La fabrication de pédales dites "boutique" n'est pas un monopole détenu par les Etats-Unis. Même si une grande partie des fabricants se concentre là-bas (pour des raisons culturelles et économiques ?), nous trouvons ici et là d'autres innovateurs : Danemark, Croatie, France... et aujourd'hui Indonésie ! Henry Widjaja a ainsi fondé GFI System en 2010 à Jakarta, société aujourd'hui constituée d'une poignée d'employés. Boutiques au sens quasi originel du terme (les pédales sont assemblées dans le garage de Widjaja), les réalisations de GFI System adoptent une approche innovante en s'aidant des avancées technologiques en la matière. La gamme est actuellement composée de trois modèles basés majoritairement autour d'effets "de temps et d'espace" (Delay, Reverb et un multi effet proposant Phaser / Chorus / Octaver / Univibe). Aujourd'hui sous nos pieds, la Specular Reverb v2, une pédale offrant une reverb "de base" ainsi que des "effets incorporés"...

Découverte de la pédale GFI

Dans le très discret carton, nous trouvons la pédale et un conséquent mode d’emploi de 11 pages, détails des différentes fonctions oblige... et c’est tout. Même si ce n’est absolument pas nécessaire ni déclencheur de l’achat, nous sommes un peu habitués à trouver des petits « goodies » (badges, stickers, sacs…) livrés avec les pédales boutiques – ici, l’offre est minimale.
Le boitier de la SR2 est d’une taille relativement standard (12 x 3,6 x 6,5cm) et assez sobre. Il est couvert d’un revêtement noir mat texturé, type que l’on retrouve sur un certain nombre de pédales récentes sur le marché, mais qui donne une impression de qualité non optimale (point de vue totalement subjectif cependant, la solidité de ce type de boitier et de switch ayant fait ses preuves depuis longtemps). La sobriété esthétique de la face avant de la pédale est bénéfique dans la mesure où un certain nombre d’informations y sont livrées à l’utilisateur – un graphisme complexe aurait rendu l’utilisation peut être moins claire.

Questions connectiques, la pédale est stéréo, autant en entrée qu’en sortie ! Elle permet donc d’insérer un signal mono (une simple guitare par exemple) et de le transformer en stéréo (comme sur le test en vidéo), mais également d’accueillir une source déjà stéréo (provenant par exemple d’un autre processeur stéréo (chorus, flanger, delay…) ou d’une source tout autre qu’une guitare (…et oui ! Vous n’avez jamais essayé de bancher autre chose dans vos pédales ?). La pédale doit être alimentée en 9 volts, uniquement via une alimentation secteur (non fournie).

L’utilisation semble dans un premier temps assez intuitive et le manuel ne parait pas nécessaire : un footswitch silencieux (à gauche) pour activer l’effet (la DEL à gauche s’allume) et 4 potards pour sculpter l’effet
Blend : dosage entre votre signal clean et la quantité de reverb
Decay : longueur de la reverb
Damping : atténuation de certaines fréquences (ici, hautes)
Intensity : l’intensité de l’effet ????

La reverb est décrite par GFI comme ne s’inspirant pas des standards de l’industrie (spring, room, hall…) mais se référant plutôt à des principes de psycho-acoustique. Ainsi, son caractère va évoluer selon l’utilisation du potentiomètre Decay. En effet, il est possible d’obtenir une vaste palette d’ambiances et d’environnements en jouant avec ce réglage ainsi que celui de damping, afin de mater certaines hautes fréquences.
Le 4ème contrôle, Intensity semble influer sur la « distance » entre le signal non traité et la reverb (nous aurons la confirmation – en lisant le manuel – qu’il s’agit bien du réglage de Pre-Delay).
Les sonorités sont précises, claires, très larges (surtout en stéréo !) et les 3 réglages proposés permettent de couvrir un grand nombre d’applications et de situations, d’un volume de taille moyenne à un champ extrêmement large. On note également une légère modulation sur ce mode standard, du type du flutter sur certain delay à couleur vintage, qui est très agréable sur les reverbs longues.

Notons que la queue de la reverb ne meurt pas abruptement lorsque l’on désactive l’effet et continue de vivre jusqu’à la fin (la pédale n’est donc pas « true-bypass »).
Lorsque l’on ouvre le boitier, on découvre également deux « dip switchs » (aucune mention dans le mode d’emploi) qui font office de « KillDry » pour chacune des sorties : en les activant, seule la partie réverbérée est audible – parfait pour les boucles d’effets parallèles.

