L'entreprise américaine Universal Audio est depuis plusieurs années très présente via ses plug-ins d'effets et ses cartes sons autant dans le monde des amateurs (éclairés) que celui des professionnels. Non contente de sa popularité sur ces segments, elle annonce le lancement d'une nouvelle gamme de produits, mettant en application son expérience de la modélisation sous la forme de pédales d'effets pour guitare (ou autre, on n'est pas jaloux). Découvrons ainsi ces 3 pédales UAFX : Starlight Echo Station, Astra Modulation Machine, et Golden Reverberator.

Rappel des faits (historiques)

Bien qu'Universal Audio soit connue des home-studistes actuels via le "digital" (ses célèbres plug-ins et cartes son Apollo), la marque est pourtant âgée de plus d'un demi-siècle. Crée en 1958 par l'ingénieur Bill Putnam Sr, Universal Audio développe à son origine des outils analogiques, notamment le fameux préamplificateur 610, puis, suivant divers changements de dénominations liés au marché et à l'expansion des sociétés, des standards tels le compresseur 1176 ou le LA-2A. L'entreprise est finalement avalée par JBL dans les années 80. En 1999, les deux fils de Bill Putnam décident de relancer la marque, et se tournent vers l'émulation d'équipements audio sous forme de plug-ins, dont les célèbres créations UA et Teletronix, pour ensuite se diriger vers le développement d'interfaces audio début 2010, et la création de pédales d'effet en 2021.

Déballage

Nous avons entre les mains 3 boîtes plutôt grosses. Le contenant ne s’ouvre pas "traditionnellement", mais comme ces ensembles de livres où la vraie boite est enserrée dans un coffret cartonné. A l’ouverture, nous sommes dans les codes du luxe : un écrin noir, partiellement couvert de velours. Chaque pédale est livrée avec un mode d’emploi couvrant un recto A4, un macaron cartonné portant un QR code invitant à enregistrer la pédale sur le site et… c'est tout ! Pas de stickers ou autres goodies. Même si ce genre de choses est très inutile, on apprécie toujours un autocollant, un dessin, un bonbon ou tout autre chose (gratuite).

Les 3 pédales sont identiques dans leur construction : même imposant et solide boitier, même nombre de switches, de potards, de sorties, d'entrées et de connexions numériques. Seules se différencient les couleurs et la sérigraphie, reprenant les codes déjà présents sur les boites. Le boîtier semble être en aluminium, d'une assez grande hauteur. Il est d'une stabilité sans faille grâce à 4 épais et larges patins en caoutchouc. On note au dos une étiquette avec le numéro de série ainsi que la mention "designed in California, made in Malaysia" - et oui, même à ce prix, c'est une construction asiatique. Nous trouvons deux principaux (et silencieux) footswitches : un ON/OFF et un PRESET. A noter que la pédale est par défaut True Bypass mais que l'application à venir (appairable en Bluetooth) permettra l'accès à un mode avec Buffer. Le reste du panneau avant s'organise en 3 rangées (3 potards / 3 interrupteurs / 3 potards) dont bien entendu les fonctions diffèrent selon la pédale (et la modélisation d'effet sélectionnée). La seule constante ici concerne l'interrupteur central (Store) qui permet donc d'enregistrer les réglages de l'appareil dans un seul et unique preset…

Sur la tranche supérieure, nous trouvons entrées et sorties stéréo au format double jack 1/4, une embase en métal pour alimentation 9V, une prise USB C (câble non fourni) ainsi qu'un bouton poussoir PAIR associé à une LED (qui servira à appairer la pédale à un terminal Bluetooth). L'alimentation se fera uniquement via secteur : pas de pile, numérique oblige! Il faudra un bloc distribuant 400mA... dommage qu'à ce prix ce ne soit pas fourni comme chez certains autres concurrents.

Malgré ces quelques remarques, la première impression reste excellente : nous avons entre les mains des produits présentant une qualité de fabrication (du moins matériel) de premier ordre, c'est beau, ça brille, ça fait envie ! Le physique étant traité, attardons-nous sur le fond et le son de chaque pédale car l'intérieur peuplé de circuits imprimés et de processeurs ne porte que peu d'intérêt à moins d'être technicien.




Golden Reverberator

Bien que le look puisse laisser penser de loin qu'il s'agit d'un simulation de Marshall, l'appellation ne laisse aucun doute. Via l'interrupteur 3 positions le plus à gauche (comme sur les autres pédales d'ailleurs), nous avons le détail d'une partie des modélisations disponibles : Spring 65, Plate 140 et Hall 224. Ces 3 propositions retracent l'évolution des outils et de la technologie tournés vers la réverbération, allant de la simulation d'effets "mécaniques" aux processeurs digitaux et la reproduction d'environnements réels ou pas.

