Tifa Lockheart a écrit :
HS
Hum, sais tu que les surveillants de prison ont un taux très élevés de suicide? Sais tu aussi qu'ils sont une espérence de vie apres la retraite relativement faible par rapport à ceux qui ont exercé un autre métier? Dans mon entourage et dans ma famille beaucoup de personnes travaillent dans l'univers pénitencier... Alors franchement quand on dit que la prison détruit les délinquants, ben ça me fait bondir, car les surveillants n'en sortent pas indemnes non plus. Et eux, ils ont juste demandé à faire un boulot. A chaque fois que mes proches partent au travail, j'ai froid dans le dos, surtout que certains ont reçus a plusieurs reprises des menaces de mort. Il ne faut pas oublier que l'etat essaye de rendre la prison la plus supportable possible : dans la prison la plus proche de chez moi, les detenus ont TPS, et dans je en sais plus quelle région, des petits pavillons ont été construits pour que les détenus aient plus d'intimité avec leurs familles durant une courte période. Bien sur ça ne remplace pas la liberté, mais tu ne voudrais pas qu'on offre à un violeur ou à un assassin une place dans un hotel 5 etoiles, non?[...]
Oui, je sais tout ça, mais ce n'était pas mon propos.
Je sais aussi que le taux de suicide en prison (pour les détenus) est entre 8 et 10 fois supérieur à celui de l'extérieur (et qu'il intervient souvent dans la quinzaine
précédant la sortie ... et la raison à ça n'est pas que la prison est mieux que la vie à l'extérieure)
Au sujet de TPS, sache pour l'avoir, il faut une télé et pour avoir une télé, il faut la payer, même en prison (à l'exception de certains quartiers mineurs). D'ailleurs, est-ce qu'avoir TPS est un plus pour la réinsertion ? Permets-moi d'en douter. La télé, en prison, n'a qu'un seul intérêt : calmer les esprits. Sans télé, ce serait d'autant plus invivable alors comme on ne peut pas shooter tout le monde, on trouve (ou on tolère) des palliatifs : télévision, shit, etc.
Pour ce que tu appelles des "pavillons", il s'agit en fait d'UVF (Unité de Vie Familiale). C'est encore à l'état de test en France et c'est quelque chose qui devrait être en place depuis des années, en raison du droit à la vie privée de tout un chacun.
Et je ne demande pas qu'on offre à un délinquant ou un criminel (pourquoi un violeur ou un assassin ?) la prison 5 étoiles, mais juste qu'on respecte les Droits de l'Homme en prison aussi. De toute façon, même un hôtel 5 étoiles n'enlèverait pas la privation de liberté inhérente à la prison et le
s pauvreté
s qui vont avec (financière, morale, culturelle, sexuelle, intellectuelle, etc.) et sur lesquelles il serait vraiment temps de faire quelque chose.
Par exemple au niveau de l'hygiène (le CPT estimait en 2004 que les conditions d'hygiène actuelles en prison créait un risque sanitaire indéniable
*), la loi n'impose que 3 douches par semaine par personne. Dans les maisons d'arrêts, les détenus se retrouvent souvent à deux ou trois dans 9m², voire 4 dans 12 m². Je n'appelle pas ça des conditions de vie décentes. Actuellement, on en est à plus de 63 000 détenus pour moins de 50 000 places. Sachant que la surpopulation n'a lieu qu'en maison d'arrêt (les centres de détention étant soumis à un numerus clausus), je te laisse imaginer l'ampleur des dégats.
Les prisons françaises font parties des pires de l'UE (cf. rapport de Amnesty International, LDH, OIP, ...).
Pourquoi ça te fait bondir d'entendre que la prison détruit des détenus - au lieu de les aider à se réinsérer (loi du 22 juin 1987 donnant à la prison trois missions : garder, réinsérer, individualiser les peines) ? Est-ce faux ?
Dire que la prison détruit des détenus n'exclut pas qu'elle détruise des surveillants que je sache. D'ailleurs les syndicats de surveillants de prison sont les premiers à dénoncer l'état actuel des prisons et notamment la surpopulation. Ils parlaient, l'an passé, voyant le nombre de détenus, de
"véritable bombe à retardement".
