La surprise. Quel que soit le sujet, y'a pas, c'est la surprise qui nous tient en éveil et nous fait sentir vivants. Quand tu vas voir et écouter Krazolta en live, tu te les prends en pleine face de rocker, tout se bouscule, chaque seconde est intense. Intense mec ! Tu ne veux pas que ça s'arrête, eux non plus d'ailleurs, ils vibrent, font corps avec leurs instruments, la scène, le public. C'est le retour aux sources, instinctif, bestial, brûlant. On sait tous que le monde est formaté, certains s'en débrouillent, d'autres s'en défendent et/ou se rebellent, Krazolta font comme ils le sentent, point barre. Mais comme le dit si bien Guillaume Sciota, cela n'est possible que parce que chacun des zicos "est à l'aise avec ce qu'il joue...". L'interview est longue, mais riche et absolument passionnante ! A dire vrai, je discuterais bien pendant des heures avec lui, une bonne bouteille de vin sur la table, comme j'écoute LINK en boucle... Et là, sans surprises en revanche, on répète : "Bougez-vous, sortez les découvrir en concert !!"

Hola Guillaume ! Heureuse de recevoir Krazolta sur la [Scène Ouverte], groupe qui transpire l’anticonformisme jusqu’au bout des cordes. Veux-tu bien lever un peu le voile du mystère qui règne depuis sa création en 2015 et qui s’est répandu jusqu’au Pérou ? (Cf. le documentaire, mais nous y reviendrons). Une formation qui peut passer de 3 à 8 musiciens, jamais un même concert, vous ne faites rien comme tout le monde… Bref, qui êtes-vous ?!!
Krazolta c’est une idée assez simple au final. J’aime provoquer l’accident en concert, en studio, donc je dirais qu’il s’agit d’un groupe de Rock accidentel.

Le mieux, c’est de l’écouter, on est tous d’accord, mais avec quels mots définirais-tu ta musique ? Quelles sont tes influences ? Du rock au sens large, mais surtout au sens pur…
Oui effectivement, c’est important cette remarque. Idéalement, il faudrait nous écouter sur disque et en live, car j’aime cette forme de rock, de musique en général, qui existe sous deux approches bien distinctes : l’album et le travail en studio, puis le live pour le public. Je dirais que dans ce registre, mes deux principaux maîtres à penser sont Hendrix et les Stones. La différence de jeu et d’interprétation entre un ‘Sympathy’ ou un ‘Midnight Ramblers’ pour les Stones sur ‘Beggars Banquet‘ ou ‘Let It Bleed‘ et le live des tournées qui ont suivi (1969/74) sur “Get Yer Ya Yas Out“, par exemple, est juste stupéfiant. Surtout à ce moment-là où les Stones inventent sans le savoir quasiment toute une branche du rock qui ira jusqu’au Garage Rock.

Hendrix quant à lui va encore plus loin. Il réinvente aussi les codes de la pop et du rock en studio et apporte un raffinement exquis à ses compositions, mais assène une brutalité, une énergie et un son tellurique, quasi sismique en live, le tout sur les mêmes compositions.
Il faut se dire une chose, c’est que cela demande aux musiciens d’être parfaitement à l’aise avec ce qu’ils jouent, avec leur instrument et laisser libre cours à leurs émotions. Cela n’est possible qu’en réunissant tout cela. J’ai la chance d’évoluer dans Krazolta autour de musiciens hors pair. J’insiste sur ce point car il est au centre de notre univers. J’irais même jusqu’à dire que c’est ce qui nous différencie de beaucoup d’autres groupes qui vont chercher à reproduire un schéma, une recette ou un set. On y est habitués dans la pop, la variété, mais dans le rock on le voit beaucoup… Cela m’inquiète un peu. Il n’est pas rare que l’on croise, et je pense que sur ce point tu ne me contrediras pas, des groupes de jeunes musiciens de 20 ans qui récitent leur set, le tout encadré par une SMAC avec le tampon PEPINIERE sur le dessus du paquet.
Le clash lors des confrontations avec des groupes anglo-saxons du même âge est souvent violent, car eux la plupart du temps n’ont pas une approche de mimétisme face aux codes du rock.

