Ecrivains amateurs : publiez vos récits ici !

pirator
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Bonjour !
J'ai remarqué qu'il n'y avait aucun sujet où les écrivains amateurs, poésie, nouvelles, romans ou tout autre, pouvaient poster leurs récits, des fois que ça intéresse quelqu'un de lire un petit quelque chose ! Donc voici .
« Mais comme l'a dit le grand philosophe Mick Jagger, on ne peut pas toujours avoir ce que l'on veut »
pirator
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Je commence avec une nouvelle , toute fraîche ! Ne surtout pas lire la fin dés le début ou vous vous gâcherez tout

L’étrange plaisir des fiancés



Les formes gracieuses de Yoko glissaient sur le corps d’Hiruko. Ses jambes s’enroulaient autour de ses reins dans une étreinte passionnée, et il lui passait sa main dans les cheveux. Il lui faisait l’amour avec une infinie tendresse, caressant ses fesses entre deux baisers, lui susurrant des mots doux à l’oreille et lui disant tout son amour juste par son regard. Elle haletait, tandis qu’elle sentait son fiancé blottit contre elle, écrasant sa poitrine avec son torse si doux. Rien n’aurait pu venir briser la singularité de ce moment si intime, si beau, qu’ils trouvaient tous deux si parfait. Et quand enfin, après de longues minutes, Hiruko commença à gémir plus fort, Yoko en fit de même, car ils s’étaient tous les deux si bien trouvés, que la jouissance de l’un entraînait celle de l’autre. Ainsi, alors que Yoko et Hiruko venaient tous deux, le monde s’arrêta l’espace d’un instant, comme prisonnier de l’étreinte des muscles de leurs corps qui se contractaient tout à coup plus fort que jamais.
« -Ma chérie ?
-Oui ? répondit Yoko d’un souffle saccadé.
-Nous avons dû être un peu brusques. Regarde le lustre.
-Oh, mon dieu ! Répondit-elle en riant.»
Et en effet, sans qu’ils ne s’en soient rendus compte, le lustre de porcelaine qui éclairait la chambre, suspendu dans l’angle de la pièce, s’était brisé sur le sol en mille morceaux, comme s’il s’était déboîté de son support.



Hiruko Hiji et Yoko Haruna avaient tous deux vingt-deux ans, et s’étaient rencontrés autour d’une table de jeux à l’hôpital central deux ans auparavant. Elle avait fait la rencontre malheureuse d’un chauffard dans une ruelle du centre-ville, qui lui avait brisé les deux jambes en freinant bien trop tardivement –la faute au Saké, sans doute-. Lui avait subi une opération plutôt délicate du cœur qui, à cette époque –nous étions dans les années quarante-, impliquait une convalescence longue de plusieurs mois. Tous deux se retrouvaient ainsi chaque jour autour d’un échiquier, riant et oubliant leurs douleurs, partie après partie, discussion après discussion. Et puis un jour, Yoko fût rétablie et quitta l’hôpital. Hiruko souffrit de cette absence, il avait trouvé chez la jeune fille un réconfort puissant, et surtout, il avait développé pour elle un sentiment étrange d’attachement … Oui, il voulait la revoir.
Ainsi, lorsqu’il sortit de l’hôpital, une dizaine de jours plus tard, il n’avait qu’une idée en tête : retrouver celle qui l’avait tant fait rêver. Les parents de la jeune fille lui apprirent malheureusement que celle-ci était partie pour l’été travailler à Tokyo où un oncle l’employait, en qualité de secrétaire –métier qu’elle avait appris dés ses quatorze ans-. Sa peine fût légèrement apaisée par la nouvelle que lui apprirent Monsieur et Madame Haruna : si la jeune fille avait dû partir, elle leur avait tout de même parlé de ce jeune Hiruko qu’elle avait rencontré, et qu’elle brûlait d’envie de revoir lorsqu’elle aurait finit son contrat à Tokyo. Hiruko prit ainsi son mal en patience, profondément heureux de savoir que Yoko ne l’avait pas oublié, mais était simplement partie travailler ailleurs pour quelques temps.
Il passa la fin de l’été avec sa mère, qui vivait seule –son père ayant trouvé la mort en Mandchourie une dizaine d’années auparavant, dans des circonstances curieuses, alors qu’il y avait été mobilisé par l’armée Japonaise-. A propos d’armée, Hiruko était d’ailleurs bien heureux d’échapper à son service militaire, seul avantage que lui avait procuré son opération du cœur, car, bien qu’il était patriote, l’époque n’était pas bien favorable aux jeunes soldats.
Et un beau jour de septembre, alors qu’il prenait l’air comme tous les matins sur un banc devant la demeure familiale, il vit une silhouette harmonieuse, à la démarche cependant boiteuse, s’approcher de lui. Yoko était là, de retour de la capitale, venue pour le retrouver. C’est ainsi que les deux jeunes gens entamèrent leur liaison qui durait depuis deux ans maintenant, toujours avec la même passion, toujours avec la même fougue.



