UIn morceau choisi tiré de libé surles reactions internationales.
El Mundo : Espagne, centre droit
L'égoïsme des Français
La victoire du non au référendum français ouvre une période d'incertitude et d'introspection. (...) Si le rejet par un pays petit ou moyen pouvait donner lieu à un deuxième vote, celui de la France, fondatrice et moteur de l'UE, laisse la Constitution au point mort. Surtout, à la différence de l'Espagne, le vote a suivi un débat d'une grande intensité démocratique et la forte participation a conféré au résultat une très grande légitimité. La responsabilité de cet échec revient en premier lieu au président Chirac qui, s'il avait de la dignité, devrait démissionner (...). La mauvaise situation économique a accentué la tendance naturelle des Français à l'immobilisme le plus égoïste, et à la défense bornée de leurs privilèges et d'un système de protection sociale devenu intenable. Les peurs ont été utilisées avec démagogie et habileté par les mouvements antimondialisation, le Parti communiste et par le numéro deux du Parti socialiste, Laurent Fabius. (...)
Financial Times Deutschland : Allemagne, quotidien des affaires, libéral
Chirac, politiquement mort
Le plus inquiétant est l'absence de dirigeant politique capable de sortir l'Europe de la crise. A deux ans de la fin de son mandat, Chirac est politiquement quasi mort. Depuis l'annonce de nouvelles élections en Allemagne, c'est la même chose pour le Chancelier Gerhard Schröder. Et le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, apparaît depuis le début comme une erreur de casting. (...) Il y a encore l'espoir que les Français finiront quand même peut-être après le départ de Chirac en 2007 par adopter la Constitution européenne. Mais il n'est pas certain que cette stratégie tienne le choc après le non prévisible des Néerlandais mercredi. Le non de la France pose la question de savoir si l'Europe n'a pas besoin d'une nouvelle organisation pour reconquérir l'approbation des électeurs dans toute l'Europe.
Tagesspiegel : Allemagne, centre droit
Remettre en route le moteur franco-allemand
Les vagues qui émanent de ce non n'atteignent pas seulement la France. Elles touchent aussi l'Allemagne. La question est de savoir si Berlin et Paris sont encore capables d'endosser leur rôle traditionnel de guides européens. Dans l'intérêt de l'Europe, Chirac et Schröder avaient jusqu'alors cherché des lignes communes sur les grandes questions comme les finances de l'Union ou les discussions avec la Turquie. Dans les mois à venir, il va falloir une grande imagination à Berlin et Paris pour remettre le moteur franco-allemand en route. Que l'Allemagne soit entrée en campagne électorale ne leur facilite pas la tache.
La Stampa : Italie, centre droit
Des passions contradictoires
Le peuple français a dit non de manière confuse. Derrière le refus se mêlent les passions les plus contradictoires : le désir viscéral de se replier derrière les frontières, dans un élan souverainiste ; l'espoir déçu que l'Europe ne soit pas encore une puissance ; la peur xénophobe liée à l'élargissement ; la crainte que l'Union en construction ne protège pas des secousses qui pourront venir d'un monde en mutation, où la compétition sera rude entre les grandes puissances. (...) Le non français nous concerne tous. (...) Avant d'adopter une certaine ligne politique, nous devons savoir qui nous sommes, combien nous voulons être, quel type de gouvernement (supranational ou national) nous voulons donner à notre volonté d'être ensemble. Si l'Europe existait déjà comme puissance, les Européens seraient plus nombreux à voter pour la Constitution. Et la première serait peut-être la France, qui cultive depuis toujours le rêve d'une Europe qui parle d'égale à égale avec les autres puissances mondiales.
The Daily Telegraph : Grande-Bretagne, conservateur
Les leaders européens devraient changer de direction
Même si nous l'avions vu venir, c'est malgré tout impressionnant. La France, le pays le plus communautaire de l'Union européenne, en a eu marre. Ayant posé les principes à partir desquels l'UE est dirigée la politique industrielle protectionniste, les subventions à l'agriculture, la méfiance gaulliste à l'égard de l'Amérique , les Français ont vilipendé leur propre création. Defiant des médias unis, une classe politique pro-Bruxelles monolithique et des avalanches de propagande, ils ont dit un non retentissant aux euro-elites qui les ont gouvernés depuis un demi-siècle. (...) Si les leaders européens ont une once un gramme plutôt de décence, ils devraient accepter le verdict et changer de direction.
En effet, cette Constitution ne propose pas simplement quelques nouvelles extensions du pouvoir de l'Union européenne : elle rassemble la totalité de l'acquis communautaire, l'accumulation des compétences de l'Union. Les militants du oui n'ont cessé d'insister : un non signifierait le rejet du projet tout entier. Tout à fait (...)