J’aimerais un jour pouvoir dire que Krazolta a réussi à se glisser dans la même famille de musiciens. C’est totalement dingue de dire ça et évidemment les gens se disent : non mais il a un melon le type !!

Alors là, c’est intéressant. Tu as enregistré au Studio Berduquet en tout analogique sur console Neve, magnétos à bande, etc. avec… tada … Clive Martin ! Trouver un studio équipé est une chose, mais rencontrer le réal prêt à retravailler de cette façon en est une autre, cela a-t-il été aisé ?
Eh bien comme souvent, il s’agit de rencontres. Nous avions enregistré avec RDV mon ancien combo un album (Remain Silent) chez Serge Deuerling au Studio Berduquet (Cénac-33). La console était déjà là. Mais petit à petit, il a équipé le studio en full analog, magnéto 24 pistes pour les prises, un Ampex 2 pistes pour le mixage.

Je voulais depuis longtemps revenir à cela mais dans de bonnes conditions. L’ingénieur du son avec qui nous devions faire Link a perdu la moitié de son audition un mois avant l’enregistrement. J’étais évidemment désolé et à la fois perdu. J’allais annuler les sessions quand Kriss m’a conseillé d’attendre et de trouver une solution. C’est en discutant avec Nicolas Bonnière et Romain Humeau à qui je prêtais du matériel en studio, qu’ils m’ont conseillé d’appeler Clive Martin. Je me disais qu’ils rêvaient et que non seulement le projet pourrait ne pas lui plaire, mais surtout que nous n’avions peut-être pas les moyens. Au final, Clive était emballé à l’idée de retravailler sur magnéto à 100 %. Depuis, nous sommes devenus amis et j’ai même lancé des formations sur les techniques d’enregistrement analogique au studio en sa compagnie.


Ça peut sembler une évidence pour certains, néanmoins, pourquoi ce choix ? On est loin de tomber dans la facilité…
Ce choix est en fait au centre de la création même. Il ne s’agit pas d’un effet de mode ou d’une vue de l’esprit. Je ne vais pas m’étendre ici sur les qualités intrinsèques de l’enregistrement et de l’écoute analogique. Au final, il est question de vibrations. Au moment de jouer, d’enregistrer, au moment de mixer et à l’écoute sur le vinyle, la vibration est respectée. Elle n’est pas redécoupée en digit, encodée en zéro, en un, refourguée à l’auditeur sous la forme d’un escalier dont on fait évoluer la taille des marches tous les 10 ans environ.

La plupart des groupes à la recherche du son, de l’impact sonore et d’une profondeur enregistrent sur bande. Dans le rock évidemment, mais aussi dans la soul, l’électro même. Daft Punk, pour obtenir le son plus ample possible (Random Access Memories), a fait tous ses records sur bande. En France, on reste assez en retard sur ces questions de productions bien évidemment, les studios anglais ou américains utilisent plus régulièrement ce matériel.
Niveau facilité, je dirais que pour nous musiciens, c’est plus naturel d’enregistrer sur bande. On doit donner une émotion et elle est captée. On la garde ou on la jette. On la garde ? On passe à autre chose.
Le gros du travail est surtout pour l’ingé qui, lui, redevient un Sound Producer. Avec l’analog, la main de l’ingé son façonne et provoque une patte. Sur le digital, la mainmise d’un seul logiciel (Pro Tools) sur le monde entier a standardisé les productions. Avec du recul, ça parait complètement dingue que le monde soi-disant de la liberté et de la création - la musique - s’en remette à un seul maître. Que vous fassiez du jazz, du rock, du classique de la variété, 90 % des prods mondiales passent dans Pro Tools.

Mais vous savez, les gens se rendent compte que quelque chose d’uniforme se passe dans leur radio, ils ne peuvent pas l’expliquer, mais ils sentent bien quand on discute avec beaucoup de personnes juste mélomanes, qu’il y a un ras-le-bol de la monotonie des artistes ou du son qu’on leur impose sur les radios, TV...