Hiruko avait jeté ce qui restait du lustre, et depuis deux soirs, le couple éclairait la chambre à la bougie. Yoko était simple secrétaire, et lui officiait comme homme à tout faire dans une école, tantôt plombier, tantôt électricien, tantôt menuisier : en bref, ils n’étaient pas bien riches, quoique cela leur suffisait, mais le remplacement du lustre attendrait encore un peu.
La richesse n’était pas le plus important à leurs yeux, ils avaient un toit et mangeaient du poisson plusieurs fois par semaine. Le principal était qu’ils soient ensembles. Le soir, quand Yoko, qui travaillait tard, rentrait, Hiruko l’attendait généralement sur le perron, puis commençait le même rituelle dont ils ne se lassaient jamais : ils s’embrassaient, dînaient ensemble, discutaient de tout et de rien, se couchaient, et faisaient l’amour. Parfois, ils le refaisaient dans la nuit, une fois, deux fois ou plus. Une chose était sûre, le chirurgien qui avait opéré Hiruko l’avait remis en bonne forme …
Ils avaient passé une heure au moins à discuter de leurs futurs enfants, car ils étaient maintenant tous deux certains d’être prêts et désireux de fonder leur propre famille. Yoko avait fait remarqué à Hiruko qu’il faudrait d’abord qu’ils soient mariés, ce à quoi celui-ci n’avait pas vraiment répondu. Il voulait en effet éviter de faire savoir à sa fiancée qu’il projetait de la demander en mariage d’ici quelques jours, pour leur jour de congé commun –chose rare-, sous le grand cerisier en fleurs qui se trouvait à deux rues d’ici.
Ce soir, leurs ébats étaient pleins de tendresse. Ils se caressaient avec la douceur qu’ont les amants qui se connaissent profondément l’un et l’autre. Elle pensait à leurs futurs enfants qui courraient un jour à leur côté, et lui pensait à sa demande sous le cerisier. Et puis c’était à Hiruko de s’imaginer jouant avec leurs enfants, et son cœur battait alors plus fort encore –si cela était possible-, et il serrait Yoko contre lui. Le souffle s’accélérait, les gémissements s’amplifiaient, et ils vinrent comme à leur habitude en même temps.
Au même instant résonna un bruit fracassant.
« -Mon dieu ! Qu’est-ce que c’est ? Hurla Yoko, encore en pleine jouissance, et pourtant apeurée »
Hiruko eût vite réponse à la question : dans le salon, le sol était jonché de débris de bois, de poussière et de ferraille. Une faille d’au moins deux mètres de long s’était formée dans le plafond, qui venait en partie de s’effondrer. Les dégâts étaient cette fois bien plus ennuyeux qu’un simple lustre brisé.
« -Décidément, dit-il. Nous n’avons vraiment pas de chance ces jours-ci ».



