Aerosmith

Le mercredi 06 décembre 2006

Énergique, physique, électrique, Steven Tyler est un rockeur encore et toujours spectaculaire... à 58 ans. Sa prestation bouillante a littéralement mis K.-O. Mötley Crüe, groupe avec lequel Aerosmith se produisait en programme double, hier, au Centre Bell.
Photo André Pichette, La Presse

Aerosmith écrase Mötley Crüe

Alexandre Vigneault

La Presse

Transposé dans le monde de la boxe, le doublé rock présenté hier au Centre Bell aurait été résumé de la manière suivante : Aerosmith a mis Mötley Crüe K.-O. au premier round. La bande à Tommy Lee ne faisait tout simplement pas le poids devant le bouillant Steven Tyler et son arsenal de hits. Cinq petites minutes après l'entrée en scène d'Aerosmith, qui a démarré en lion avec Toys In the Attic, le sort en était jeté.

Mötley Crüe avait pourtant eu amplement le temps de se faire valoir devant une foule enthousiaste, et indulgente, qui ne s'est pas fait prier pour entonner Girls, Girls, Girls, Same Old Situation ou Home Sweet Home avec un Vince Neil maquillé comme une vieille catin et pas terriblement en forme au plan vocal. Et le public ne s'est même pas rebellé contre l'irritant Tommy Lee, qui n'arrêtait pas de crier au Centre Bell de faire plus de bruit.

La performance de Mötley Crüe a donné lieu, au mieux, à un brouillon de numéro de cirque rock'n'roll. La faute de la sonorisation, d'abord. La batterie de Tommy Lee enterrait tout le monde. On n'entendait presque jamais la basse de Nicky Sixx et pas assez la guitare de Mick Mars. Or, ces riffs découpés constituent grosso modo le principal intérêt de Mötley Crüe.

On a pourtant cru que ce ne serait pas si mal, quand le groupe a lancé Dr. Feelgood. Une heure et demie plus tard, quand Kickstar My Heart n'en finissait plus de finir, on avait juste hâte que ces stars déboulonnées cèdent les planches à Aerosmith. Et on vous épargne la description des numéros de «pitounes» qui dansent dans des cages et le détail des innombrables effets spéciaux déployés (pétards, feux d'artifices, colonne de feu), qui n'ont pas su donner de l'éclat à une performance qui en manquait cruellement.

La barre n'était pas très haute pour Aerosmith. Le contraste a été d'autant plus frappant. On pourrait nuancer et dire que la sonorisation était calibrée pour la tête d'affiche, que la foule était pour Steven Tyler, Joe Perry et les autres, que le décalage est tout à fait normal. Ça n'a rien à voir. Aerosmith a déjà connu des passages à vide, mais est dans une forme étonnante ces temps-ci. On pourrait dire que Steven Tyler est aussi dans une forme spectaculaire pour ses 58 ans. Ça non plus, ça n'a rien à voir. Tyler est spectaculaire, point.

Sa voix se porte bien. Son charisme, plus que bien. On ne regarde que lui, en fait, lorsque Aerosmith occupe une scène. Énergique, physique, électrique, Steven Tyler a encore l'air crédible lorsqu'il se la joue très sexe. Durant Baby Please Don't Go, il a mimé l'acte, pratiquement couché sur la passerelle qui traversait le parterre, en regardant une spectatrice droit dans les yeux. C'était drôle, mais pas ridicule. Ce gars-là a du panache comme peu d'autres et, c'est drôle à dire, pas mal de classe pour un rockeur décadent!

Tyler a beau être une bombe, il ne fait pas tout, tout seul. Il a de bonnes chansons sur lesquelles s'appuyer. Des ballades puissantes à la Cryin' (impressionnante, hier), des numéros pop'n'roll à la Love In the Elevator et des morceaux de rock solides à la Toys In the Attic. Vu l'heure tardive à laquelle le groupe est entré en scène, on n'a pu voir que la moitié de la prestation d'Aerosmith. De ces 45 minutes de rock spectaculaire, on retient surtout ces moments nourris au blues : Walkin' the Dog et Baby Please Don't Go. Dommage de n'avoir pu rester, ce concert «best of» devait aussi inclure des titres tels Dream On, Walk this Way et Sweet Emotion.