Comment et dans quel état d’esprit se sont déroulées les séances pour toi (ce sont tes morceaux quand même !), Clive et les nombreux musiciens participants (dont ce serait cool de dire un mot si tu veux) ?
Dans la plus grande décontraction ! Demande à Clive, ahahah ! Sans rire, les moments de repas notamment sont très importants, je soigne particulièrement le catering et le choix des vins. Mais sinon, côté musique, je prépare énormément les séances en amont. D’abord parce qu’on paye le studio à la journée ! Et puis parce que je sais ce que je veux. Mais je me laisse toujours 30 % de non abouti à finir. Disons que je détermine en gros les lignes directrices et après, je laisse la place à l’imprévu, l’interprétation, la surprise. C’est en côtoyant de grands musiciens que cela reste possible. Je voulais assurer la base de beaucoup de morceaux. J’avais mon idée de l’atmosphère exacte que je voulais dégager. Je joue à la batterie sur beaucoup de titres de LINK, mais sur d’autres, je souhaitais des nuances et un jeu différents. Paul Magne, un vieil ami (Metisolea, Willows, Cocoon) joue sur Pacifista et Last Escape car il a une sensibilité de jeu plus délicate que moi. C’était cela que je voulais sur ces titres qui diffèrent de mon traditionnel univers de batteur définitivement plus rock. Romain Arnault (Wizard) joue Fishing Birds, mais surtout sur scène avec nous car il est le meilleur batteur de rock de la place tout simplement !

A la basse, Jean Rollet Gérard est un ovni. On se connait depuis presque 20 ans, mais lui étant sur Paris on n’avait jamais trouvé le temps de faire un projet ensemble. Et voilà que cela a été possible avec Krazolta. Franchement, pour ceux qui nous ont vus sur scène, ils comprennent de quoi je parle. Il y a une osmose et un mojo assez incroyable ensemble.
Kriss est le vrai compagnon de route depuis RDV en 2007 et via nos activités croisées (Maximum Tour Music), nous partageons la scène ensemble depuis longtemps. L’idée entre nous est toujours de coller à l’esprit des grattes de Richards/Mick Taylor. Le genre de questions-réponses complémentaires.
Pas mal de proches bien sûr aussi, Denis Barthe et Farès, mon meilleur ami, sur Expected Lines, mes landais préférés !

La section cuivres est assez dingue aussi : Franck Vogler, Giordano Muto, Simon Mestres et Lucas St Cricq. Là, tu as devant toi des tueurs. Lucas, par exemple, envoie le solo de Last Escape en une prise. Il avait fait de même pour le solo de Swear sur Remain Silent. D’ailleurs, beaucoup de parties ont été enregistrées en une prise sur Link.
Emilie Moutet est aussi une sacrée rencontre. Sa voix est envoûtante et depuis longtemps je voulais l’associer à mon projet. Elle chante énormément sur l’album et donne cette clarté, cette pureté dans les chœurs souvent. Nous avons un duo, M. President, qui a énormément plu. J’en ai écrit un nouveau, Rose Petals, qui sera sur le prochain EP maxi 45 tours prévu dans un mois ! Héhé ! Double teasing ! Car j’ai secrètement le rêve de monter un hommage Baez/Dylan avec elle sur une ou deux dates pas plus. Mais bon… pas le temps de tout faire !

Au clavier, un maître du genre et vieux pote a assuré toutes les parties : Julien Grenier. Rhodes, Hammond B3, Clavinet, piano acoustique, il est aujourd’hui un gros réalisateur sur la place parisienne. Gros talent.

Niveau accident, j’avais convié 4 amis chiliens (Rumba De Calle) afin de travailler sur la 2ème partie de Pacifista. Deux frères incroyables, Reinaldo et Gonzalo Tavilo, Jesus Alarcon et Jose. Ils sont arrivés à la bourre, on avait juste quelques heures. Ils ont monté le matériel, le pianiste avait même oublié son piano sur le bord de la route avant d’arriver (véridique) !! On a répété une demi-heure tous ensemble dans la même pièce, on est remontés en cabine pour discuter avec Clive sur la façon de faire les prises. Il a dit  “c’est bon j’ai tout”.
On a écouté, il nous avait enregistrés et on a tout gardé !! Encore une fois, ce qui comptait, c’était l’émotion, la première intention. D’ailleurs, on a sur la bande plus de 10 mn de plus d’impro géniale. A voir pour les futures rééditions. Ahaha !

D’autres invités sont venus aussi : mon ami Sylvain Caro, excellent photographe du groupe, mais aussi musicien et harmoniciste hors pair (M.President) et Thomas Laborde, ancien camarade de Guitarshop, fan de Ben Harper, qui excelle dans le steel guitar. Il est au Weissenborn (M.President) et sur un Lap Steel Rickenbacker des 50’s sur More Moses.