Mitsuyo Hiji n’avait jamais vraiment eu de chance non plus. Enfant, ses parents étaient trop pauvres pour le mettre à l’école et il travailla aux champ dés ses dix ans. Adolescent, la jeune fille qu’il aimait mourut prématurément d’une crise d’épilepsie. Jeune adulte, alors qu’il couchait pour la première fois avec une femme, elle lui apprit une dizaine de jours plus tard qu’elle était enceinte. Il n’avait ainsi que dix-neuf ans quand le jeune Hiruko vint au monde, et, pour quelques années, ses malchances s’arrêtèrent, et il réussit même à faire vivre sa jeune famille grâce à un emploi de bagagiste dans un hôtel. Vite rattrapé par sa malchance, il perdit son emploi alors qu’Hiruko allait fêter ses huit ans, et dût jongler entre plusieurs travails pour gagner sa vie : il pressait des journaux très tôt le matin, les distribuait, puis faisait la plonge dans un restaurant le midi, cirait des chaussures l’après-midi avant de refaire la plonge le soir. La vie de Mitsuyo devint pire encore quand le Japon décida d’envahir la Mandchourie en 1931 : lui, qui avait pourtant –à son grand étonnement-, effectué son service militaire sans trop d’encombres quand Hiruko était encore tout petit -et en six mois seulement car il était déjà père de famille- fut évidemment mobilisé et parti sur le front en laissant sa femme et son fils seuls au pays. Il s’était révélé un tireur plutôt doué pendant ses classes, et fut intégré à l’infanterie, et à peine arrivé en Chine, il eût vite affaire à de véritables combats.
La première fois qu’il eût à tuer un homme, Mitsuyo visa dans le mille, touchant l’ennemi en plein cœur. Au passage, la balle en profita pour arracher l’oreille d’un de ses camarades qui se tenait à genoux devant lui, et qui se retrouva atrocement mutilé. Mitsuyo fut violemment réprimandé pour son erreur de tir.
La seconde fois, il fit encore une fois mouche, mais la douille qui s’éjecta de son fusil atterrit droit dans l’œil d’un autre de ses camarades qui, pris de court, trébucha alors qu’il était en train de faire feu : son tir fut dévié et, malheureusement, il n’atteignit pas la cible ennemie, mais un autre de ses compatriotes japonais qui se tenait deux mètres sur sa gauche et qui mourut sur le coup. Le pauvre homme fût fusillé pour tir fratricide, et Mitsuyo se garda bien de dire qu’il en était le responsable.
La troisième fois, Mitsuyo tua à lui seul trois chinois qui se faufilaient à travers les ruelles de Dandong. Il se dit que, pour une fois, il n’avait provoqué aucune catastrophe. Jusqu’à ce que le réservoir d’une voiture abandonnée là, qui avait été percé par la troisième balle après qu’elle eût traversé le chinois, prenne feu, et incendie du même coup l’immeuble sous lequel elle était garée, qui incendia lui-même l’immeuble voisin, si bien qu’en dix minutes la moitié du quartier était en proie aux flammes. Mitsuyo se dit qu’il devait être maudit. Dés lors, il se refusa à utiliser à nouveau son fusil, craignant de provoquer une nouvelle catastrophe.
Il dû briser ce serment le jour où un chinois camouflé en civil sortit un pistolet-mitrailleur devant sa troupe, et de fait, Mitsuyo ne pouvait que se défendre ou mourrir. Priant pour qu’aucun malheur ne se produise, il fit feu sur le chinois, le toucha à la gorge, et attendit.
Il n’attendit pas longtemps, car la balle qu’il avait tirée s’était scindée en deux éclats en frappant la chaînette que portait au cou le chinois : un morceau ouvrit la gorge de celui-ci, tandis que l’autre ricocha, rebondit contre le montant d’une fenêtre, rebondit encore contre le canon d’un des camarades de Mitsuyo, rebondit une dernière fois contre l’enseigne d’un marchand d’épices, et finit sa course entre les deux yeux du père d’Hiruko, le tuant sur le coup.
Il était vraiment malchanceux.



