A Marcaut. Oui, je crois qu'il y a toujours malentendu. Je dois être nul en communication. Je n'ai pas dit que l'art pour l'art n'avais pas de but. J'assimile le but à la démarche, que j'ai expliquée. Une oeuvre d'art sans démarche n'en est pas une. Donc on peut avoir une démarche qui soit tout autre qu'une volonté de beauté ou de représentation. D'où l'ambiguité du mot "esthétique". Ce mot n'est pas synonyme de beauté dans le sens basique : c'est beau. Il est plutôt synonyme de vision des choses.
De plus, lorsque les romantiques ont voulu casser les règles qui avaient été établies par les classiques, c'est à dire transformer le langage artistique à leur façon, ils ne l'ont pas fait en se disant : "chouette, on va pouvoir mieux imiter la réalité, dire des messages etc."
Alors soit, je sais que l'art abstrait a pour but de mieux toucher l'homme, en se débarassant de toute forme de représentation, ce qui rend d'autant plus l'oeuvre intemporelle, car dénuée de contexte culturel ( architecture, costumes etc. ). Mais doit on parler d'émotion lorsque l'on regarde une oeuvre abstraite ? N'est ce pas une autre partie de nous qui travaille, l'intellect par exemple ? Sans faire d'élitisme, la musique classique n'a pas la même démarche que la musique pop par exemple, car cette première explore le langage autonome de la musique jusqu'au bout, et donc est très complexe. C'est de la musique pour l'amour de la musique. La pop est extrêmement liée au contexte culturel, politique. 99,99 % de la musique pop est sous forme de chansons, donc intusion d'un langage parlé dans la musique. Il y a en quelque sorte conflit de deux systèmes autonomes : la parole et la musique. Immédiatement on a choisi de subordonner la musique à la parole. La musique a dans ce cas là perdu son autonomie de langage. Ceci n'est pas figé, et il existe des différents degrés de "subordination" de la musique au langage. Dans les chansons dites à textes, les paroles ont largement la priorié sur la musique. Sans musique elles seraient encore écoutables, sous formes de poèmes, qui est la forme originelle d'une chanson. Dans les chansons "légères", la musique a une place plus importante.
Mais dans la musique instrumentale, que ce soit du classique, du Metal, ou du rock, la mélodie, le rythme, l'harmonie retrouvent toutes leurs possibilités de langage.
Alors bien sûr, la condition sine qua non pour apprécier une musique c'est de s'identifier à elle, de la comprendre. Comme si l'on apprenait une langue étrangère, pour comprendre le langage de l'Autre.
Tu parles du monde intérieur : Il est intérieur, donc il ne reflète pas forcément une réalité culturelle, quoiqu'il en est influencé, mais plutôt une réalité psychologique, voire philosophique. Un monde imaginaire comme celui de -M-, par exemple, possède ses propres règles, ses propres signaux. Ce que -M- fait dans sa musique, c'est de parler de son monde : A la limite, et en caricaturant : "Qu'est ce qu'on en a à foutre de son monde !" En effet, pourquoi ce gars là vient il nous parler de son monde, ça ne nous sert à rien. Ben justement, voilà je crois, la clé de l'art : ça ne sert à rien, c'est gratuit, c'est fortuit, éphémère. Mais on aime ça quand même : s'intéresser à l'art pour l'art, dans le sens noble du terme, me semble tout à fait intéressant et enrichissant. On est pas obligé de "dire" un contenu, et simplement s'intéresser à la forme parce que l'on aime ça. Cela ne veut pas pour autant dire que l'on a pas de démarche ni de but.