papiblues a écrit :
Au milieu des années 60 en Angleterre, la radio d'Etat, la BBC, passe à côté de la révolution musicale qui est en train de bouleverser le pays et le monde. Pour écouter les Kinks, les Rolling Stones, les Animals ou les Yardbirds, pour échapper aux sentiers battus du hit-parade, il n'y a qu'une solution : écouter Radio Luxembourg ou se brancher sur les radios pirates amarrées le long des côtes anglaises comme Radio Caroline ou Radio London.
En matière de radios pirates, les Anglais ne sont pas des précurseurs. Ils n'ont fait que transposer chez eux ce qui se passe déjà ailleurs. Il faut rappeler qu'à cette époque, les radios en Europe sont encore un monopole d'état et personne ne peut émettre à son propre compte depuis le territoire national sans enfreindre la loi. Pour contourner le problème, deux Danois ont imaginé d'installer une station de radio sur un bateau ancré en dehors des eaux territoriales, c'est-à-dire en haute mer. Ils se fondent sur le statut juridique que le droit international donne à la haute mer, et qui stipule que ces zones ne sont sous la dépendance d'aucun Etat. Ils aménagent un bateau de pêche battant pavillon panaméen, le "Cheeta", et ils commencent à émettre en direction de Copenhague, le 11 juillet 1958. C'est la naissance de Radio Mercur, la première des radios pirates modernes.
Radio Mercur doit surmonter de nombreuses difficultés. Le gouvernement danois brouille sa fréquence et réussit à faire perdre au bateau son pavillon panaméen. Plusieurs tempêtes, le démâtage de l'antenne et des problèmes d'ancrage ne viennent rien arranger. Malgré tout, Radio Mercur est un succès et fait des émules. Le 21 avril 1960, c'est le début de Radio Veronica qui émet en hollandais vers la Hollande.
Très vite, l'audience de Veronica est estimée à cinq millions d'auditeurs. Pourtant les moyens sont limités : les enregistrements sont réalisés sur une simple table et les animateurs - que l'on appellera plus tard les DJ's - passent leurs disques personnels.
Ecoutez ce document qui va vous faire revivre ce qui est alors la radio moderne, avec les jingles de l'époque et surtout la musique rock qui se développe et qui, grâce à cette forme de radio, va pouvoir trouver son public.
A écouter
http://www.rtl.fr/actualites/a(...)01449
Saviez vous que la musique POP et rock est en grande partie devenue populaire en Europe grace aux radios pirates dont radios caroline ?
merci pour ces repères historiques qui sont très intéressants. j'ajoute ce lien vers cette "brève histoire de la section italienne de l'internationale situationniste" qui aide à comprendre le contexte de cette époque :
http://parolesdesjours.free.fr(...)e.pdf
(extrait)
La crise de la société bourgeoise de l'après-guerre commença au début des
années soixante aux États-Unis pour passer ensuite en Europe, atteignant même les
pays de l'Est. Un changement profond s'était produit dans la nature du capitalisme et
des classes : on était passé d'une économie de la pénurie à une économie du
gaspillage; la domination formelle basée sur le contrôle du marché du travail s'était
transformée en une domination réelle basée sur la marchandisation de tous les aspects
de la vie, ou dit en termes sociologiques, sur la généralisation de la consommation
de masse. D'un côté, le secteur traditionnel du prolétariat, doté d'une certaine
formation technique et politique et d'un certain contrôle du processus productif, était
resté englué dans des structures partisanes et syndicales bureaucratisées qui le
poussaient vers la passivité et le conservatisme. De l'autre, le nouveau prolétariat,
l'«ouvrier-masse» fruit du récent développement industriel et de la tertiarisation
économique, c'est-à-dire, de la prépondérance de la science dans le processus
productif, sans tradition ni métier, pur péonage sans lien avec les intérêts de la
production de masse, menaçait la position dominante du secteur prolétarien officiel
en tant que sujet politique et social émergent.
La jeunesse fut spécialement sensible à la faillite des valeurs traditionnelles
bourgeoises, faillite qui prit à ses débuts la forme d'un problème générationnel
circonscrit au champ de la culture. Gianfranco Sanguinetti et Marco Maria Sigiani
étaient deux jeunes précoces aux inquiétudes littéraires qui se présentèrent en juin
1966 à La Spezia lors de la quatrième rencontre du «Gruppo 63», un mouvement
d'écrivains, de poètes et de critiques décidés à renouveler la littérature italienne en
rompant avec le cadre académique du néoréalisme de l'après-guerre au moyen de la
suppression des règles et de l'expérimentation avec le langage. Mais l'état d'esprit
anti-autoritaire et de rupture débordait le champ de la littérature et pénétrait la
jeunesse italienne la poussant vers la contestation. Dans les principales villes du pays
surgissaient des groupes de jeunes qui, inspirés par la contre-culture américaine ou
par les provos néerlandais, questionnaient les bases morales et sociales de l'ordre
établi, à savoir, la famille, l'école, la religion ou les tabous sexuels, l'armée, la
magistrature, la presse, la politique traditionnelle... tout en se déclarant pacifistes et
anti-militaristes.