Différentes atmosphères de la Specular Reverb 2

La découverte basique de la SR2 passée, nous nous attardons sur les autres informations disponibles sur le boitier, notamment le footswitch de gauche (silencieux également) associé à l’interrupteur 3 positions "SME" et à la DEL se situant en haut à droite. Cette association de contrôles et d’indicateurs forme un des intérêts majeurs de cette pédale dont l’utilisation n’est cependant pas aussi intuitive que celle de la reverb dite "normale" - et qui nous oblige à ouvrir ce mode d’emploi…(vous verrez, c’est parfois utile de le faire) : La Specular Reverb v2 propose d’ajouter des effets à votre reverb !
Ces 2 contrôles permettent ainsi de gérer les différentes "atmosphères" de votre reverb, qui sont au nombre de 6 et ventilées en 2 modes : Primaire (DEL en vert) et Secondaire (DEL en rouge). Pour passer de la reverb "normale" au mode atmosphérique, il vous faudra presser les deux larges footswitchs simultanément – la DEL en haut à droite s’illumine dans une des deux couleurs : pas de difficultés de ce coté ci, les deux 2 footswitchs étant "silencieux" et ne nécessitant pas une forte pression pour passer d’un état à l’autre. Pour changer de mode (Primaire => Secondaire ou vice versa), il faut une nouvelle fois presser les deux footswitchs simultanément, mais cette fois jusqu’à ce que la DEL clignote 3 fois et change de couleur (comptez un peu moins de deux secondes).
Cette navigation soulève quelques minimes réserves. Tout d’abord, il faudra faire le deuil de jouer en chaussettes le dimanche matin. Presser un footswitch est totalement faisable sans accident, mais un pied d’une largeur moyenne aura potentiellement des complications à actionner ces deux footswitchs simultanément (et le mini interrupteur 3 positions gratte la plante des pieds). La seconde réserve se situe non plus dans votre salon mais sur scène : il faudra prévoir en amont vos changements d’atmosphères, cela nécessitant parfois une manipulation de 2 ou 3 secondes.
Revenons aux atmosphères : GFI System en a crée 6, différentes et utiles, que vous devez (une fois dans le mode primaire ou secondaire) sélectionner (à la main cette fois) via le mini-interrupteur 3 positions se situant entre les deux footswitchs.

Mode Atmosphère Primaire MSE (vert)
M pour Modulated : une reverb contenant un chorus
S pour Shimmer : une reverb infinie  avec un effet de cordes synthétiques harmonisées (pad)
E pour Echo : un delay basique, auquel s’ajoute la reverb "normale"

Mode atmosphère secondaire TVI (rouge)
T pour Trembled : le signal réverbéré passe par un tremolo
V pour Voices : un pitch-shifter (à l’unisson, la quinte ou l’octave supérieure) est ajouté au signal réverbéré
I pour Infinity : comme son nom l’indique, il s’agit d’un mode qui va permettre de maintenir à plus ou moins l’infini les 0,25 secondes de ce que vous venez de jouer.

GFI System a également implanté, pour une plus grande dynamique dans la vie de l’effet, une fonction d’autosweeping du paramètre d’intensité : en faisant une manipulation assez simple (gardez le switch de droite appuyé jusqu’au clignotement des DEL), le paramètre d’intensité ira atteindre son maximum. Il vous est donc possible de faire varier votre effet (sans se servir de vos mains) : effet garanti pour le delay ou le shimmering par exemple !

Comme vous pourrez le constater dans la vidéo, l’intégralité des sonorités sont de qualité, polyvalentes, et élargissent énormément votre son (l’utilisation d’une pédale de reverb sortant sur deux amplis est toujours géniale). Les différentes atmosphères permettent vraiment de s’amuser, de trouver des idées intéressantes et pousser la création vers l’avant.

