Un qui avait tout compris, c'est celui qui avait écrit tout ça :
Certes, il est pénible de vieillir, mais il est important de vieillir bien, c’est-à-dire sans déranger les jeunes.
" Jean Jaurès? C’est une rue, quoi ! ", me disait récemment l’étron bachelier d’une voisine, laquelle et son mari, par parenthèse, acceptent de coucher par terre chez eux les soirs où leur crétin souhaite trombiner sa copine de caleçon dans le lit conjugal.
Ceci expliquant cela: il n’y a qu’un "ah" de résignation entre défection et défécation.
Vous n’avez rien contre les jeunes?"
Version à peine édulcorée du répugnant: "T’as pas cent balles?" C’est la phrase clé que vous balancent de molles gouapes en queue de puberté, pour tenter de vous escroquer d’une revue bidon entièrement peinte avec les genoux par des jeunes infirmes. ( Je veux dire "handicapés". Que les bancals m’excusent.)
C’est la faute au malaise des jeunes si, après trois années de fac et 7 ans de lycée, ils croient encore que le Montherlant est un glacier Alpin, Boris Vian un dissident soviétique, Sartre le chef-lieu de la rillette du Mans.
Il est de fait que les vieux cons, comme vous dites, sont d’anciens jeunes cons restés fidèles aux mêmes valeurs sacrées de la condition humaine qui s’accommodent aussi bien de la banane sur l’œil à 18 ans que de la casquette Ricard à 50
Les jeunes ont été nombreux à m’écrire ces jours-ci, pour me traiter de vieux cons. Si tant est qu’on puisse appeler "écrire" n’importe quelle tentative de représentation d’une ébauche de pensée par le biais de symboles graphiques incohérents couchés dans le désordre au mépris total de la grammaire, de la syntaxe, de l’orthographe et du souvenir de mon aïeule Germaine Philippin, institutrice de l’époque missionnaire, qu’une cédille oubliée décourageait aux larmes.
Malgré les flots de bave haineuse dont je ne cesse de les enduire à longueur d’antenne, les jeunes s’obstinent à affluer à ces enregistrements en plus grand nombre que les rares sympathiques vieux cons qui m’honorent chaque semaine ici de leurs chaleureux et ultimes tremblotements pré grabataires. C’est à se demander si ces étourneaux d’adolescents, frémissant d’enthousiasme et cloqués d’acné, ne croient pas que je plaisante quand je leur dis que je les hais.
La jeunesse, toutes les jeunesses sont le temps kafkaïen où la larve humiliée, couchée sur le dos, n’a pas plus de raison de ramener sa fraise que de chances de se remettre toute seule sur ses pattes.
Autant que la vôtre, je renie la mienne.
L’humanité est un cafard. La jeunesse est son ver blanc.
Maderalinda