Depuis trois soirs, Hiruko travaillait à réparer le plafond. Il y travaillait jusqu’à très tard après qu’il soit rentré du travail, et de fait, sa relation avec Yoko était bien moins intense ces derniers jours. Le ciel était couvert et la pluie menaçant d’arriver sous peu, et il dût même consacrer son jour de repos à terminer les réparations, ce qui lui fendit le cœur car il avait prévu de demander la jeune fille en noces ce jour-ci. Pas démotivé pour autant, il prévu de l’emmener sous le cerisier un soir, après qu’elle soit rentrée du travail, car les soirées étaient encore douces à cette saison. L’idée lui redonna du baume au cœur, et le soir même, le plafond était comme neuf. Pour fêter ça, Yoko fit avance de quelques frais, et cuisina un succulent repas à base de thon, d’algues et du meilleur riz qu’elle trouva. Et quand arriva la fin du repas, elle lui montra un petit paquet dans un coin du salon.
« -C’est pour toi, mon Hiruko, dit-elle ».
Celui-ci n’en revint pas : dans le paquet se trouvait un lustre, certes très simple et composé d’un unique panier de paille tressée, mais ils avaient tellement besoin d’un lustre !
« -Ma Chérie, tu es folle ! Tu sais que nous n’avons pas beaucoup d’argent à dépenser et … ».
Mais elle l’interrompit. Le lustre n’était en rien une dépense superflue, à vrai dire, elle ne l’avait pas payée : elle l’avait simplement récupéré dans ses bureaux où l’on modernisait à tour de bras les installations, et où l’on se débarrassait des vieilleries.
Le geste était tout de même magnifique, ce simple lustre était pour Hiruko un cadeau très touchant, et il remercia la jeune femme en la couvrant de baisers, qu’elle lui rendit évidemment. Il la prit dans ses bras, la porta dans leur chambre, et ils firent l’amour qu’ils n’avaient pu faire depuis plusieurs jours. Le temps attise la fougue, et leurs ébats furent ce soir forts et puissants, si bien que le dos de Yoko fut vite zébré de griffures, alors que les mains d’Hiruko serraient avec vigueur celles de sa fiancée. Ils vinrent, en criant cette fois plus fort que d’habitude, et terminèrent dans une étreinte presque étouffante.
Et cette fois, aucun bruit sourd, aucun lustre qui s’écroule. Non. Juste un drôle de bruit aigu, comme un craquement de verre, et puis plus rien. Un peu perturbé quand même, Yoko se leva, alluma la lumière du salon, qui ne s’alluma pas. Pas plus que celle de la cuisine. Et une drôle d’impression de chaleur l’envahit… Après tout, quand le toit de sa maison est en train de brûler, n’est-il pas normal que l’on ait subitement plus chaud ?