Des sauvegardes bienvenues

Un des autres points forts de cette pédale est la possibilité (bien heureuse il faut l’avouer) de sauvegarder vos réglages ! Ainsi, 8 emplacements sont disponibles, eux aussi répartis dans chacun des modes (primaire et secondaire). Cette fois-ci, l’enregistrement d’une sonorité se réalise via une manipulation assez conventionnelle : une fois votre son créé, vous sélectionnez son futur emplacement en pressant le switch de droite (dénommé Select/Atmosphère) qui fera s’illuminer à tour de rôle une des 4 petites DEL blanches se situant de part et d’autre de l’interrupteur MSE. L’emplacement identifié, il vous suffit de presser le switch "Preset/Bypass" jusqu’à ce que le preset/DEL identifié clignote : votre preset est sauvegardé ! Notez que seules les sonorités d’un mode peuvent être sauvegardées au sein de ce même mode. Plus concrètement, il ne sera pas possible d’avoir, disons dans le mode Primaire, des sonorités de tremolo ou de Voices – ce qui en soi n’est pas le plus grave du monde, mais aurait pu être utile dans un schéma de morceau où une Reverb Tremble s’enchainera à un Echo.
Pour accéder à vos presets, nous observons encore une fois la logique habituelle de faire défiler les presets – et les DEL (de 1 à 4), en pressant le footswitch "Select/Atmosphère » et en confirmant son choix en pressant le switch "Preset / Bypass". L’effet ne change que lorsque la commande est confirmée. Il est tout à fait possible de sélectionner son preset lorsque l’effet (de la SR2) est off, et de confirmer le choix du preset en même temps que de l’activer.
Précisons également que lorsque l’on change de Mode (en pressant les deux gros footswitchs, vous vous rappelez ?) la diode du preset précédemment sélectionné se met à clignoter : elle signale que la sonorité en cours ne correspond pas au preset visuellement sélectionné. Le clignotement ne s’arrêtera que si vous confirmez la sélection d’un des presets. Cette logique d’information n’a cependant un sens que lorsque l’on utilise la pédale avec ses pieds, dans la mesure où rien ne clignote si vous êtes déjà dans un mode et changez d’atmosphère  via le switch (et donc que le son n’a aucun rapport avec le preset visuellement sélectionné).

Un sérigraphie à étoffer pour un meilleur confort

Il s’agit d’un appareil dont il faut lire le mode d’emploi, et si possible retenir les principales fonctions !  La sérigraphie mériterait peut être une approche différente car elle est ici incomplète, par soucis de ne pas saturer l’utilisateur d’informations, et peut parfois être trompeuse. En effet, l’interrupteur 3 positions MSE (la première lettre de chacune des atmosphères du mode Primaire) ne porte finalement correctement son nom que dans un des deux modes. Il est vrai qu’il s’agit d’un détail qu’on peut facilement gérer, mais dans ce cas, pourquoi ne pas le nommer 123 ou autre ?
Le problème de sérigraphie se situe également au niveau des potentiomètres, car en réalité les noms inscrits sur le boitier ne s’appliquent pas en permanence. Bien évidemment, la diversité des "atmosphères" et effets additionnels de la reverb "normale" implique des contrôles différents pour chaque effet. Il est très probable que le choix de ces appellations soit décidé par rapport à la récurrence de tel ou tel réglage, mais il reste toutefois compliqué de se souvenir de l’intégralité des fonctions: le blend reste le même pour chaque atmosphère, le Decay alterne entre deux fonctions, le Damping et l’Intensity entre 4 – ces remarques prendront leur sens dans la vidéo –  Il aurait été judicieux de placer par exemple un tableau récapitulatif des réglages sur un des cotés de la pédale (comme le fait notamment Empress Effect). Ma logique toute personnelle aurait également souhaité que la sérigraphie évoque par défaut les contrôles de la Reverb "Normal" (par défaut).... raté (l’intensité étant finalement un PreDelay". Ces remarques ne s’appliquent bien entendu pas aux guitaristes qui ont les modes d’emploi de leur pedalboard toujours ouverts à coté de l’ampli…

Ce qu'il faut retenir de la GFI Specular Reverb 2

Les points soulevés ci-dessus ne remettent absolument pas en question les qualités sonores et la polyvalence de cette Specular Reverb 2. Il s’agit d’un produit aisé à utiliser une fois le manuel lu et assimilé, et avec lequel on prend plaisir à expérimenter
Proposée sur le site de GFI System au tarif de 239$, (auxquels il faudra ajouter environ une trentaine d’euros de frais de port), la Specular Reverb v2 est un processeur d’effets d’espaces d’excellente qualité et plutôt bien placé en terme de prix dans la mesure où nous avons ici 8 sauvegardes disponibles et contrôlables au pied. Il conviendra aux guitaristes adeptes de sonorités inhabituelles, qui aiment "mettre les mains" dans les réglages et qui se sentent à l’aise avec ce genre d’outils un peu sophistiqués.

Prix public : 239 dollars

Les plus :
- La qualité de son et les différentes variétés de reverb
- La stéréo !
- Les 8 presets, tous accessibles au pied
- Le “trail” : la reverb meurt “naturellement” lorsqu’on la désactive

Les moins :
- L’information sur le boîtier
- Questionnement sur la longévité du mini interrupteur 3 positions, qui est touché par la semelle de la chaussure à chaque changement de mode.

GFI System - Specular Reverb 2