Norbert « Nono » Krief, vous le connaissez forcément en tant que guitariste de Johnny Hallyday ou de Trust. Désormais, il faudra compter sur sa carrière solo car le sympathique gratteux sort enfin son premier opus en solitaire. Pour l’occasion, il nous abreuve d’un rock festif, sans prise de tête mais joué à la perfection. De quoi nous donner envie de lui poser moult questions sur la gestation du disque mais également prendre quelques nouvelles de Trust…

Nono sort aujourd’hui. Dans quel état d’esprit es-tu au moment de passer le disque à ton public ?
Norbert Krief : Heureux, soulagé et vraiment heureux ! On compare toujours cela à un accouchement, faire un album c'est comme faire un bébé, d'abord on le rêve, on l'imagine, puis il y a la gestation et la conception qui peut être plus ou moins longue, et enfin la naissance et donc la délivrance ! Surtout dans mon cas ou cela fait des années que j'y pense et que je l'annonce, donc je me sens vraiment délivré, heureux et fier de mon bébé !

Comment expliques-tu le fait qu’il a fallu attendre plus de trente ans pour qu’un album solo sous ton nom voie le jour ?

N. K. : Trente ans… non, il y a trente ans j'étais encore à fond dans l'aventure Trust qui a duré une dizaine d'années, puis j'ai enchaîné presque huit années avec Johnny où on se laisse glisser par le confort et le plaisir d'y être, ensuite je suis parti durant deux ans sur un autre projet, "Touch", signé par EMI et produit par Ruppert Hine, après ça, Trust à nouveau… Et des tas d'autres collaborations avec beaucoup d'artistes de tous bords et univers musicaux différents, tel Chris Spedding avec qui je suis parti en tournée et tant d'autres, jusqu'à même passer presque une année en Allemagne à tourner avec une star nationale "Howard Carpendale", chanteur de variété pop… En fait j'ai eu la chance extraordinaire de n'avoir jamais cessé de faire de la musique depuis plus de trente ans. Donc j'ai toujours repoussé et mis en stand-by mon projet perso. J'ai toujours trouvé plus intéressant et enrichissant de travailler avec les autres. Cela dit, effectivement j'y pensais et je m'y préparais depuis longtemps, mais ce n'était pas primordial. D’ailleurs, à force de l'annoncer depuis quand même pas mal d'années, bon allez on va dire vingt ans - j'ai failli l'appeler "L'Arlésienne" - il a fallu que je m'y mette vraiment. Bref… aujourd'hui ça y est, il est là !

Quel aspect de ta personnalité ressort sur Nono qu’on ne pouvait entendre sur tes précédents projets ?
N. K. : Tous les précédents projets n'étaient pas vraiment personnels, j'étais une pièce ou un ingrédient parmi d'autres, il y avait un mélange de personnalités, d'influences et c'est ce qui est le plus intéressant dans la musique, les mélanges, le partage, l'échange, et lorsque c'est l'osmose et que la sauce prend, c'est un vrai plaisir. Lorsqu'il s'agit de faire un projet solo, c'est très égocentrique comme truc, il faut exprimer et assumer à 100% l'histoire. Là j'ai vraiment réalisé à 100% ce que je ressentais et avais envie de faire musicalement, en essayant de réunir un peu tous les styles de musique que j'aime et j'aime tous les styles de musique à partir du moment où la chanson ou la musique me touche, me procure des émotions ou me fait voyager. Donc cela n'a pas été simple au début car je pouvais m'éparpiller, mais j'ai décidé de garder le cap dans une direction très rock. Maintenant pour en revenir à l'aspect de ma personnalité qui ressort, c'est de toute évidence conditionné par mes influences et mon vécu, je ne saurais dire vraiment, ce qui est sûr c'est que je me suis fait plaisir, que j'ai d'abord pensé à être le premier satisfait et je me répète, à prendre du plaisir !

Qui t’a donné pour la première fois le surnom de Nono ?

N. K. : Bonne question car on ne me l'a jamais posée ! Cela ne peut-être que ma mère, mon père ou bien mes frères et sœurs, car on m'appelle ainsi depuis tout bébé, et cela perdure encore aujourd'hui, pour être tout à fait franc, je trouve qu'à mon âge cela fait plutôt nunuche et un peu niais… Mais bon c'est ainsi, je n'ai pas choisi.

Quand est-ce que les titres sur Nono ont été écrits ? Y en a-t-il qui remontent loin dans le temps ?
N. K. : Hormis Wavedream qui doit avoir plus de 20 ans, que je n'ai pas ré-enregistré et qui est sur l'album tel qu'il a été fait depuis, et Charter 68 qui doit avoir une dizaine d'années, tous les autres titres ont été composés et écrits entre l'été et Noël 2010, sauf la reprise de Canned Heat - On The Road Again - enregistré live en une heure pendant le mixage de l'album, je peux même donner la date exacte , c'était le lundi 28 mars.