Les simulations de réverbérations dites mécaniques s'inspirent de réverbes à ressort (SPRING) d'amplis à lampes des années 60 et de réverbes à plaques de studio ("140" pour filiation de l'EMT 140, la première de ce type). La position HALL224 vaut pour l'effet numérique crée par Lexicon sur la fin des années 70. Attention, bien que la sérigraphie n'indique que 3 effets, vous avez cependant accès - gratuitement - à des algorithmes supplémentaires (que ce soit la pour la Golden ou les autres) en vous enregistrant sur le site. Bien qu'une action soit nécessaire pour les récupérer (les astuces du marketing), leurs paramètres sont d'ores et déjà précisés sur le mode d'emploi. Leur sélection s'affichera via une LED verte (là où les algorithmes "d'origine" ont une LED rouge).

 
Ces simulations sont contrôlées et modelées via 6 potentiomètres : Decay et Predelay, des correcteurs de tonalités Bass et Treble, un Mode pour choisir la modulation (une touche légère ou non de chorus) ainsi qu'un Mix. L'interrupteur 3 positions le plus à droite permet de sélectionner des "modes" qui différeront selon l'algorithme sélectionné : des "couleurs" pour les Spring et Plate, des tailles différentes de pièces pour la Hall 224 (allant de la Room au Large Hall). Le dosage de ces effets se fait via un unique potentiomètre (MOD), qui trouvera ses limites lorsqu'intervenant simultanément sur deux paramètres (Rate & Depth pour le fluter par exemple). Rien de très grave cependant, ces petites touches de modulations étant très appréciables pour donner une couleur plus particulière à l'ensemble. Les simulations sont, nous n'en doutions pas, d'une grande qualité, ne laissant absolument pas transparaitre le moteur numérique de la machine. Les différents contrôles réagissent précisément, sans retard ou autres "glitches". Les 3 effets et les différentes modulations ici proposés permettent de couvrir tous les besoins de réverbérations traditionnelles, avec un grand réalisme et pas mal de flexibilité. Les touches de modulations associées à un branchement stéréo de l'ensemble créent de très magnifiques rendus. 

Parlons ici du switch PRESET : il permet de basculer sur LA sauvegarde de la position des différents contrôles. Réappuyer sur le ON enverra l'utilisateur sur la sonorité correspondante à la position réelle des potentiomètres. Chose déstabilisante (bien que logique à la réflexion) : lorsque l'on presse le PRESET, la LED ON s'éteint. En effet, les deux footswitches sont indépendants, mais non "cumulables" : l'ON de l'un éteint l'ON de l'autre et on peut éteindre ensuite la pédale d'un côté ou de l'autre.  

Starlight Echo Station

Logiquement, nous migrons de la reverb au delay, avec la même idée de rassembler dans une seule pédale des standards de l'analogique et du numérique.  Nous trouvons donc dans la Starlight des sonorités provenant du delay à bande Maestro Echoplex 3 et de la Deluxe Memory Man d'un côté, et d'une vision plus "parfaite" et numérique de l'autre avec un "Precision". En bonus, après inscription, vous récupérerez également le delay "mécanique" maison Copper Time Cube construit autour d'un tuyau d'arrosage, parfait pour les courts retards... Tandis que certains contrôles ne laissent aucun doute (Delay / Feedback / Mix / Division) et s'adressent de manière similaire à chaque simulation, d'autres tels Color, Mod ou A/B/C nécessitent un passage par le mode d'emploi. Nous sommes ici dans de la simulation et les contrôles - et ce qui est en résulte, sont calqués sur les produits originaux. Ainsi, le Color va jouer sur le volume du signal attaquant la bande de l'Echoplex, avec la possibilité de saturer tout cela. Pour la DMM, il s'agit du signal d'entrée, et d'une tonalité pour le Precision.  Les réactions sont ici répliquées, avec la possibilité de faire auto osciller le signal en poussant le feedback sur la Maestro ou la DMM, tout comme le souffle crescendo lié à l'utilisation extrême de ce contrôle.

Les diverses variations permises par l'interrupteur A/B/C donneront accès aux différentes saveurs offertes par les modèles originaux, allant de la qualité de la bande pour l'Echoplex aux modulations de la Memory Man et de la Precision. Le potentiomètre MOD permettra d'affiner les réglages de ces modulations, avec la même limite soulevée précédemment, à savoir un unique potard pour contrôler plusieurs éléments. L'utilisation de ces modes permet d'ouvrir la magnifique stéréo de la Startlight que nous avons tant appréciée (il faut écouter la vidéo de test avec un casque). Les légers mouvements dans l'espace stéréo créent un environnement vraiment exceptionnel, et permettent de créer un grand nombre d'ambiances. Cette Starlight s'adresse ainsi à tous les amoureux de delay, que ce soit d'un petit délai de confort ou slapback aux explorations sonores et bruitistes, avec une touche d'authenticité et une qualité indéniable. 

Chose intéressante, la queue de delay va vivre lorsque vous basculez de la sauvegarde PRESET aux réglages "live" des boutons mais il ne semble pas (encore?) possible de reproduire cela lorsque l'on désactive l'effet que ce soit sur la Starlight ou la Golden.  

