Red Beans & Pepper Sauce, rien que le nom régale en entrée et avec ça, il eût été de mauvais goût de présenter une galette insipide. Impeccable, leur Red composé de 10 titres se savoure de tout son long pour les puristes du genre classic rock épicé de blues. Tout y est, l'énergie, la puissance, la maîtrise et le feeling indispensable, avec en prime la voix enflammée, groove et sensuelle de Jessyka. Ce groupe Héraultais haut en couleurs -rouge, pour ceux qui suivent- manie aussi bien les instruments que la conduite complète de son projet. Tout est question d'organisation et à ce jeu, Laurent Galichon a tout l'air d'être parfaitement rôdé. Ils ont réussi à sortir de leur région, tournent même à l'étranger, sont venus et reviennent en région parisienne, il nous manque une belle date à la capitale qui ne saurait tarder, espérons-le. Paris brûle de recevoir Red Beans & Pepper Sauce !

Depuis sa création en 2010, il y a eu du chemin –et de la route !- pour Red Beans & Pepper Sauce. Pouvez-vous nous relater un peu son histoire et son évolution ? Mettez-y du soleil de votre région !
Laurent : Au début, comme beaucoup de groupes, on tournait dans notre région sans vraiment réussir à en sortir jusqu’à ce que plusieurs membres du collectif Des Radios Blues nous remarquent avec notre deuxième album sorti en 2012. Ils ont commencé à nous diffuser, à nous inviter dans leurs émissions et même carrément à nous pousser à participer à des tremplins. Et en 2013, le tremplin du Cahors Blues Festival a été un tournant pour le groupe. Nous y avons gagné 4 des 7 prix mis en jeu et à partir de là quelques festivals ont commencé à nous suivre et à nous programmer. En 2014, le line up a changé et notre musique a pris un virage plus rock, même si les racines blues sont toujours là. L’arrivé de Niko Sarran, qui produit nos albums en plus de jouer à la batterie, a aussi donné un coup de boost à la qualité de nos productions. Elles ont maintenant plus de personnalité et une vraie direction artistique. Pour ce qui est de notre région et de ce qu’elle représente dans notre musique, je crois que nous avons, en tant que méditerranéens, beaucoup de points communs avec la Nouvelle Orléans. Le sud, la chaleur, la mer et surtout, en étant tourné vers l’Afrique du Nord, à mi-chemin de l’Espagne et de l’Italie, un goût prononcé pour le mélange des cultures. Notre nom vient de là-bas et ce n’est pas par hasard. En quatre albums, nous avons parfois mélangé nos racines blues avec beaucoup d’influences diverses : classic rock, soul, jazz, world, reggae, etc.

Le mieux, c’est de l’écouter, on est tous d’accord, mais avec quels mots définiriez-vous votre musique ? Quelles sont vos influences à chacun qui nécessairement se complètent ?
Dans ce nouvel album, nous sommes clairement allés chercher du côté de nos influences classic rock, et celui qui vient du blues bien sûr. Cette volonté de partir du blues pour en faire autre chose de plus large, de plus heavy, vient des 60’s quand de jeunes anglais, des Stones à Zeppelin en passant par Deep Purple, ont commencé à créer quelque chose de nouveau à partir de l’héritage des bluesmen américains. Mais cette musique n’est pas restée figée dans ses propres clichés. Dès le début, l’expérimentation a fait partie intégrante de ce courant. Hendrix a tenté beaucoup de choses en mélangeant ses racines blues avec des influences rock, pop ou soul. Deep Purple y a mélangé des harmonies classiques, Led Zep a révolutionné le travail en studio. Et aujourd’hui encore, Derek Trucks, Jeff Beck ou Gary Clark Jr mélangent leurs guitares avec des influences world, électro ou Hip Hop. Au final, on part du blues et on y mélange tout ce que la vie nous apporte comme rencontres, comme influences.

Qui fait quoi ? Comment s’organise votre travail de compo, d’écriture, de réalisation ?
J’écris et enregistre les musiques dans mon home-studio. Je joue guitare, basse et batterie avec parfois des claviers programmés et parfois même ma voix. Puis chaque musicien va remplacer mes parties par les siennes et c’est comme ça que le groupe transforme et réarrange ce que j’ai écrit. Parfois c’est très proche du matériau de base et parfois ça s’éloigne. Pour les parties vocales, c’est plutôt un travail de co-écriture avec Jessyka Aké, on travaille ensemble des idées de mélodie, on tente des choses puis on enregistre. Les textes sont écrits maintenant en majorité par Serge Auzier, le clavier du groupe. Parfois avant d’écrire la musique, parfois après. Et quand tout ça est terminé, je refais en général toutes mes parties guitare pour m’adapter aux différents changements que les musiciens ont pu amener sur les titres. C’est là qu’on travaille la prise de son, les superpositions de pistes de guitare. Parfois, je double mes parties sur des amplis différents, des guitares différentes, parfois je joue plusieurs amplis en même temps, etc. Et pour finir, tout ça est retravaillé, tordu, cuisiné, par Niko qui réalise également le mastering pour garder la main sur tout le processus de création.