Ecouter “Link“ sur CD –comme moi, argh– est un non-sens absolu. A ton avis, pourquoi ce retour en force du vinyle, serait-ce une énième tendance lancée par un modèle économique qu’on nous “oblige“ à suivre, ou un réel désir de part et d’autre de retrouver cette authenticité perdue, que l’on constate dans beaucoup d’autres domaines d’ailleurs ?
Le retour en force du vinyle est un mouvement mondial d’un point de vue économique. Un million de pièces en 2005, 10 millions en 2010 aux USA. Le phénomène est simple. La génération de mélomanes des 70’s et 80’s à qui on a vendu du rêve avec le CD dans les années 90, puis le MP3 dans les années 2000 est toujours à la recherche de sa jeunesse, d’objets, de collectors, de souvenirs, garder un objet ou une trace des artistes que l’on a aimés, nos idoles. Pour une grande part, le chiffre concerne les rééditions de grands best sellers. Les Stones, Les Beatles, les retirages en France des catalogues de Johnny, Gainsbourg, etc. La part de nouveauté est minime. Si on analyse cela d’un point de vue plus large, il s’agit bien d’un transfert des achats physiques du CD vers le vinyle.
Mais au-delà de ce phénomène, les majors ont compris qu’il y avait quelque chose à gagner là où elles n’ont toujours pas trouvé de modèle économique viable dans le tout digital et dématérialisé.
Et c’est là que le bât blesse. Dans l’immense majorité (plus de 90 %), les vinyles sont fabriqués à partir d’un fichier digital, un master qualité CD voire parfois en dessous… En réalité le client, et donc l’auditeur, est trompé et les dirigeants de label le savent pertinemment puisqu’ils entretiennent le flou à ce sujet.

Il faut distinguer deux cas de figures : le retirage et la création.
Pour un groupe qui crée un album et enregistre sur Pro Tools en 2018, il va masteriser en 44100Hz, 16bits pour la fabrication du CD et les plateformes digitales.
Pour le vinyle, dans la plupart des cas, l’usine prendra le même master sur lequel elle baissera les gains de plusieurs dB afin de fabriquer une version LP. C’est une étape marketing importante pour l’économie des groupes car le rapport marge/produit vendu est bon. Le vinyle se vend plus cher. Mais d’un point de vue pragmatique, il n’y a quasiment aucune différence de son si ce n’est le plaisir de le poser sur une platine.

Dans de rares cas, un master haute définition est proposé par le studio de mastering (en 48000Hz, 24bits). Là, il peut y avoir un intérêt relatif puisque la version écoutable est supérieure au CD. Je précise qu’il faut à la base un groupe “concerné “ par le son pour en arriver là. Aucune maison de disques, aucun label au monde ne vous le proposera. Ce sont des coûts supplémentaires que personne ne souhaite engager.

Et puis il y a le retirage. C’est carrément là qu’on rentre dans du délire. Il faut savoir que l’intégralité des albums mondiaux commercialisés des années 1950 à environ 1990 ont été au départ enregistrés et mixés sur bandes (quelques DAT diront pour certains fin des 80’s).
Les maisons de disques propriétaires des bandes dans le passé, lors d’une réédition, faisaient rappeler les masters originaux (sur bande) en studio et on procédait à un nouveau tirage. Cela a par exemple été le cas lors du changement de standard LP vers VD au début des années 90. Mais lorsque le vinyle est revenu à la mode à la fin des années 2000, la plupart n’ont pas cherché bien loin et ont fait rééditer tous leur back catalogue depuis les masters CD. C’est le cas par exemple de la grosse campagne qu’a lancée Universal à la fin de l’année dernière afin d'approvisionner les FNAC et Cultura en albums à 10 € en bout de gondole.

