif entre ces deux humains. Voilà pourquoi, si preformant soit-il techniquement, un ordinateur ne pourra jamais égaler un musicien.
Je pense qu'il existe des émotions spécifiquement musicales. Les nommer m'est impossible. Disons simplement que la musique permet d'exprimer des affects plus profonds et plus colorés que les autres formes d'art.

Pour un même oeuvre, les émotions perçues peuvent grandement varier selon l'interprète... Tout n'est-il donc pas écrit dans la partition ?
J.-P.C : Non, Si cet écrit donne nombre d'indications sur l'oeuvre, telles les notes ou les durées, il ne dit rien sur l'élan du coeur avec lequel le compositeur désirait que l'on interprète son oeuvre - une indication subjective, impossible à transcrire. De plus, souvent plus la musique est ancienne et moins il y a de choses écrites. Il existe des incertidudes sur les nuances ou les phrasés pour les oeuvres de nombre de compositeurs, comme Chopin, car les manuscrits ont souffert du temps. Tous ces << non-écrits>> sont autant de libertés laissées à la créativité et à l'instinct de l'interprète. Le but de celui-ci étant de donner une coloration personnelle à l'oeuvre afin de la rendre expressive et lui insuffler magnétisme et magie.

Quel morceau riche en émotion a été le plus difficile à travailler dans votre carrière ?J.-P.C : Il y en a plusieurs... Exemple : le Troisième concerto de Rachmaninov. Car l'émotion y est à << fleur de piano>> et très volumineuse, ce qui peut amener l'interprète à se laisser déborder par ses propres émotions. Or, des vagues émotionnelles incessantes peuvent entacher la note jouée. Il a donc fallu acquérir une énorme maîtrise de soi-même.
Cela dit, les oeuvres avec une émotion plus << raisonée >>, moins immédiate, sont aussi difficiles à travailler.
Prenons l'exemple de la musique de Mozart, une oeuvre d'enfant, simple et très pure ou l'émotion est très délicate. Pour ne pas rayer ce diamant, il faut apprendre é le manipuler avec une extrème précaution, sans trop y mettre d'émotions... come pour la musique turbulante de Rachmaninov.

Quelle musique vous fait le plus frissonner ?
J.-P.C : Le répertoire romantique. Le deuxième mouvement du concerto pour violon en ré majeur de Brahms me met littéralement en lévitation rien qu'à en parler. Car l'émotion y est brute et en surface, donc immédiatement accessible. Pour être touché par la pièces baroques ou classiques, ou l'émotion est plus raisonnée, j'ai en revanche besoin de me concentrer... Cependant, d'autres musiciens sont plus facilement émus par ces types de musique car ils leur correspondent mieux. En fait, la perception de l'émotion musicale est fonction de la sensiblité de l'auditeur et il existe autant de façons d'être touché par l'émotion d'une musique qu'il y a d'êtres humains sur terre.

Le plublic influe-t-il sur la qualité de votre intérprétation ?
J.-P.C : Oui. Il est comme un mirroir me renvoyant mes émotions et l'émotion musicale n'atteint son zénith que lorsque les auditeurs me répondent. Sans eux, j'ai l'impression de parler à un mur. A tel point qu'il m'est arrivé d'inviter des amis à venir m'écouter en studio d'enrengistrement. Selon ce que le public me véhicule, l'émotion transmise sera plus ou moin riche. Par exemple, les concerts organisés en mai dernier par l'association Double-Croche en Champagne- Ardenne, on été un moment très fort : comme l'auditoire était réduit à quelque centaines de personnes, la communicatioin a été plus intime et directe ; l'émotion n'en a été que plus intense. Tout cela, sans compter le fait qu'étant né en Champagne, j'ai eu une grande émotion à y travailler, ce qui a dû transparaître dans ma musique.

Pourquoi jouer du piano et non d'un autre instruement ? Parce qu'il transmet plus d'émotions ?
J.-P.C : Non. Jouer de cet instruement est un peu une tradition dans ma famille: mes parents sont pianistes amateurs et mes grands-parents l'étaient avant eux ! Donc j'y suis venu naturellement. Mais côté émotion, le piano est très loin derrière l'instrument musical le plus expressif : la voix humaine. Ici, la musique et interprète sont dans le même corps, aussi la personnalité du musicien est entièrement engagée et le partage des émotions est par conséquent plus fort. Le vilon, aussi communique très bien les affects humains, car c'est un peu un appendice du corps humain et le son qui en sort vibre dèjà dans le corps de l'interprète. Si puissant soit-il, le piano, lui est complètement mécanique et détaché de l'interprète ; les émotions qui s'y expriment sont donc plus neutres.

Outre la qualité de l'interprète et sa personnalité, l'oeuvre interprétée, l'écoute du public, ce public même et l'instrument utilisé, quels autres facteurs influencent la perception de l'émotion musical ?J.-P.C : Le lieu du concert. Le public, comme l'interprète sont conditionnés par l'endroit ou ils se trouvent. Et l'émotion se transporte d'autant mieux qu'elles s'exprime dans un endroit beau, avec une architecture valorisante. Voilà pourquoi dans une salle de cinéma, non prévue à cet effet, l'émotion passe mal. En revanche, dans une églises ou les chateaux, tout devient magique ! C'est le cas dans la petite église de Neuilly - sur - Suize - un village de la Haute - Marne, - qui peut contenir 250 à 300 personnes.

Et la culture musicale de l'auditeur ?
J.-P.C : Elle intervient dans une moindre mesur, selon moi. La pratique d'un instruement et les connaissances musicales n'intensifient pas la qualité et la quantité des émotions perçues. Seulement, les personnes avec un savoir musical ressentiront des émotions différents, car elle construiront ces affects en fonction de ce qu'elles savent de la personnalité du compositeur par exemple. Ce qui explique qu'un néophyte peut trouver Mozart fade - surtout s'il le compare à la turbulente musique des compositeurs romantiques -, alors qu'une connaissance du compositeur rend tout de suite son oeuvre plus expressive.

Que ressentez- vous à la fin d'un concert ?
J.-P.C : Un vide pendant lequel je ne pense à rien. C'est une phase de détente ou prédomine le sentiment d'avoir tout donné. Au moment ou les applaudissement me parviennent, je ne sais pas ce qu'il s'est passé auparavant dans la salle, si je me suis surpassé ou non. C'est seulement quelque heures après, quand je me retrouve face à moi-même dans ma chambre d'hôtel, que je fais une analyse de la soirée. Je me demande si j'ai touché le public et si celui-ci m'a transmis quelque chose. En rejouant le concert adns ma tête, j'arrive à en avoir une idée. Mais bien sûr pour savoir vraiment jusqu'ou l'émotion monte lors d'un concert, l'idéal serait d'être parmis le plublic. Car on ne peut pas être a la fois celui qui transmet et celui qui reçoit l'émotion musicale.

Propos recueillis par Kheira Bettayeb
Dans chaque église, il y a quelque chose qui cloche.

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