L’agent de la société d’électricité leur expliqua qu’il est extrêmement rare que la foudre s’abatte sur une maison, et qu’ils étaient bien chanceux que l’éclair ait seulement mis le feu au toit et fait sauter les plombs, et qu’ils n’aient pas été blessés voire tués. Yoko était en larmes. Heureusement que la pluie avait suivi l’orage, et éteint le feu, sans quoi elle et Hiruko seraient maintenant à la rue, mais les dégâts étaient quand même importants, et surtout, elle avait eu terriblement peur. Hiruko la rassurait en la serrant contre lui et en lui disant de ne pas s’en faire, qu’il arriverait bien à tout réparer, et qu’ils étaient sains et saufs. Ils rentrèrent après que l’agent ait pu rétablir le courant, et se recouchèrent.
«-Hiruko, dit-elle, il faut que je te confie une drôle d’idée…
-De quoi veux-tu parler ?
-Ces évènements. C’est curieux. Le lustre, le toit, puis la foudre … Mon Ange, dit-elle encore sanglotante, j’ai l’impression que tout cela arrive parce que nous faisons l’amour…
-Yoko, répondit-il en plaisantant, comment veux-tu que cela soit lié ? Allons, ne pense donc pas à ce genre de sottises ! Nous n’avons pas de chance ces derniers jours, voilà tout ! Le lustre était sans doute mal fixé, le plafond pourrit, et un orage n’est pas si rare.
-Tu as sans doute raison .. ».
Ils se rendormirent et, au petit matin, se levèrent tous les deux très tôt. Quelques gouttes de pluie coulaient dans la chambre, faute aux dégâts du toit, et Hiruko du se dépêcher de colmater la brèche avec de grandes toiles cirées. Il revint se coucher et trouva sa fiancée nue, allongée sur le lit. Il eut soudain très envie d’elle, et lui fit vite comprendre ses sentiments.
« -Mon Hiruko … J’ai peur que … Tu sais … »
Encore une fois, il lui expliqua que leurs ébats étaient bien indépendants de tout cela. Elle finit par entendre raison, et, avant qu’elle n’aille travailler, ils étaient à nouveau nus et enlacés. Elle avait les fesses les plus belles qu’une femme ait jamais eue, se dit Hiruko en la contemplant. Il posa ses mains dessus, ivre de ce contact si doux, et elle folle de ces caresses si tendres … Et Hiruko vint. Seul. Troublé que Yoko ne jouisse pas en même temps que lui, il lui demanda si tout allait bien.
«-Excuse moi, Hiruko… J’ai seulement toujours cette frayeur, et j’ai un peu de mal, ce matin… Continue… »
Il continua, bien qu’un peu distrait par l’idée que sa fiancée avait des idées si bizarres. Au bout de quelques minutes, elle vint aussi, certes en gémissant moins fort qu’à son habitude, mais elle vint tout de même. Et alors, au moment où ils s’étreignaient généralement, celle-ci s’assit, les genoux contre la poitrine, comme apeurée.
« -Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Hiruko, toujours troublé.
-J’attends. Je sens qu’il va se passer un malheur.
-Alors j’attends avec toi, et tu verras que rien ne va se passer ! »
Ils attendirent ainsi une bonne dizaine de minutes. Quand enfin, la jeune femme fût sûre que cette fois, rien ne s’était produit, elle prit son homme dans ses bras, et s’excusa pour ses idées stupides.
«-Ce n’est rien, ma Yoko. Ne sois pas en retard au travail, dit-il en déposant un baiser sur ses lèvres. »
Elle se leva, rassurée, et partit faire un brin de toilette, pendant qu’Hiruko lui emboîtait le pas. Ils rirent ensemble de la superstition ridicule de Yoko, s’habillèrent, puis sortirent pour aller travailler. L’école où travaillait Hiruko était à deux cent mètres seulement des bureaux de Yoko, ils pouvaient ainsi faire le matin le chemin ensemble.
Yoko fut la première à le voir. Hiruko, qui verrouillait la porte, se retourna d’un coup en entendant son cri d’effroi. Sous la fenêtre du salon se trouvait un homme, mort, les veines tranchées, entouré d’une marre de sang qui s’était étalée sur le trottoir. Il était vêtu de guenilles sales et poussiéreuses, badigeonnées de sang. La scène était horrible, et Yoko s’évanouit.