On est dans le marketing le plus cynique : vous en voulez ? On va vous en donner.
Attention, d’irréductibles continuent de travailler en recherchant les masters originaux sur bandes et proposent des tirages de qualité incroyable. Patrice Caix avec Audio Analog Distribution en France est un revendeur averti d’ailleurs. Il sélectionne ce genre de catalogue souvent venu des Etats-Unis ou d’Allemagne.
Et côté création, non ! Krazolta n’est pas le seul groupe à enregistrer, mixer sur bandes et ensuite à graver les laques qui servent de matrices à la fabrication des LP depuis les bandes. D’autres le font. C’est confidentiel, mais en Hollande LullaBye Factory est un label 100 % analog. Ils assurent leur boulot de label et disposent d’un studio d’enregistrement. Le modèle original des grands labels historiques : Stax, Motown, Sun, Chess...

A Bordeaux, Datcha Mandala nous a emboîté le pas récemment. En Angleterre et aux USA, cela n’a jamais arrêté. C’est normal, le marché et l’économie du disque y sont plus développés.
Jack White à Nashville et Dave Grohl à Los Angeles sont de gros porte-voix du maintien de l’analog dans les studios. Mais au final et au-delà des aspects techniques, la chose la plus importante reste la sensation, au niveau du jeu et de l’enregistrement, puis au mixage, et enfin à l’écoute chez soi. L’effet produit est incomparable. Posez la question à tous les musiciens qui ont eu l’occasion de se remettre en condition d’enregistrement 100 % analog, ils vous diront tous la même chose. Le son, l’émotion.

Côté guitares, amplis, effets, quel matériel a été utilisé ? Tu sauras parler de tes “machines à riffs “ j’en suis sûre, et peut-être même donner quelques trucs et astuces que tu utilises, mmm ?
Ahahah ! Oui effectivement, même si pour l’enregistrement de Link je l’ai peu utilisée (la SG Standard de 76) : sur le solo final de “Emptiness” et les riffs doublés de ‘Fishing Birds’.
Non, la grosse nouveauté pour moi, ça a été de changer de guitare principale. Je suis un gros fan de Strat. Bien sûr j’en ai deux, une Rory Gallagher du Custom Shop et une Originale de 69.

J’avais lu un article dans lequel John Frusciante expliquait qu’il était arrivé à un point où il se répétait musicalement, principalement à cause du fait qu’il ne jouait presque qu’exclusivement sur ses deux Strat et Tele. On a nos repères et nos habitudes. Et du coup, pour ce nouvel album (à l’époque dans l’interview) il a pris sa guitare la plus dure à jouer, la moins évidente, la plus déséquilibrée aussi : une Yamaha SG1000. Couleur pas jojo, elle plombe, mais elle sonne. Il est parti musicalement sur plein de choses qu’il n’avait pas l’habitude de faire.
En gros, il m’est arrivé la même chose. Je joue à 90 % sur l’album sur ma ES-335 Luther Dickinson équipée de P90. J’avais revendu une ES330 car elle feedbackait trop (nous jouons... un peu fort). Mais la 335 dispose d’une poutre. Je rêvais qu’un jour celle du guitariste des Black Crowes sorte. Et ça été le cas ! J’ai sauté sur l’occase.
J’ai utilisé ma Tele en Open sur “More Moses” et “Four Reasons”. C’est une Japan de 89. Ma première guitare achetée quand j’avais 18 ans avec ma première paye… J’ai juste monté des Antiquity 53, mais tout est d’origine.
L’acoustique sur M.President a été faite avec une vieille Yamaha ”FG” Red Label de 67 qu’un ami m’a prêtée. Elle sonne énorme ! J’adore. J’ai une Ibanez Concord dans le même genre début 70’s.

Et les amplis... oulaaaaa y’en a !! Je suis un taré d’amplis. J’ai un site d’ailleurs...
Mais de base je suis Fender, donc j’ai joué beaucoup le Bassman 1968 Silverface (50w), et un petit Champ de 79 que César Diaz a conçu (c’est le seul avec 2ème canal saturé et reverb + HP JBL !).
Mon Hiwatt bien sûr, un DR103 de 1976. Mon premier ampli aussi, acheté à 18 ans ! Deuxième paye ! Bim !! Ahahah.
Une cabine Showman de 1962 avec un HP 18”. Je l’ai utilisée avec mon Fender VI sur le titre “Fishing Birds”.
Beaucoup d’effets aussi : Space Echo RE-201 et 301. La RE-150 au mix aussi.
En pédales guitare, la Klon Centaure gold et silver. Incomparable. Mais beaucoup de crunch à l’ampli.
Pour le solo destroy de Fidhing Bird, je jouais dans la leslie du Hammond… C’est celle du studio. Bon, depuis j’en ai une !