C’est votre 4ème album si je ne me trompe pas (Le Gardien en 2010 – Who made the Sauce en 2012 – Hot & Spicy en 2015 et enfin Red sorti en septembre 2017), sans compter les EP et DVD. Toujours en autoproduction, où et dans quelles conditions a-t-il été enregistré ?
Tous les enregistrements se font dans nos home-studios respectifs. On est tous équipé pour pouvoir le faire et le travail d’arrangement dont je parlais précédemment s’étale sur plusieurs mois. Cela dit, au moment des prises finales, les batteries, guitares et voix sont réalisées au studio de Niko Sarran qui est le plus équipé pour la prise de son acoustique. On passe quelques jours sur le chant et quelques jours sur les guitares.

Quand on vous écoute, on se dit que vous êtes sûrement des furieux de matos ! Quels guitares, amplis, effets utilisez-vous en studio et/ou sur scène ? Comment vous les appropriez-vous ?
Sur scène j’utilise une Les Paul des années 2000 que j’ai customisée avec des micros Lollar Low Wind inspirés des PAF des vieilles 335. J’ai fait un changement des valeurs de condos et un changement du câblage pour passer du “moderne“ au “50’s “. Le but était de se rapprocher des premières Les Paul de la fin des 50’s et de s’éloigner de celles des 90’s. J’utilise également un dobro électrique, un truc assez bas de gamme en fait mais qui sonne super !! J’en ai aussi un acoustique pour le studio. Mais ma guitare de prédilection reste la Strat. J’ai une John Mayer Olympic White Rosewood neck que j’adore avec ses frettes jumbo, ses 5 ressorts sur le vibrato et sa sonorité très “hendrixienne“ sur le micro manche.
En studio j’utilise également une Tele US mapple neck pour certains chorus comme celui de Sinkin’ Down. Le tout accordé en Eb, c’est un truc que j’ai gardé de l’époque où je jouais dans un tribute à Jimi Hendrix.
Côté ampli, je joue sur scène avec un Plextone 100W équipé de 4 G12H30. Il a été fait sur mesure au magasin Rockline à Toulouse par un gars qui connaissait les vieux plexi Marshall sur le bout des doigts et qui s’en inspirait pour faire ses propres amplis. En studio, je le couple avec un Fender super Reverb de 1968. C’est un silver face mais avec le circuit AB763 des black face 63’ que j’ai fini par trouver après de longues recherches. C’est un ampli mythique, il est vraiment fantastique et je l’utilise aussi parfois seul en studio pour des chorus ou certains sons clairs comme sur Flyin’ High. Pour les pédales j’ai une BB preamp, une Maxon OD808, une Fuzz Plextone fabriquée par celui qui a fait mon ampli et qu’on entend bien sur Black Panther, une wha RMC1, une Holygrail reverb, un trémolo, un echo et enfin un octaver.

Niko, en tant que batteur du groupe, est-il facile pour toi de prendre du recul quand vient le temps de la réalisation de l’album ?
Niko : Oui très facile, je suis bipolaire lol !
Plus sérieusement le travail du son commence dès le moment où je choisis la taille des fûts que je vais utiliser, le type de caisse claire, la façon de frapper, etc. Du coup la prise de son, le mixage et enfin le mastering ne sont que le prolongement de ce travail-là. Dans l’histoire de cette musique, il y a beaucoup d’exemples de musiciens qui ont été très impliqués dans la production et le travail du son de leur groupe comme Jimmy Page ou Pete Townshend par exemple.

Jessyka, aussi fortes que soient ta voix et ta présence, est-il facile de te faire entendre, non seulement au sein du groupe, mais également dans ce milieu qui reste foncièrement masculin, tu ne me contrediras pas, je pense ?! Quelles sont les difficultés que tu rencontres le plus souvent ?
Jessyka : Au sein du groupe j’arrive à me faire entendre avec ou sans la puissance vocale, lol ! On se connaît bien, on s’écoute, ça fonctionne plutôt bien pour moi et pour les garçons. J’aime évoluer dans ce milieu, même s’il reste très masculin. Ces messieurs sont plutôt sympas et comme j’ai un caractère bien trempé, je n’ai jamais rencontré de problème jusque-là.