Quel matos as-tu utilisé sur ce disque ?
N. K. : Surtout mes amplis Fender Prosonic, Tonemaster et Blues Junior, aussi mon préampli Steavens "Radioactivator", un peu de Bogner "Alchemist" et de DV Mark "Galiléo 15". En guitares, ma Fender strat "Nonocaster", ma Gretsch signature "G5135N", ma vieille télécaster 1963 et ma Gibson TV Model 1959, une guitare classique cordes nylon sans marque… une acoustique Taylor et un dobro Fender. Pas mal de pédales, j'adore la guitare branchée direct dans l'ampli, mais j'aime bien aussi les effets car je conçois la musique comme une peinture, il faut parfois ajouter des couleurs, diverses nuances de tons. Donc des pédales Line6, VisualSound, ma Wha Colorsound de 1969 (celle utilisé dans "l'Elite" 1er album de Trust), et pas mal d'autres, dont des boosters de marques différentes.

As-tu des projets de développement de nouveaux modèles de guitares signatures ?

N. K. : Oh là… j'ai été vraiment déjà gâté, j'ai développé mon premier modèle avec James Trussard en 1994 une Les Paul façon "Zeimatis" avec une table en métal gravé, puis une David Custom Shop élaboré avec David Glenn Bembananga en 1996, puis ma Fender "Nonocaster" en 1998, une Electro-acoustique KMG avec Manu Mignot en 2006, enfin ma Gretsch "G5135N" tout récemment, dont je suis humblement et modestement fier. Pour l'avenir, peut-être une guitare métal en collaboration avec Loïc Le Pape, on verra...


Quels sont tes trucs et astuces pour t’échauffer efficacement à la guitare, en particulier avant un concert ?
N. K. : Garder les mains chaudes est extrêmement important, donc pour ce faire, soit en jouant de la guitare, en faisant des exercices ou pas, soit en se passant les mains sous l'eau chaude, ou bien en portant des gants, l'essentiel est de ne pas avoir les mains froides. D'une part c'est très handicapant pour jouer, mais c'est dangereux car on peut se blesser, tendinites ou autres, j'en ai déjà fait les frais 2 fois à la main gauche : tendinite au petit doigt, ensuite une à l'index, je peux dire que c'est galère, très handicapant et surtout très très long à soigner. Donc prudence, bien se chauffer les mains et ne jamais travailler l'instrument jusqu'à en avoir mal aux doigts.

Tu as bossé avec énormément de musiciens au cours des trente-cinq dernières années. Quels ont été à tes yeux les trois plus importants et pourquoi ?
N. K. : Trois seulement ! C'est difficile… Tout d'abord, je vais dire mon groupe Trust, c'est de là que tout à commencé, et pas besoin d'expliquer pourquoi, ça a été très important, surtout la période avec le batteur Nicko Mac Brain (Iron Maiden) car grâce à son jeu, sa technique et son groove, il m'a fait progresser énormément rythmiquement. Ensuite, évidemment Johnny, puisque que j'ai enchaîné directement avec lui, pas besoin d'expliquer non plus pourquoi… cela me parait tellement évident, qu'on l’aime ou pas, il est et restera à jamais un immense artiste, une personne exceptionnelle de talent, de charisme et de générosité, il ne m'a apporté que du bonheur professionnellement, musicalement et humainement. Il n'a d'ailleurs jamais rompu les liens entre nous à ce jour. Ensuite c'est difficile, je dirais Chris Spedding que j'ai accompagné quelques temps en tournée, trop génial ! Poppa Chubby, Catherine Ringer, même si cela a été court, ce fut de grands moments pour moi, et tous les autres ex aequo pour ne froisser personne.
Mais si je peux me permettre, ceux qui sont à mes yeux les plus importants, ce sont ces musiciens d'aujourd'hui, ceux de mon groupe, ceux avec qui j'ai fait l'album et avec qui nous allons tourner un peu partout dans le monde, car l'album est sorti dans de très nombreux pays et a été fait en anglais pour cela. J'aimerais donc vous les présenter s'il vous plait : à la guitare et au chant Pat Llabéria, à la basse et au chant Sly Léon Combettes, à la batterie et au chant Jimmy Montout.

Quel avenir pour Trust ? Votre dernier communiqué était assez laconique et inquiétant pour vos fans…

N. K. : Si je peux rassurer les aficionados de Trust, tout va bien ! Trust est toujours vivant, simplement en stand-by, le temps que chacun réalise ses projets perso et en ce qui me concerne, cette année est dédiée au mien, puis en 2012, nous sommes sensés travailler sur un nouvel album bien rock, donc patience, chaque chose en son temps, merci !

Norbert Krief, enfin seul