A la différence des deux autres pédales, le switch PRESET n’a pas qu'une fonction de rappel de sauvegarde mais fait également office de Tap Tempo (toujours appréciable). Par contre, pour pouvoir rappeler le Preset, il faudra presser environ 1.5sec sur le switch. Étrangement, le preset s’enclenche non pas au bout de 1.5 sec mais seulement lorsque vous relâchez la pression. Vous pouvez donc bien appuyer 30 secondes, ça ne fera rien tant que vous laissez le pied dessus. Pour savoir si vous avez appuyé assez longtemps, la LED associée à la simulation sélectionnée clignotera. 

Astra Modulation Machine

La pédale de modulation Astra a été la plus compliquée à appréhender. En effet, suivant la logique de conception de la gamme, nous retrouvons plusieurs effets à l'intérieur, avec des indications sérigraphiées communes aux effets embarqués. Là où cela était globalement accessible pour les delay et reverb, nous sommes ici face à différentes des types d'effets (Chorus, Flanger, Tremolo), qui sur le papier partagent des variables communes (Speed, Depth, Intensity) et d'autres moins. Dans la continuité des autres pédales, nous avons à faire à des simulations précises de standards réputés et appréciés de l'industrie, et cela à un important impact sur l'approche des contrôles - nous y reviendrons dans un instant.

L'Astra renferme donc un Chorus Brigade (réplique de la BOSS CE-1), un Flanger/Doubler (réplique du MXR 126), ainsi que le Tremolo émanant d'un ampli Fender des années 60 (Princeton & Co). En bonus, vous aurez un Phaser MXR90 ainsi qu'un second Tremolo, sur lequel la dynamique de votre jeu pourra faire varier la vitesse de l'effet (chose que nous avions vu sur la Great Escape de Thrilltone

Cela nous fait une belle boite bien fournie pour l'amoureux des modulations. Par contre, préparez-vous à ouvrir le mode d'emploi et surtout à aller sur le site qui est beaucoup plus parlant et utile. En effet, selon les types d'effets choisis, les potentiomètres n'auront donc pas la même utilité ou... n'aurons peut-être même aucune action, réplique oblige! Par exemple, pour le Chorus Brigade, seuls 3 potentiomètres sur 6 fonctionnent, et ce ne sont pas les basiques "Speed" et "Depth" mais Intensity, Shade en guise de volume de sortie et le Mode pour sélectionner le mode de stéréo. Et nous parlons ici du mode Chorus de la simulation - en mode Vibrato, le Depth et le Speed sont fonctionnels au détriment de l'Intensity. De quoi perdre définitivement les plus instinctifs d'entre nous, qui devrons être patients et attentif aux explications... et y revenir, de nombreuses fois. Il est difficile de se souvenir de l'intégralité des contrôles (et de ceux inactifs) pour les 5 modulations, et cela ralenti énormément la création et l'utilisation. Précisons que le test a été réalisé avant la mise en ligne des pages dédiées sur le site Universal Audio, qui recensent et expliquent tout en détails - de manière bien plus complète et compréhensible que ne l'est le manuel.

Cette petite colère passée et en nous focalisant sur les sonorités, le sourire revient : les chorus sont soyeux, les flangers agréables - mêmes poussés aux extrêmes. La stéréo est également au rendez-vous, et les textures sont savoureuses, toujours de bon goût même dans leurs retranchements. Sur le plan sonore, nous touchons encore une fois la réussite et l'agréable.

Conclusion

Cette bascule d'Universal Audio sur un format pédale semble tout à fait logique. La migration s'est faite avec succès pour la Starlight et la Golden, mais nous ne pouvons dire la même chose de l'Astra, tant l’interface utilisateur est à notre avis peu intuitive et gâche le plaisir. Côté son, nous avons apprécié ces 3 pédales qui, au-delà de reproduire les réactions des modèles originaux, produisent des textures agréables et inspirantes, très loin de l'image "froide" (pour ce que ça signifie) des processeurs numériques. A noter qu'une configuration en stéréo décuple le potentiel et le plaisir procuré par les pédales UAFX. Nous avons à ce jour peu d'informations sur l'évolutivité des produits et si d'autres algorithmes seront disponibles par la suite - comme par exemple le H9 de Eventide. La prise USB et les mises à jour doivent bien servir à quelque chose  ! Une application est prévue pour piloter les pédales en Bluetooth mais sa pertinence semble sur le papier limitée, se résumant à modifier le fonctionnement du switch On/Off (True Bypass ou Buffer).

Proposées à 399€ (chacune), les pédales UAFX s'adressent à tous guitaristes de tout style amateur d'effet, mais peut être plus particulièrement aux "experts" pointilleux qui souhaiteraient absolument avoir LES standards dans une petite boite et seraient prêts à mettre le prix. 

On a aimé

- Le son, la stéréo, magnifyyyyque !
- L'esthétisme, très classe.
- La qualité de fabrication.

On a moins aimé

- L'interface de l'Astra.
- Pas d'alimentation fournie, ni de câble USB.
- Un unique preset.
- Pas de visibilité sur l'évolution des pédales.
- Le prix...

Test des pédales Universal Audio UAFX