Quant à l'état, tu m'excuseras mais il n'a pas fait pas grand chose depuis le début des années 1990. Je ne dis pas que rien n'est fait (les UVF seraient là pour me faire mentir) mais que peu de choses le sont. Les moyens ne sont toujours pas donnés pour que les détenus puissent se doucher au moins une fois par jour (et la loin n'est pas changé à ce sujet), beaucoup de prisons sont toujours vétustes, le nombre de travailleurs sociaux est ridiculement bas, de même pour les médecins, psychiatres et psychologues. Il y a toujours 19% d'illétrés en prison et 81 % qui ont un niveau inférieur au CAP. Les suicides sont toujours aussi nombreux, les peines alternatives et les aménagements de peines sont toujours peu mis en place (alors qu'on sait qu'un détenu ayant eu un amènagement de peines a plus de chances de ne pas retourner en prison qu'un détenu qui se tape une sortie sèche, alors qu'on sait qu'un TIG est souvent plus prolifique qu'une incarcération).
Bref, sans nier les problèmes relatifs au métier de surveillant de prison, force est de constater que les Droits de l'Homme sont bafoués tous les jours dans les prisons françaises. Je ne comprends pas ce qui te gêne là-dedans. En parlant des conditions de vie déplorable, je ne dis certainement pas que les surveillants se la coulent douce.
Pour terminer, un article qui date de 2004 :
*Rapport européen accablant sur l'état des prisons françaises
PARIS (Reuters) - Un rapport du Comité européen de prévention de la torture (CPT), qui dépend du Conseil de l'Europe, dresse un constat accablant de l'état des prisons françaises, vétustes et surpeuplées, et demande à Paris "la mise en place d'une stratégie cohérente".
"Les détenus sont soumis à un ensemble de facteurs néfastes - surpeuplement, conditions matérielles déplorables, conditions d'hygiène créant un risque sanitaire indéniable, sans même mentionner la pauvreté des programmes d'activité - qui peuvent légitimement être décrits comme s'apparentant à un traitement inhumain et dégradant", affirme le document.
La surpopulation dans les 185 prisons françaises a atteint en juillet dernier un niveau historique, avec 61.000 détenus pour une capacité théorique de 48.000 places. Après une baisse durant l'été, le nombre de prisonniers est reparti à la hausse pour atteindre 59.246 détenus au 1er janvier 2004.
Le CPT a établi son rapport après une visite des maisons d'arrêt de Loos (Nord) et de Toulon (Var), ainsi que de la centrale de Clairvaux (Aube) entre les 11 et 17 juin derniers. Cette inspection a été décidée inopinément en raison d'informations sur le nombre de suicides en détention, passé de 104 en 2001 à 122 en 2002.
A Loos s'entassaient 1.103 détenus pour 461 places, soit un taux d'occupation de 239%, constate le CPT dans son rapport dont Reuters a obtenu une copie. A Toulon, le taux était de 240%, avec 348 détenus pour 140 places.
A Loos comme à Toulon, les détenus étaient enfermés à trois dans des cellules de 9m² et certains étaient contraints de dormir sur des matelas étendus sur le sol. A Loos, "des containers débordants d'immondices malodorantes sont laissés plusieurs heures à l'entrée des sections", précise le rapport.
Dans ces conditions, "l'organisation de programmes d'activités (pour les détenus) relevait du défi", estiment les inspecteurs. Sur 348 détenus à Toulon, seuls 15 suivaient une formation professionnelle et 48 étaient scolarisés.
Concernant la centrale de Clairvaux, qui n'est pas surpeuplée mais accueille uniquement des condamnés à de longues peines dans des conditions de haute sécurité, le CPT recommande au gouvernement de "revoir les régimes de détention".
Ces conditions ont été durcies à la suite d'une mutinerie et les détenus vivent désormais la plupart du temps en cellule, ne se rencontrent que rarement et n'ont plus accès librement à la salle de télévision ou à la bibliothèque, dit le CPT.
Pour le comité, la surpopulation est liée "à une politique pénale répressive" et constitue une violation d'engagements antérieurs de Paris, pris après d'autres visites du CPT.
"Force est de constater le hiatus existant entre, d'une part, les intentions affichées par les autorités françaises et, d'autre part, la réalité sur le terrain", dit le comité.
Il "en appelle aux autorités françaises pour qu'elles accordent sans délai la plus haute priorité à la mise en place d'une stratégie cohérente de lutte contre le surpeuplement qui affecte le système pénitentiaire".