Akhiro Matama avait fini sa vie les veines tranchées, sur un trottoir, sous la fenêtre de la maison d’un jeune couple. Mais avant d’en arriver là, il avait vécu une vie bien étrange. Abandonné au berceau, il avait été recueilli par une famille de comptables hauts placés de Kyoto, qui l’avaient surtout adopté pour en faire un domestique pas vraiment rémunéré et pas vraiment déclaré, car les gens riches sont souvent ceux qui rechignent le plus à ouvrir leur bourse. Dés ses cinq ans il commença ainsi à faire la plonge, puis, en grandissant, la lessive, la cuisine, et puis tout ce qu’un bon domestique doit faire, tout ça sans gagner un seul yen, en dormant dans un cagibi à peine aménagé, et en recevant sa dose journalière de coups de pieds et de ceinturon de la part de son richissime père. Il avait grandi à l’écart de la société, et n’avait ni éducation, ni conscience morale. On le traitait comme un moins que rien, mais pour lui qui n’avait rien connu d’autre, cela était normal, et il aimait même plutôt bien ses parents. Et puis un jour, alors qu’il dormait dans son cagibi, il entendit du bruit, des fracas, et quand il entrouvrit la porte, il vit deux hommes cagoulés, un poignard à la main, qui demandait à sa richissime mère où se trouvait leur argent. Après que Maman ait répondue, et que les deux messieurs en noir avec un poignard eurent trouvé l’argent, ils firent deux entailles dans la gorge de Maman puis de Papa qui s’écroulèrent, et partirent sans avoir vu le petit garçon dans le cagibi.
Les dix années suivantes, Akhiro les passa dans un hôpital psychiatrique, où les médecins avaient trouvé bon de l’envoyer car il n’avait aucune connaissance de la vie : en bref, il était forcément aliéné, encore plus même par les évènements qu’il avait vu. Quand il sortit de l’asile, alors que les médecins l’avaient jugé ‘guéri’ grâce à leurs miraculeux traitements à base de chocs électriques –qu’Akhiro n’aimait pas beaucoup-, il fut mobilisé par le service militaire, qu’il effectua en Mandchourie. Il n’eut pas beaucoup de chance là-bas non plus, car à peine intégré à l’infanterie, il eut une oreille arrachée par le tir d’un de ses camarades. Il fut un peu rassuré de savoir que la balle qui l’avait mutilé avait tout de même terminé sa course et tué un de ces ignobles chinois sur lesquels il fallait tirer, mais pour lui, la guerre s’arrêtait là. De retour au Japon, il passa les années suivantes à errer dans les rues, mais évidemment, comme quelqu’un qui n’a jamais connu la société, il commettait bien des erreurs, et fut replacé en hôpital psychiatrique. Il en ressortit après de nouvelles séances d’électrochocs –qui n’étaient toujours pas très agréables-, puis refit des bêtises, fut à nouveau interné, etc., etc. Il en vint à se dire que la vie n’avait pas tant de sens que ça, puisqu’on ne le laissait ni errer dans les ruelles, ni essayer de rentrer dans toutes les maisons qu’il croisait, ni marcher au milieu de la route, ni se promener nu quand il faisait trop chaud, ni même faire ses besoins sur le trottoir –les animaux en ont pourtant le droit, alors pourquoi pas lui ?-. Bref, alors qu’il sortait pour la dernière fois d’un asile, il décida que tout cela n’avait aucun sens. Il passait devant une maison qui avait un trou dans le toit, et tout d’un coup, en même temps qu’il entendait un cri de femme, il eût une envie soudaine, irrésistible, presque incontrôlable et venue d’on ne sait où, de ramasser le bout de verre qui traînait par terre et de s’ouvrir les veines pour en finir. Et c’est ce qu’il fit.



