Il serait possible de sanctionner un salarié en cas de faute. Extrait d'un interview d'un auteur du livre "Supprimer les licenciements"
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Mais vous évoquez aussi les autres licenciements ?
Laurent Garrouste : en effet, il nous semble urgent que s’ouvre enfin ce débat dans le mouvement ouvrier et parmi les juristes progressistes. Urgent car aujourd’hui en France deux licenciements sur trois sont des licenciements pour motif dit personnel : inaptitude, faute, etc. Prenons le cas en apparence le plus « embêtant », le licenciement pour faute du salarié. Il est évident aujourd’hui que bon nombre de ces licenciements sont infondés, comme le montrent les jugements de la minorité d’affaires qui sont portées devant le conseil des prud’hommes. Mais que se passe t-il en réalité ? L’employeur peut licencier un salarié pour une faute totalement imaginaire, sans que celui-ci puisse - sauf rares cas particuliers - obtenir, s’il le souhaite, sa réintégration, et cela même s’il gagne devant les prud’hommes. C’est pourtant ce qui existe en Italie dans les entreprises de plus de 15 salariés, un acquis que Berlusconi a cherché à remettre en cause sans succès en 2003. Plusieurs millions de salariés s’y sont opposé dans la rue. Le minimum est d’exiger ce droit à la réintégration lorsque le licenciement est considéré comme sans cause réelle et sérieuse. Le minimum aussi est que l’employeur ne soit plus juge et partie : aujourd’hui il accuse et juge de la faute en même temps. L’appréciation de l’existence ou de la gravité de la faute doit lui échapper et revenir au juge prud’homal ou à l’inspection du travail. Mais, au-delà, le fait de pouvoir sanctionner une faute réellement existante, même très grave, par un licenciement ne doit-il pas être remis en cause ? En effet, n’est-il pas paradoxal de constater que l’on permet le licenciement pour faute, tout en autorisant le salarié licencié à reprendre un autre emploi ? Si on prend au sérieux le droit à l’emploi, il faut revenir sur cette conception archaïque : une faute réelle - ce qui existe évidemment - doit pouvoir entraîner une sanction, qui pourrait être le cas échéant un changement d’entreprise ou d’emploi, mais pas une mise hors de l’emploi. On rejoint alors le système décrit plus haut. En cas de délit pénal, le salarié relève de la justice, s’il est emprisonné son contrat est suspendu. Son employeur n’a pas à appliquer une double peine.