Hotone fabrique les pédales d'effet les plus petites au monde. Essayées brièvement au Musikmesse de Francfort en 2013, elles s'étaient révélées être tout sauf des gadgets. Ayant eu six modèles de la gamme entre les mains (Grass, Chunk, Komp, Liftup, Whip et Fury) pendant un bon mois et l'occasion de faire quelques concerts avec, voici quelques avis sur ces étonnantes boîtes.

Runbo Guo, grand (et jeune) sorcier du son chinois et maître d'oeuvre chez Hotone Audio, n'en est pas à son coup d'essai. Il est aussi concepteur de nombreux circuits pour une fameuse marque commençant par « M » très en vogue ces derniers temps, et qui propose une bonne quarantaine de modèle clonés à partir de grands standards au format « nano », et qui font relativement l'unanimité. Passé 8ème dan dans l'art de la miniaturisation, il est bon de préciser que Runbo Guo ne miniaturise que le format de ses pédales, les composants sont bien de taille standard et l'on a bien affaire à du tout analogique, mais les circuits imprimés sont multi-couches, savamment imbriqués. Runbo, cette fois-ci, c'est SA guerre.

Pour ce qui est de leurs caractéristiques communes, les pédales Hotone ont toutes ce look sympa de petit droïde au regard malin dans leur très solide boîtier en métal, possèdent deux petits potentiomètres dédiés généralement au volume et au tone, un troisième, gros et translucide, agissant généralement sur le gain, situé sur la tranche éclairé par une LED (une couleur pour chaque modèle, ça fait son petit effet sur scène !) lorsque la pédale est activée, ainsi qu'un bouton poussoir modifiant le comportement du son : tantôt agissant sur l'égalisation, tantôt sur le gain, selon les modèles. On notera la présence d'une barre de métal juxtaposée au switch On/Off, véritable garde fou qui empêchera radicalement de faire bouger les réglages d'un malencontreux coup de pied, ainsi que d'endommager la pédale. Certes, on regrettera l'absence d'un compartiment pour pile 9V, mais la solidité apparente de l'objet, son look fun et sa taille comparable à une clé de voiture (7x4 centimètres) fait vite oublier ce petit détail. Voyons maintenant ce qu les Hotone ont dans le ventre !



Grass Overdrive :

La Grass est une OD dans l'esprit des amplis Dumble, une saturation modérée et chaude, qui fera ressortir merveilleusement le moindre détail de votre jeu. Sa courbe de fréquence est très flatteuse : les basses sont relativement ténues, mais loin d'être absentes, les médiums sont bien granuleux, craquants. Dans le haut du spectre, rien n'est agressif, et la Grass laisse plus parler les très hautes fréquences (la « presence ») que la bande 4khz/7khz. On peut donc aller chercher un son très brillant sans risquer de se prendre un grand coup de pic à glace dans les oreilles. Le mini-switch « bright » vous donnera un surplus de brillance, pour approcher la sonorité d'un micro simple avec des humbuckers par exemple. La dynamique est très surprenante, toutes les nuances de jeu sont audibles, du coup de médiator au vrombissement des cordes à vide. Comme toutes les pédales de la série, elle a une grande réserve de volume de sortie. Elle se révélera autant rock'n'roll sur des rythmiques bien cinglantes à la Malcolm Young ou Pete Townsend que chantante et gracieuse dans des phrasés doux à la Larry Carlton. Je retiens de ce test le son très granuleux à très faible gain. Une réussite !

Liftup Booster :

La Liftup est un booster très transparent, offrant un bon panel de tonalités. Hormis ses potards de volume et de tone (qui booste radicalement les hautes fréquences), la Liftup possède un réglage de gain léger, à la manière du RC Booster d'Xotic, permettant de salir l'effet de boost, de gagner un peu de saturation sans surcharger de volume l'entrée de votre ampli, ce qui est pratique pour ajuster un son crunch sensiblement au même niveau qu'à votre son clair de base. Le mini-switch « Warm » donne davantage d'épaisseur au son, le gonfle dans les bas médiums. Il donne les meilleurs résultats lorsque le tone est poussé un peu, au delà 9h, et enrichit considérablement le son, non sans rappeler la légendaire Klon Centaur (booster favori d'Angus Young). Suite à une comparaison A/B avec mon RC Booster, j'ai vraiment préféré la nervosité dans les médiums et la brillance du Liftup !

