zôsö85 a écrit :
Ouais mais bon ça m'a fait bizarre, au début on se dit "la guerre c'est mal", à la fin on se dit "butez les ces frigolins". Bon après c'est un film de guerre honnête.
J'ai enfin vu "Fury" donc. Ce que tu dis est vrai, et pour moi s'explique par un processus progressif d'identification aux protagonistes: au départ, on voit les choses d'un œil extérieur et donc la guerre telle qu'elle est: un abattoir à pauvres types. Puis peu à peu on se rapproche de l'équipage (d'autant qu'on est souvent engoncés avec eux dans l'habitacle minuscule) et donc on finit par voir par leurs yeux, d'où le changement progressif de point de vue.
Le processus est par ailleurs parfaitement en parallèle à l'"initiation" progressive du bleu, et son empathie de plus en plus grande pour ses collègues et sa fascination pour leur leader, qui fait que d'une façon assez perverse, c'est son adhésion au jusque-au-boutisme de celui-ci qui fait que les autres restent finalement dans le char immobilisé.
On peut voir cette scène comme du bête héroïsme un peu bas-du-front classique, perso je trouve au contraire qu'elle montre à merveille comment manipuler des hommes pour les amener à se sacrifier. Le personnage de Pitt est trouble depuis le départ, charismatique en diable mais aussi redoutable manipulateur (et il fallait sans doute avoir ces caractéristiques pour se faire respecter dans ce genre de contexte). On est donc loin d'un film militariste je trouve.
Par ailleurs, la beauté formelle du film est indéniable, tout comme l'excellentissime représentation de la vie dans un char au combat - la sensation d'enfermement, la vue parcellaire et limitée, la lourdeur de manoeuvrement etc etc ... Je sais que beaucoup ont prétendu que les combats de char n'étaient pas réalistes, je trouve au contraire qu'ils sont extrêmement bien réalisés (non, tout obus qui touche un char ne le détruit pas - beaucoup ricochent; et oui, même quatre Sherman n'étaient pas de trop pour avoir une chance face à un Tigre, leur seul avantage étant leur plus grande mobilité). D'ailleurs, les vétérans qui ont vu le film approuvent.
Enfin, concernant les munitions "de couleur", comme cela est d'ailleurs signalé dans le film, une balle sur cinq était traçante (afin de voir où on tire!), et effectivement de couleur différente selon les camps - ça avait rarement été montré jusqu'ici, mais c'est la réalité.
Au final, un film très réussi pour moi, avec un casting irréprochable mais quelques faiblesses quand même: l'équipage un peu cliché (la brute, la grande gueule, le croyant, le chef charismatique "bourru-mais-pas-insensible" et le bleu donc) mais heureusement superbement interprété (je ne croyais pas dire ça un jour mais Shia La Beouf joue ici à merveille!), la scène de "fraternisation" peut-être dispensable lors de la pause au village (là aussi, de gros clichés à la pelle, vus dans 50 films du genre). Et un Brad Pitt trop vieux pour le rôle (à l'époque, un vétéran avait 25 ans!) mais qui bluffe quand même son monde, difficile de croire que c'est le même qui fait l'ahurissant gugusse de "Burn after reading"
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In rod we truss.
"Quelle opulence" - themidnighter
"It's sink or swim - shut up!"