Yoko était restée quasi-muette depuis deux semaines. Bien que les policiers leur aient expliqués que l’homme retrouvé mort était un aliéné mental qui ne pouvait que finir par mettre fin à ses jours, elle restait convaincue que c’était de sa faute, que c’était en faisant l’amour qu’ils avaient provoqué cette nouvelle catastrophe. Hiruko, lui, s’était évertué à la raisonner, mais elle repoussait ses explications. Cela le rendait très triste, et il avait à nouveau dû décaler sa demande en mariage. Certes, ils étaient toujours amoureux et partageaient toujours de belles discussions et de belles paroles, mais il ne pouvait plus la toucher tant Yoko avait peur que cela ne provoque à nouveau un drame. L’homme qui s’était ouvert les veines devant chez eux avait certes troublé Hiruko, et il est même vrai qu’il s’est à un moment lui aussi posé la question d’un rapport entre leurs ébats et ces évènements … Mais la santé mentale de cet homme justifiait à elle seule ses actes, et il trouvait à nouveau l’idée ridicule.
Pour s’occuper l’esprit, il consacrait son temps libre à réparer le toit, et à vrai dire, la tache était un peu plus hardie qu’il ne le pensait.
Plus les jours passaient, plus Yoko sortait de son mutisme. Un beau jour, alors que le temps commençait à se refroidir, Hiruko se dit que s’il voulait la demander en mariage sous le cerisier, il fallait qu’il le fasse maintenant. Il traîna donc sa fiancée à deux rues d’ici, en prenant soin de cacher dans sa veste la bague qu’il avait réussi à payer avec son maigre salaire. Alors qu’elle lui parlait de ces dossiers sur lesquels elle travaillait au bureau à propos d’un nouveau système d’archivage, il l’interrompit. Elle ouvrit grand les yeux, et il sortit la bague.
« -Yoko, veux-tu devenir ma femme ? demanda-t-il, enfin, d’une voix qui tremblait d’émotion. »
Elle dit oui, évidemment. Elle lui sauta au cou, et, enfin, ils s’embrassèrent à nouveau, après des semaines d’abstinence.
« -Je me demandais si tu me demanderais un jour, idiot ! dit-elle en sanglotant de joie ».
Le soir, ils mangèrent du poulpe pour fêter l’évènement, et aussi, dans une moindre mesure, la réparation du toit qu’Hiruko avait enfin terminée. Ils burent même du Saké, qu’il avait dégoté à petit prix via un de ses amis qui tenait un commerce. Ils discutèrent jusque très tard de leur vie future, du mariage, et avaient prévu de rendre visite à leurs parents le lendemain pour annoncer la nouvelle. Elle lui dit qu’elle avait été très troublée par le suicide du fou, et qu’il lui faudrait un peu de temps encore pour vraiment aller mieux, mais qu’elle aimait son homme plus que jamais. Yoko avait peut-être un peu abusé du Saké, car elle se rapprocha doucement d’Hiruko, et, contre toute attente, posa sensuellement sa main sur sa cuisse.
« -Ma Chérie … Je ne suis pas sûr que tu sois prête pour …
-Tais-toi, Hiruko, dit-elle avant de poser ses lèvres sur les siennes ».
Elle le poussa vers la chambre. Hiruko n’était pas contre faire l’amour avec elle, bien au contraire car ces semaines d’abstinence n’étaient pas ce qu’il préférait, mais il l’aimait, et il avait peur qu’elle soit encore trop fragile. Il essaya de l’interrompre, mais sa réponse finit de le convaincre :
« -Mon Ange. Tout ça n’était qu’un hasard. La foudre, l’homme fou … Tout ça s’explique. J’ai été stupide ».
Elle avait finit par se rendre à la raison. Il la déshabilla, pris d’une fougue soudaine, l’allongea et passa sa main entre ses cuisses. Ils ne mirent que quelques secondes à reprendre possession du corps de l’autre, et ils étaient à nouveau emboîtés, nus et transpirants. Leurs ébats durèrent longtemps, car Hiruko faisait durer les choses en s’appliquant à caresser chaque coin du corps de celle qui serait bientôt sa femme, tantôt avec ses mains, tantôt avec sa bouche. Elle fondait de plaisir sous ses caresses…
Yoko savait maintenant que leurs ébats n’entraînaient rien, et que la loi des séries veut que plusieurs malheurs se suivent à courte échéance. Des semaines s’étaient écoulées depuis les évènements... Elle se laissa aller au plaisir que lui procurait son futur mari, elle sentait la jouissance monter, encore et encore, elle se laissait enivrer par la sensation de chaleur qui naissait en elle alors qu’Hiruko gémissait de plus en plus fort lui aussi, et son plaisir montait toujours, si bien qu’il n’allait pas tarder à atteindre son paroxysme ….


Nous étions le 6 Août 1945, et l’Enola Gay, un B-29 américain, venait de larguer la première bombe atomique de l’histoire sur la ville d’Hiroshima. Dessous, dans le centre-ville, une femme et un homme poussaient ensemble des hurlements de plaisir.
« Mais comme l'a dit le grand philosophe Mick Jagger, on ne peut pas toujours avoir ce que l'on veut »
Seth Rotten
pirator a écrit :
Je commence avec une nouvelle , toute fraîche ! Ne surtout pas lire la fin dés le début ou vous vous gâcherez tout


Bah si !! Quand je lis un bouquin je commence toujours par la fin !

Sinon ce genre de topic, lorsqu'il s'ouvre, est toujours pour moi la promesse de beaucoup rigoler, et j'avoue que dès la première fournée c'est réussi.

Citation:
Ils ne mirent que quelques secondes à reprendre possession du corps de l’autre, et ils étaient à nouveau emboîtés, nus et transpirants.


beau gosse
Seth Rotten
lokrian a écrit :
&list=FLGoGta9i9pLTrtp09BlR0Sw&index=29&feature=plpp_video

1:03" c'est le passage qui l'a inspiré




niveau sensualité poétique et érotisme subtil on navigue dans ces eaux ouais.
pirator
  • #7
  • Publié par
    pirator
    le
Dkikeju a écrit :
C'est bien toi qui avait fait l'unanimité avec cette prestation avant gardiste il y'a quelques années :

https://www.guitare-live.com/d(...)l?p=2

Ca me fait toujours autant rire.


