Pour mettre fin aux contre vérité et aux amalgames, voici un article de Libération qui explique les dérapages lors des manifs contre les USA et la politique de Sharon:
Citation:
Mobilisations/«Il ne s'agit pas d'une guerre mais d'une invasion.»
Vives tensions dans les rangs des antiguerre
Cortège très disparate et cacophonie de slogans, samedi, à Paris.
Par Catherine COROLLER et Christophe FORCARI et Karl LASKE et Marie-Joëlle GROS
lundi 31 mars 2003 (Liberation - 00:00)
es manifestations contre la guerre qui avaient été organisées, samedi, un peu partout en France ont moins mobilisé que les précédentes. Quelques milliers à Lyon, à Marseille, à Toulouse, à Montpellier, à Bordeaux, à Strasbourg. 18 000 personnes à Paris (selon la police), contre 90 000 le 22 mars. Et un cortège très disparate de petits groupes nichés derrière des banderoles scandant une cacophonie de slogans. Posté sur un trottoir du boulevard Saint-Germain, Philippe Sollers observe : «Il y a beaucoup de contradictions dans ce défilé. Je ne vois pas en quoi le drapeau irakien rejoint le noir et le rouge. La politique américaine est digne de la folie qui court.» Des contradictions et beaucoup de tensions en dépit des efforts des organisateurs très soucieux d'éviter les dérives antisémites ou islamistes de la manif du 22 mars, qui s'étaient soldées par l'agression de deux adhérents du mouvement juif de gauche Hachomer Hatzair.
Et cela n'a pas été toujours facile pour les médiateurs, dépêchés le long du cortège. Reconnaissables à leurs débardeurs blancs du Mouvement de la paix enfilés à l'envers et à leur casquette blanche ornés d'un autocollant frappé du slogan : «Unité contre la guerre, le racisme et l'antisémitisme», ils vont veiller tout au long de la manif. Le gros de la troupe est plutôt sage. Les drapeaux arc-en-ciel Pace flottent un peu partout. Les étudiants et lycéens défilent bon enfant en chantant et dansant. Les «Américains contre la guerre» sont toujours très applaudis. Dans le carré de tête, les «officiels» restent concentrés sur l'objectif : «Faire cesser la guerre contre l'Irak.» Il y a Olivier Besancenot, porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), Marie-George Buffet, secrétaire nationale du PCF, Arielle Denis, coprésidente du Mouvement pour la paix, Mouloud Aounit, secrétaire général du Mrap, et des représentants du mouvement Attac. «Afin de prémunir le mouvement de tout dérapage verbal pouvant dénaturer les intentions des manifestants», le PCF a même pris soin de distribuer la liste des slogans. Les médiateurs, eux aussi, distribuent leur autocollant.
«Martyr, repose-toi, on va continuer le combat»
Tout se passe plutôt bien jusqu'à ce qu'ils croisent certains groupes. «Vous avez un problème dans la tête avec l'antisémitisme !», lance un manifestant. Derrière la banderole de l'Association des Irakiens de France, proche du pouvoir en place à Bagdad, les slogans sont scandés en arabe : «Martyr, repose-toi, on va continuer le combat.» «Il ne s'agit pas d'une guerre mais d'une invasion, tente d'expliquer une Marocaine. L'Histoire ne pourra pas le pardonner aux Américains. J'espère que l'Irak sera le tombeau de l'impérialisme américain.» D'autres jeunes brûlent la bannière étoilée. Appellent au jihad. La coordination des comités pour la Palestine défile aux cris d'«Irak vaincra, Palestine vivra». Coincés entre les deux, les militants de l'Union juive française pour la paix (UJFP) sont très applaudis sur leur passage.
Banderoles antisémites
La température monte encore d'un cran à mi-parcours du défilé. A la hauteur de la station Mabillon, boulevard Saint-Germain. Des radicaux sortent une banderole antisémite. Le service d'ordre exige son retrait. Elle est incendiée et piétinée. Mais le SO est chassé aux cris de «sionistes assassins». Au métro Odéon, deux nouvelles banderoles apparaissent : «Jérusalem est à nous» et «Sionistes = fascistes». Dessinée, l'étoile de David égale la croix gammée. Deux médiateurs s'opposent : «On veut pas de croix gammée, c'est un symbole raciste. Vous êtes au sein d'une manif qui interdit ça.» «Tu nous emmerdes, toi ?», lui répond un jeune. «Les juifs sont des criminels», crie une grande rouquine qui a apporté les banderoles. «Hitler aurait dû les finir», approuve un autre.
Devant le McDo du Luxembourg, protégé par un cordon de CRS, des sifflets et des huées. Beaucoup de manifestants portent suspendu au cou un écriteau sur lequel est écrit en arabe : «Dieu est grand», sur fond de drapeau irakien. Une femme brandit le drapeau du Hezbollah. «Même si on n'est pas pratiquant, on est musulman», explique Ali, étudiant en droit à Jussieu. A l'arrivée à Denfert-Rochereau, Rudy, d'Hachomer, est éprouvé : «C'est très violent. Je me suis fait accuser d'être payé par les sionistes ou de travailler pour le Mossad. On a demandé à un mec qui avait un portrait de Saddam Hussein de l'enlever, il n'a pas voulu. On a failli se faire éclater.»
Sifflements, huées
Des manifestants grimpent sur la statue du lion, au centre de la place. Ils font flotter l'étoile de David et la croix gammée. «Une minute de silence pour les martyrs», lance un orateur, avant de lancer une prière en arabe. Quelqu'un demande qu'on s'exprime en français, il se fait huer. «L'ennemi, c'est Sharon plus que les juifs», tente une voix. Sifflée. Un représentant de l'UJFP prend le micro quelques secondes. «Nous sommes ici pour exprimer notre solidarité avec le peuple irakien, avec le peuple palestinien.» Sifflé aussi. Un organisateur interpelle un manifestant : «Est-ce que tu comprends le courage de quelqu'un qui est juif et qui nous soutient ? Il est avec nous, te mets pas en colère contre lui !».