Gibson a voulu déposer auprès de l'Union Européenne en 2010 la forme du corps de la Flying V une démarche à laquelle s'est opposé Hans-Peter Wilfer le patron de Warwick et Framus. Et c'est justement ce dernier qui vient de l'emporter, les juges européens estimant qu'il était trop tard pour protéger une forme devenue un des standards du marché depuis 50 ans.

Car aussi incroyable que cela puisse paraître, Gibson n'avait pas protégé la forme de la Flying V en Europe. On remarque au passage que le modèle a été sorti pour la première fois en 1958 en même temps que l'Explorer puis, trop futuriste pour son époque, elle est arrêtée dès 1959 à l'exception de quelques modèles fabriqués en 1963 avec les pièces restantes en stock. Il faut attendre ensuite 1967 pour la voir apparaître à nouveau au catalogue Gibson durablement cette fois. Et c'est en 1974 que Gibson dépose le brevet pour protéger à nouveau aux Etats-Unis la forme du corps et de la tête 'Dove Wing' de la Flying V. Mais ce qui est valable aux USA, et qui fait notamment partie du procès intenté à Dean et Luna Guitars, ne l'est pas forcément en Europe ni ailleurs dans le monde. C'est l'une des grandes difficultés que rencontrent les inventeurs dans la protection de leurs créations.

Le fait que Gibson ait attendu 2010 pour tenter de déposer la forme de la Flying V en Europe alors que bon nombre de fabricants qu'ils soient industriels ou luthiers l'utilisent depuis de nombreuses années, a été l'un des motifs de refus des juges qui ont délibéré lors du second appel, une nouvelle fois en faveur de Hans-Peter Wilfer de Warwick et Framus. Ce dernier avait contesté ce brevet en 2014 et Gibson se voit contraint de lui rembourser ses frais de justice. 

Autre point qui nous renvoie à l'affaire Dean, Gibson estimait que les consommateurs associaient la forme Flying V uniquement à Gibson et qu'ils étaient ainsi trompés par les autres fabricants reprenant ce design. Là encore, les juges ont débouté Gibson estimant que l'offre pléthorique actuelle empêche d'associer une forme à une seule marque. On verra si ce jugement influe ou pas du tout sur le procès américain. 

On remarque au passage que la volonté de protéger l'authenticité et l'héritage des designs de Gibson n'est pas à attribuer uniquement à la nouvelle direction en place depuis fin 2018 puisque les démarches ont ici débuté en 2010 sous l'ancien régime. C'est encore une fois un sujet très sensible qui génère de nombreux débats sur la protection intellectuelle ou la liberté de fabriquer et d'adapter un design existant. Les juges européens viennent de rendre leur verdict. Et vous, quel est le vôtre ?

 

L'Europe refuse à Gibson la protection de la Flying V