Pas de clip chez Krazolta, mais un documentaire qui m’a tenue l’été dernier, à voir et revoir ! De l’humour et de la dérision, certes, mais voulais-tu faire passer des messages, éveiller des consciences en quelque sorte ?
Non les clips... c’est par contestation en fait.
Tout le monde demande des clips pour écouter un titre ? Sinon pas d’écoute ? Bon. On n’en fera pas. Ou pas encore. Pas n’importe comment en fait.
Franchement, je suis un fan absolu de cinéma bien sûr et d’humour au cinéma. Et tout le monde a capté que je voulais rendre hommage à Spinal Tap mais aussi à Dig ! qui est pour le coup un vrai docu. En réalité, c’est ma manière aussi de dire à tous les gens qui le regardent : “Mec, on fait que de la musique”. Ou alors : “Voilà ce que c’est un groupe de Rock en 2018 en France”.
Et puis surtout, se marrer. C’est trop important la vie pour ne pas prendre le temps de se marrer dès qu’on peut. Trop de personnes dans la musique se prennent au sérieux… Et ce n’est pas un problème de niveau ou de notoriété. On retrouve cela partout, à tous les niveaux. Après, on n’est pas non plus un groupe de reprises de Patrick Sébastien, mais je veux parler de l’humeur et surtout de son regard par rapport à son art. Il faut du recul.

Pas un concert de Krazolta ne ressemble à un autre paraît-il. Le mien aura été celui enneigé du Bus Palladium à Paris le 9 février dernier. Wow, habité tu es, habités vous étiez tous les 4 d’ailleurs ! A l’heure où l’on parle de travailler la scène, son image, sa set-list, comment toi, appréhendes-tu cette partie et les répétitions, d’autant que ce ne sont pas toujours les mêmes musiciens ?
Alors ça c’est une grande question... Aujourd’hui, les groupes choisis passent une semaine en résidence dans une belle SMAC à peaufiner les lumières à tel ou tel moment. Ils font venir des scénographes pour donner vie à leur spectacle. Ils font intervenir un styliste pour se donner un univers plutôt bohème mais cool/New York tu vois. Et puis le groupe se pointe, et là… dans le meilleur des cas, on voit un concert sympa.
Je ne sais pas… Je ne crois pas que la méthode qui consiste à préparer un groupe très jeune à ne jouer que dans un certain confort de configuration de scène soit la bonne. Je viens d’une génération qui pensait pouvoir décrocher une première partie de groupes US ou UK pour voir des groupes meilleurs et essayer de comprendre ce qui nous manquait.

Mais au final les chansons… C’est ce qui restera à jamais primordial : LES CHANSONS ! L’importance de la composition est franchement le seul sujet pour moi qui mérite de prendre tout ce temps. Et beaucoup, beaucoup de groupes et d’artistes sont amenés trop vite à un niveau où les chansons ne suivent pas. Quand on y réfléchit, c’est normal que tout ce système franco-français de pépinières n’aboutisse pas à grand-chose, puisque le principal est oublié : le contenu.
Les personnes qui entourent sont souvent de très bonnes équipes techniques. Nous avons de brillants techniciens. Et du coup, nous préparons techniquement des groupes. Mais c’est à peu près tout. Pourtant tout y est : l’attitude, les tenues, même leur logo, t’as vu, est sympa !
Pour Krazolta… Oufff bon là, c’est très différent. On se positionne à la marge. Hors circuit. Aucun show n’est le même parce que la priorité c’est l’humeur, l’instant, le public aussi.

Ne pas respecter de règles préétablies. Et puis nous, il y a des soirs où nous sommes tous en phase et on ne veut pas que ça s’arrête. Et là, ça peut durer ! On joue régulièrement 2h30, mais ce n’est pas rare de nous voir dérouler 3 heures… La dernière date en mai : 3h35. On reste juste dans la tradition des styles musicaux qui nous anime : la musique du début des 70’s qui laissait la part belle à l’imprévu, l’improvisation, la communion avec le public aussi. Et puis parfois, on n’est pas bons. On abrège pour respecter le public. Ahahah !!
Mais à l’heure actuelle, moi qui suis grand amateur de concerts, je ne vois plus du tout ça. Ou alors très très rarement. Beaucoup de groupes que j’adore ont à un moment un set calibré. Le calibre festival, le calibre club… c’est dommage.
Et donc pour répondre à ta deuxième question, on répète... jamais !! Ou quasiment...