Chunk Distortion :

La Chunk est une distortion plutôt high gain très british, orientée punk 90's, grunge, heavy, d'un comportement similaire à la Crunch Box de MI audio. Le son est très plein, très médium. Ce ne sera pas le drive de prédilection des shredders, elle ne vous rendra pas toutes vos attaques soignées, ni vos savantes combinaisons de micros. En revanche elle sera parfaite pour lisser un jeu brouillon à la Kurt Cobain ou Billy Corgan, obtenir un son massif en groupe et percer dans le mix. La plage de man?uvre du gain va du crunch lourd au larsen. Le tone agit comme un treble cut/boost. Le mini-switch Hot semble être un léger booster pré-distortion, qui ajoutera un peu consistance dans les bas médiums et un poil plus de saturation. Les accords complexes sont assez bien rendus même à fort gain, la Chunk ne bave pas et ne lorgne jamais vers le fuzz. Bref, elle ne donne plus dans la peau de bête que dans la dentelle, mais avec brio.


Komp Compressor :

Coup de coeuur de la série en ce qui me concerne, j'ai trouvé le compresseur de mes rêves ! Au niveau des contrôles, nous avons un volume, un tone, un taux de compression et un mini-switch « Spark » qui ira magnifier les très hautes fréquences. Les compresseurs pour guitares ne possèdent généralement pas de réglage de ratio et de temps d'attaque, ceux-cis sont souvent règlés sur des valeurs uniques s'adaptant bien à la guitare. La particularité de la Komp est que le temps d'attaque n'est pas trop court, et que l'accent à davantage été mis sur le sustain. La plage de réglage du potentiomètre de compression part d'une compression à peine perceptible à un sustain redoutable, sans être ingérable, et on garde toujours une attaque bien piquante. La Komp peut donc être utilisée comme un léger treble boost, pour donner une sonorité de simple bobinage à un double avant d'attaquer une distorsion, par exemple. Dans des taux de compression plus poussés, le son n'est jamais écrasé, juste magnifié, limpide. A conseiller donc aux fans de son absolument clairs à la Mark Knopfler, ou comme outil de début de chaîne pour aller réveiller des hautes fréquences manquantes sur certains drives un peu boueux. Bravo !

Whip Metal Distortion :

Candidate « gros son » de la série, la Whip a tous le attraits d'une bonne distorsion metal, à savoir : de nombreuses égalisations possibles, beaucoup de gain, peu de bruit. Le potards « tone » déplace agit sur une EQ en V assez prononcée que l'on déplace le long du spectre sonore, le mini-switch « edge » gonfle les médiums. En conjuguant l'action des deux, on obtient un panel d'EQ assez impressionnant qui fait de la Whip un excellent outil pour doubler des pistes de guitares avec un timbre différents tout en gardant le même grain. Les palms mutes sont très précis, les harmoniques sifflantes sortent facilement, c'est tout bon pour une pédale dédiée ! D'autant plus que la guitare utilisée pur ce test est une Gretsch, ce qui n'était pas gagné... En comparaison A/B avec une Metal Muff EHX, qui présente sur le papier les mêmes caractéristiques, la Whip est indéniablement plus dynamique et précise et granuleuse.

Fury Fuzz :

La fuzz Hotone ne plaira pas à tout le monde. La Fury a certes un côté vintage type Fuzz Face dans le son, mais a un comportement plus moderne : le grain reste toujours ample, intelligible et réactif aux nuances d'attaque, mais on obtiendra pas de son clean satisfaisant en jouant avec le potard de volume de la guitare. Elle a du bas en réserve, beaucoup de bas... Trop de bas... Le Tone n'agissant que sur le haut du spectre, il est difficile de se débarrasser de ce trop plein de graves lorsqu'on utilise la Fury avec des humbuckers. C'est dommage, car son timbre hybride vintage/moderne est vraiment beau. En revanche, utilisée avec un set de simples bobinages, elle intéressera ceux qui se plaignent d'un manque de basses sur les fuzzs traditionnelles. Le mini-switch « push » est un pré-boost qui permettra d'attaquer le circuit de la pédale avec un gain un peu plus important, pour gagner en dynamique avec des micros à faible niveau de sortie par exemple. La Fury est également recommandable en tant que fuzz pour basse !


Verdict...

Les Hotone sont des vraies petites tueries. Elles sont toutes ultra dynamiques, racées, et n'ont rien à envier à des pédales boutiques trois fois plus chères. Elle sont solides, prêtes à accueillir sans broncher un violent coup de santiag', et suffisamment lourdes pour ne pas se balader intempestivement sur un pedal board. Malgré leur petites tailles, les contrôles sont très visibles, même debout en plein jeu. Elles sont livrées avec des adhésifs velco et gomme aux dimensions du boîtier. Pour des prix tournant autour de 70€, je ne vois pas de mal à en dire !

Merci au magasin Guitars Rebellion pour le prêt des pédales.

Les plus
- Le look, la taille
- La robustesse
- Mention spéciale pour le compresseur !

Les moins
- Pas de compartiment pile
- Rien d'autre !


 
Hotone, petit mais costaud