Vous vous occupez de tout, artistiquement on l’a vu, mais également de la logistique, la communication, le booking, jusqu’aux clips et la création de la pochette (n’est-ce pas Laurent ?). N’avez-vous pas envie parfois de vous faire aider et de vous entourer de structures pour appuyer vos démarches ?
Laurent : C’est vrai que ça fait parfois beaucoup de choses à gérer et je dois dire que je préfère créer des pochettes ou réaliser des clips que faire le booking lol ! En fait au début, on s’occupe de tout par manque de moyens essentiellement. Mais une fois qu’on a développé de nouvelles compétences, il devient difficile de faire confiance et c’est parfois une telle perte de temps que d’expliquer à quelqu’un ce qu’on veut alors qu’on est capable de le faire soi-même. Cela dit, il nous arrive de faire appel à des personnes hors du groupe pour des compétences que nous ne maitrisons pas comme le travail d’attaché de presse, le booking à l’étranger, la recherche de financement, etc. Après, certaines structures que nous avons contactées par le passé ont parfois oublié de nous répondre. Aujourd’hui nous n’avons plus forcément besoin d’elles ni envie qu’elles viennent récolter les fruits de notre travail.

Quels sont les actus et projets ? Une tournée a démarré à la sortie, mais elle continue en 2018 jusqu’en dehors de nos frontières je crois ?
Oui nous allons beaucoup voyager cette année encore et c’est vraiment une grande fierté de voir sur les réseaux sociaux que beaucoup de gens attendent de nous voir passer dans leur région. Il y aura les Alpes cet hiver, le village Disney, le Centre, puis nos premières dates dans le Nord au printemps avec un petit tour en Belgique. L’été s’annonce également bien rempli avec pas mal de festivals dans toute la France et un petit tour du côté de la Suisse où nous nous rendons régulièrement, même si on n’y a pas encore ouvert un compte lol ! Côté production, on prépare un
Blu-Ray avec du live, des clips, des interviews, du making-of, etc., pour fin 2018, peut-être pour les fêtes. C’est plus sympa à offrir qu’un parfum bon marché ou un pull moche lol ! On travaille également sur plusieurs vidéos live et clips qui devraient sortir tout au long de l’année sur notre chaîne Youtube, notre page Facebook et notre site officiel. Et enfin, le travail sur le prochain album a déjà commencé, mais ce sera pour 2019.

Pas de question, la voie est libre pour dire ce que vous voulez ! Salé, poivré, à votre convenance !
Alors je vais remercier une fois de plus tous ces gens qui se lèvent de leur canapé et qui vont voir des concerts. Certains, plusieurs fois par semaine, d’autres seulement quelquefois par an. Mais dans tous les cas, ce sont eux qui font vivre le spectacle vivant. Alors merci à toutes et à tous de faire en sorte qu’il se passe encore des choses dans nos villes et nos campagnes et qu’on puisse encore venir vous jouer notre musique partout en France. Merci de nous soutenir dans les salles et en écoutant nos disques. Et n’hésitez pas à nous rejoindre sur les réseaux sociaux, venez taper la discussion, partager vos avis et vos goûts pour la musique. Au moins, si les services secrets nous espionnent, ça leur fera une culture musicale !


Dates de concerts :
-    06/04 : La Grange à St Laurent Nouan (41)
-    07/04 : Billy Bop’s au Disney Village (77)
-    27/04 : L’Oliver à Lattes (34)
-    28/04 : La Parenthèse à Servian (34)
-    18/05 : Le Blue Devils à Orléans (45)
-    19/05 : Vicq Blues Festival (59)
-    20/05 : De Mooie Molen à Roeselare (B)
-    25/05 : Le Galway à St André de Cubzac (33)
-    23/06 : Salle Michel Galabru à Nissan (34)
Plus d’infos ici

Liens Internet :
http://www.redbeansandpeppersauce.com
www.facebook.com/redbeansandpeppersauce
https://www.youtube.com/user/RBAPS34
https://www.instagram.com/red_beans_and_pepper_sauce/

Crédit photos : Eric Massaud

Cette rubrique est aussi la vôtre, alors n'hésitez pas à envoyer vos productions pour être interviewé par Maritta Calvez à maritta[a]guitariste.com (remplacez le [a] par @).

[Scène Ouverte] Red Beans & Pepper Sauce - Red