Quels sont les actus et projets ? Que nous réserves-tu ?!
Ah oui ! Nous préparons plusieurs surprises. D’abord mi août, nous serons sur la route aux fêtes de Dax et Montalivet et probablement de retour sur le Ferret... pas loin de ces dates-là ;-)
Ensuite, la sortie surprise de notre prochain Maxi 45 tours Prema Song (eh oui !) avec 3 inédits + le DVD du documentaire et ses bonus. Je peux juste dire que ça sera fin juin/ juillet, concert avec peu de tickets disponibles, qui incluront le disque, le concert, un DJ set et... un petit tour… Ah ! A suivre !

Tu as de nombreuses autres activités extrêmement prenantes, et à tant t’occuper des autres, t’es-tu fait une idée sur le développement de Krazolta ?
Franchement, Krazolta va là où le vent le pousse. Ma priorité reste la même : enregistrer les meilleures chansons possibles, avoir le son que j’aime, et jouer !
Le tout, sans manager et sans attaché de presse ! Ahahahah !!

Autre chose qui n’a rien à voir, mais quand même un peu si ! En préparant cette [Scène Ouverte], j’ai trouvé une interview où toi et Romain Humeau parliez du Collectif “Des liens“ que, je l’avoue, je ne connaissais pas, initié par Dominique A. Tu veux bien nous dire un mot de cette initiative, belle mais ardue ?
Oui bien sûr. Dominique et Romain, lors d’un passage en commun à l’antenne de Didier Varrod sur France Inter en 2016, ont lancé le projet. Dominique voulait fédérer les artistes autour d’une idée simple : rompre les barrières de la culture et l’amener partout où l’on n’y a plus accès. Le sujet étant large, chacun des artistes concernés est revenu dans sa région d’origine et a proposé quelque chose. C’était libre. Romain m’a appelé et nous avons lancé “Des Liens“ Bordeaux avec Itsablast, Galerie Lafaillite, Krazolta Et Makja.

Kalam (Makjam) a eu un rôle déterminant car il avait une expertise sur ces questions là.
Nous avons grâce à lui contacté Culture Du Coeur et construit le projet de l’année dernière qui s’est déroulé en 2 temps : des concerts acoustiques dans des structures accueillant des publics en difficultés et une grande soirée type festival dans une salle de concert.
Tout a fonctionné à merveille et nous avons déplacé énormément de public en difficultés. On parle de tous types de difficultés (handicap, isolement, étranger en attente de papier, marginaux, toxicomanes, etc.).
Nous devions travailler sur une deuxième édition, mais avec la nouvelle loi abolissant les contrats aidés, Culture Du Coeur est menacé. Nous avons donc monté un dossier pour essayer de les aider à pérenniser un emploi au sein de leur structure.

Pas de question, la voie est libre pour dire et ajouter ce que tu veux. Tu peux te lâcher et même te rouler par terre comme sur scène !
Une seule chose à dire : ALLEZ VOIR DES CONCERTS ! Partout ! Dans les bars, les clubs, les restos, les parkings ! Partout autour de chez vous ! N’attendez pas d’aller une fois par an au Hellfest. Le plus important ce sont les 362 autres jours de l’année. Et surtout merci Maritta pour l’invitation !

Dates de concerts :
Juin/Juillet : Release Party Surprise New Maxi 45T : PREMA SONG (Bordeaux)
12/08 : Rock The Boat Vol.5 Piraillan (33)
14/08: Fêtes de Dax (40)
15/08: Fêtes de Montalivet - Euronat (33)

Liens Internet :
http://krazolta.wixsite.com/krazolta
www.facebook.com/Krazolta-520370581461273/
https://krazolta.bandcamp.com/releases
https://des-liens.com/

Cette rubrique est aussi la vôtre, alors n'hésitez pas à envoyer vos productions pour être interviewé par Maritta Calvez à maritta[a]guitariste.com (remplacez le [a] par @).

[Scène Ouverte] Krazolta - Link