Oui oui c'était moi ! Et j'avais même fait celle-là :

https://www.guitare-live.com/d(...).html



Sinon, je suis preneur de tout avis critique...
« Mais comme l'a dit le grand philosophe Mick Jagger, on ne peut pas toujours avoir ce que l'on veut »
arsenelapin
8O

Plutôt crever que poster ce que j'ai écris sur backstage ! !

Vous êtes fous ou quoi ??
ZePot
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  • Publié par
    ZePot
    le
L'idée est plutôt rigolo, je trouve la fin pas très bien amenée, il y a un truc qui fonctionne pas mais je ne saurais dire quoi.

Le cul est assez maladroit : "lui susurrant des mots doux à l’oreille et lui disant tout son amour juste par son regard", faudrait savoir.
til.
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    til.
    le
Pareil, dès que mon "tapuscrit" est terminé, je l'envoi à plusieurs maisons d'édition, mais hors de question de copier-coller quoi que ce soit ici.

Déjà que le jour où j'ai parlé de la tache que laissait ma guitare sur mon tee-shirt on m'a répondu que c'était moi la tache, mais alors si je commence à déballer mes projets personnels ici, certains paumés vont s'en donner à coeur-joie...

L'écriture est quelque chose d'extrèmement difficile, ceux qui s'y essaient sont courageux et progresseront au fur et à mesure.
Licence pro ITEMM promo 2007-2008.
arsenelapin
Un peu comme la musique, j'utilise l'écriture vraiment pour exprimer les émotions, un état d'être, une manière de voir les choses.
Je n'accepterai pas de critique sur le fond, quoi.
La forme, pourquoi pas, si ça peut faire progresser.

Mais le fond que je mets à chaque truc que j'écris a trop d'importance pour moi. C'est pour ça qu'il ne faut pas que je mette sur backstage ce que j'écris.
Seth Rotten
Ne publie rien alors si tu ne veux pas de critiques sur le fond.

Y aura forcement des gens pour le faire car ils n accrocheront pas a ce que tu dis a travers ta prose.

Pour publier il faut avoir les balls d affronter la critique sur le fond comme sur la forme. Si on est pas pret a ca quelqu en soit la raison vaut mieux s abstenir.
kaloo51
pirator a écrit :
Bonjour !
J'ai remarqué qu'il n'y avait aucun sujet où les écrivains amateurs, poésie, nouvelles, romans ou tout autre, pouvaient poster leurs récits, des fois que ça intéresse quelqu'un de lire un petit quelque chose ! Donc voici .


Publier ça ici ? Il faut être fou, inconscient, kamikaze et j'en oublie...
Pas de critiques sur ton texte, j'en suis bien incapable.
Par contre je ne vais pas te laisser tout seul, ton courage mérite bien ça . Un petit truc du temps où je sévissais ailleurs. N'ayant aucune prétention d'écrivain, c'est juste pour la déconne et ce sera le premier et dernier

Un censeur sachant censurer doit savoir censurer en son sein
- Bonjour Monsieur.
- Bonjour Monsieur, vous désirez ?
- Je souhaiterais être censeur s'il vous plaît.
- Et vous avez des prédispositions pour ça ?
- Oui, je n’ai que deux frères.
- C'est bien, mais ce n'est pas suffisant. Il faut aussi être sensé.
- Et je suis censé être quoi ?
- Vous êtes censé être un censeur sensé. Vous êtes sans son ou quoi ?
- Non, sans blé, c'est pour ça que je veux travailler.
- Mais Monsieur, un censeur censure, il ne travaille pas.
- Très bien, je note: rayer le mot travail de mon vocabulaire.
- Inutile de faire du zèle, vous n'êtes pas encore censeur. Enfin, vous voulez censurer quoi ?
- Les censeurs.
- Mais c'est insensé, si vous censurez les censeurs, vous allez être au chômage.
- Pas si je m'auto censure...
- Désolé, mais le véhicule n'est pas fourni.
- Ne vous inquiétez pas pour moi, j'ai un petit vélo dans la tête et je vais où je veux avec.
- Dans ce cas, allez vous faire voir ailleurs.
- Sans cœur !

Pascal
skynet
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8O Mais!...

C'est le test de recrutement pour devenir modérareur...

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