Lidove Noviby : République tchèque, libéral
Retour vers le passé
Il faut garder la tête froide. L'histoire de l'Union ne s'est pas arrêtée dimanche soir. L'Europe a un mode d'emploi le traité de Nice et dramatiser n'est dans l'intérêt de personne. La Constitution a encore d'autres épreuves devant elle, à commencer par celle de mercredi. Ce n'est que si les Néerlandais disent non au texte que se posera la question de savoir s'il faut poursuivre ou jeter la Constitution aux oubliettes. Les Français ont rejeté l'Union telle qu'elle s'est constituée l'an dernier avec l'élargissement. Ils ont montré qu'ils ne voulaient pas d'avenir commun, mais un retour vers leur propre passé. La majorité s'attend à ce que le reste du club ait la même appréciation. Mais ce scénario ne se produira pas. Beaucoup d'Etats ne sont pas prêts à payer l'Etat social français, parce qu'avec le temps, cela pourrait faire couler l'Europe entière.
Rzeczpospolita : Pologne, centre droit
Une preuve de faiblesse
La Constitution européenne a été rejetée dans le pays qui a créé l'Europe unie et qui a été le moteur principal de l'intégration. L'Union ne peut plus fonctionner comme avant. Les Français ont dit non car ils en avaient assez d'une Europe qui décide des questions clés au fond des cabinets, sans consulter les électeurs. La troisième génération d'après-guerre ne peut plus se contenter des appels selon lesquels l'intégration est indispensable pour éviter les conflits. La décision des Français est une preuve de la faiblesse de l'Europe mais aussi de la France.
Mercredi, vraisemblablement, les Néerlandais les imiteront. S'ils avaient pu s'exprimer, les Allemands, les Italiens auraient agi de même. Les pays qui ont surmonté leur hostilité commune pour s'opposer au danger de l'URSS ont peur aujourd'hui de la globalisation et de la concurrence ouverte dans le cadre d'une Europe unifiée. Ils ne sont pas non plus capables de faire de l'Union un acteur qui agit sur le plan mondial sans avoir les Etats-Unis derrière. Il y a pourtant dans ce vote une bonne nouvelle. Une Europe politique va naître dont la direction sera tracée par les peuples, et non par les technocrates.
Izvestia : Russie, progouvernemental
L'Ukraine peut enterrer ses ambitions
Le scepticisme des Français à l'égard de la Constitution va sans doute ralentir le processus d'élargissement. Il y a an, l'Union européenne s'était dépêchée de faire adhérer huit pays d'Europe de l'Est qui comptent sérieusement sur l'apport financier de leurs riches voisins. Mais les Etats fondateurs de l'UE, ayant compris que leurs populations n'aiment pas cette perspective, n'ont pas l'intention de partager avec les nouveaux venus et vont les mettre au régime sec. L'entrée de la Roumanie et de la Bulgarie, prévue en janvier 2007, sera accompagnée de sévères restrictions quant à la libre circulation de leur main-d'oeuvre. La Turquie devra patienter des décennies encore. Dans un futur proche, les Français et ils ne seront pas les seuls bloqueront immanquablement leur adhésion, par référendum. L'Ukraine, qui frappe énergiquement à la porte de l'UE, peut enterrer ses ambitions.
Washington Post : Etats-Unis
Chirac mérite tout le mépris qu'il reçoit
C'est un non qui résonne à plusieurs niveaux : un rejet du document et de l'Europe élargie qu'il représente, un rejet de l'économie de marché qui est une évidence aux Etats-Unis, et par dessus tout, un rejet de Jacques Chirac, qui a essayé de pousser et d'amadouer la France afin qu'elle embrasse les réalités d'une économie globale, plutôt que d'essayer de les lui expliquer clairement. (...) Il sera la première victime du vote de dimanche, et mérite tout le mépris qu'il reçoit. (...) Son véritable échec, c'est de ne pas avoir su parler aux Français. Ceux-ci veulent maintenir leur patronat et leurs syndicats, leurs six semaines de vacances et les 35 heures, tout en étant une économie dynamique et performante. Chirac n'a jamais eu le courage de leur dire qu'ils ne pouvaient pas tout avoir. (...) La France aurait besoin d'un Bill Clinton tel qu'il était dans sa campagne présidentielle en 1996 (...): il avait dit aux Américains qu'ils souffriraient de délocalisations et de la compétition mondiale, mais qu'il leur fournirait les aides nécessaires pour trouver de nouveaux emplois.